Couleurs de chez nous : la quarantaine !C’est parmi les mots qui dominent l’actualité internationale avec le coronavirus, le Covid-19 et le confinement. Mais si les autres sont nouveaux et difficilement à cerner, le mot « quarantaine » a bien sa place dans le vocabulaire des Congolais. Malgré cette présence dans le lexique de chez nous, le mot revient en force avec une dose d’humour. Versant la tragi-comédie, les Congolais profitent du contexte pour donner libre cours à leurs vices. C’est ainsi que certains d’entre eux qui reviennent de l’étranger alertent leurs épouses pour leur annoncer leur mise en quarantaine. En réalité, l’homme est bien portant et s’est réfugié chez sa maîtresse pour jouir allègrement de cette liberté gratuite qu’offre la pandémie. La quarantaine devient un prétexte pour ne plus se montrer aux amis et connaissances et, plus grave, pour fuir le service. Il ne s’agit pas ici d’un récit inventé mais des faits vérifiés tels qu’ils se passent dans notre société. À côté, il y en a qui méritent d’être mis en quarantaine mais qui usent de tous leurs pouvoirs pour se soustraire des contrôles officiels et se pavaner dans les rues. Bien plus grave est le non-respect des consignes données pour contrer la pandémie et freiner son importation au Congo. « C’est de la pure manipulation ! il s’agit d’un virus qui attaque les blancs et non les Noirs », répètent les Congolais refusant, au passage de se soumettre aux mesures. Hostiles à l’actualité et accrochées aux séries, les femmes sont les championnes dans l’art du refus systématique. Leur ire est montée de plusieurs crans quand le gouvernement a annoncé la fermeture des églises. « On savait que ces gouvernants étaient contre nos églises. On voyait le complot venir. Etc. » Une phrase parmi celles les plus criées dans la rue congolaise en cette journée du 19 mars. En d’autres termes : malgré le nombre de décès en chine, en Italie ou en France, peu sont les Congolais qui croient en l’existence de ce virus, le covid-19. Sur les réseaux sociaux, les posts publiés, les audio partagés et les vidéos donnent la mesure de la légèreté avec laquelle les Congolais (toutes les deux rives réunies) prennent les choses. Un célèbre comédien a même publié une vidéo « virale » qui régale les passionnés des réseaux sociaux et faussant même la prise de conscience espérée par les gouvernants. Bien que ses effets cathartiques soient reconnus, l’humour chez les Congolais épouse souvent la naïveté ou l’incrédulité. On se rappellera les commentaires suscités pour la coulée de la ferraille sur l’obélisque du rond-point de Moungali ou même l’hystérie qui gagna des élèves de chez nous pendant quelques jours chaque fois qu’une autorité était annoncée. Ainsi agit le peuple du Congo ! Comme bien de peuples, il a ses faiblesses et ses forces. Tout est dans l’éducation. Puisse cette chronique rappeler à ce peuple que le coronavirus n’est pas ce moustique qui chante à nos oreilles et que nous chassons par la main !
Van Francis Ntaloubi |