Les Dépêches de Brazzaville



Compétitivité : la faible capacité de transformation désavantage les produits africains


 Citant le cas de la noix de cajou cultivée majoritairement dans le continent africain, la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (Cnuced) note avec regret que 15 % seulement des noix sont décortiquées sur le sol africain. Pour Robert Katako, expert rd-congolais, il faut créer ou recréer un écosystème adapté à la commercialisation des produits locaux sur le marché mondial.

En dépit de l’importante production de noix de cajou, l’Afrique n’est pas arrivée à se positionner en tant que leader dans ce segment du marché. Comme le révèle la Cnuced, le commerce mondial de noix de cajou brutes a doublé pour se situer à 2,1 milliards de kilos entre 2000 et 2018.

Près des deux tiers de la formidable croissance sont le fruit des producteurs africains, dont la Côte d’Ivoire, la Tanzanie, le Nigéria, le Bénin, la Guinée-Bissau, le Mozambique et le Ghana. Il est établi aujourd’hui que les exportateurs du continent africain n’obtiennent qu’une fraction du prix de détail final : « Les pays qui cultivent des noix de cajou mais ne les transforment pas à une échelle significative ne retiennent qu’une petite part de la valeur créée lorsque la noix passe de la ferme au magasin ».

Actuellement, les noix de cajou constituent une source de revenus pour un peu plus de 3 millions de petits exploitants agricoles africains. Comme l’explique la Cnuced, vingt pays de la région produisent 90 % des noix de cajou brutes commercialisée sur le marché mondial.

Malheureusement, seulement 15 % des noix sont décortiquées effectivement sur le sol africain. En retour, l’Asie qui constitue la prochaine destination décortique 85 % des noix de cajou du monde. Ensemble, l’Inde et le Vietnam ont totalisé 98 % des importations mondiales entre 2014 et 2018.

Recréer un écosystème favorable

La question de la faible compétitivité des produits africains est la conséquence  logique d’un certain nombre de facteurs. Il y a, relate Robert Katako, un réel problème de transformation des produits localement : « Il est difficile de parler de transformation sans une électricité suffisante pour alimenter l’industrie locale et même sans infrastructures. Les défis qui s’imposent à l’Afrique sont colossaux ».

Prenant en exemple la dernière initiative dans le secteur agricole RD-congolais, la création de la société coopérative « Mabele », il identifie plusieurs défis qui se posent aux initiateurs de ce premier marché spécialisé dans la commercialisation des produits du terroir.

Dans un premier temps, martèle-t-il, les initiateurs ont cherché à recréer tout l’écosystème, intégrant la distribution déficitaire. Il a fallu d’abord identifier les différents producteurs des produits locaux pour leur donner un endroit d’exposition, en l’occurrence le premier supermarché Mabele sur les 50 retenus dans le projet pour la seule ville de Kinshasa.

Ensuite, un accompagnement s’est avéré indispensable pour les aider à développer les techniques et les orienter vers les synergies qui favoriseront l’accroissement de leur production et leur permettront d’avoir des centres de stockage pour réduire les pertes. En chiffres, le projet Mabele a réussi le coup de maître de réunir trois cents membres fondateurs qui ont accepté de constituer le capital de la société coopérative. Il ambitionne la création de cinquante supermarchés à Kinshasa.


Laurent Essolomwa