Les Dépêches de Brazzaville



Conflit en Éthiopie : les efforts diplomatiques s’intensifient pour trouver une solution


Un an jour pour jour après l’envoi de l'armée fédérale au Tigré, la région la plus septentrionale de l'Éthiopie, les rebelles du Front de libération du peuple du Tigré (TPLF) sont désormais à quelques centaines de kilomètres d'Addis-Abeba.

Pour éviter que la capitale de l'Éthiopie ne soit attaquée par les insurgés du Tigré, les efforts diplomatiques s’intensifiaient. L’émissaire américain pour la corne de l’Afrique, Jeffrey Feltman, s’est notamment entretenu avec le président de la Commission de l’Union africaine, Moussa Faki Mahamat.

« Toute marche vers Addis provoquerait une augmentation des déplacements de population, une augmentation des besoins et des souffrances pour le peuple éthiopien. Cela augmenterait certainement le besoin d'aide humanitaire, tout en compliquant la capacité à la fournir », a prévenu un haut responsable de l’agence humanitaire gouvernementale américaine, Usaid.

L'Union européenne et l'Autorité intergouvernementale pour le développement (Igad), qui réunit les pays d'Afrique de l'est, ont aussi appelé à la fin des hostilités entre les forces gouvernementales et le TPLF.

Les appels au calme se sont intensifiés depuis mardi dernier, lorsque le gouvernement fédéral a décrété l'état d'urgence. La mesure a été approuvée par le Parlement, tandis que les autorités de la capitale demandaient aux habitants de s’organiser pour défendre la ville.

Cette mesure d'exception, imposée pour six mois, permet la mobilisation sous les drapeaux de tout citoyen éthiopien en âge de se battre. Elle permet aussi l'arrestation et la détention arbitraire de toute personne soupçonnée de collaborer avec les « groupes terroristes », une qualification appliquée au TPLF depuis le mois de mai.

Le président ougandais, Yoweri Museveni, a, quant à lui, prié les dirigeants d'Afrique de l'est de se réunir le 16 novembre prochain pour évoquer le conflit qui oppose le TPLF aux forces du gouvernement d'Abiy Ahmed.

« Les combats doivent cesser », a insisté le président kényan, Uhuru Kenyatta, dans un communiqué. Le secrétaire général des Nations unies, Antonio Guterres, a dit s'être entretenu avec Abiy Ahmed et avoir proposé de créer les conditions d'un dialogue entre Addis-Abeba et les insurgés.

L'ambassade américaine a annoncé qu'elle autorisait le départ volontaire de la plupart de son personnel et déconseillé les voyages en Éthiopie jugeant « une nouvelle escalade probable » et que « des troubles civils et des violences ethniques peuvent survenir ».

De son Côté, l’Union européenne a renouvelé ses appels à un cessez-le feu et à des négociations, estimant que « la récente escalade risque d'entraîner un peu plus le pays dans la fragmentation et les conflits armés généralisés, et d'aggraver la situation de la population ».

Rappelons que le Premier ministre éthiopien, Abiy Ahmed, avait proclamé la victoire des forces fédérales le 28 novembre 2020, trois semaines après avoir envoyé l'armée au Tigré pour destituer les autorités régionales dissidentes issues du TPLF, qu'il accusait d'avoir attaqué des bases militaires fédérales. Mais après la reprise de la région, les combattants pro-TPLF ont poursuivi leur offensive dans les régions voisines de l'Afar et de l'Ambara.

Après avoir gouverné de fait l'Éthiopie durant presque trente ans, le TPLF a été progressivement écarté du pouvoir lorsque Abiy Ahmed est devenu Premier ministre en 2018 et n'a cessé ensuite de défier l'autorité du gouvernement fédéral.

Plus de 400 000 personnes sont au bord de la famine au Tigré, soumis à un blocus « de facto » selon l'ONU. Le gouvernement et le TPLF s'accusent mutuellement d'entraver l'acheminement de l'aide et d'affamer la population.


Yvette Reine Nzaba

Légendes et crédits photo : 

Jeffrey Feltman, ici à Khartoum en septembre dernier, s'est rendu à Addis-Abeba pour évoquer le conflit du Tigré (ASHRAF SHAZLY / AFP)