Les Dépêches de Brazzaville



Covid-19 / Afrique : un continent préservé par la pandémie mais impacté


Depuis le premier cas de coronavirus en Afrique, les experts ont prédit un scénario effrayant, un cataclysme dans une "Afrique pauvre au système sanitaire défaillant". Plus de deux mois après, le tsumani annoncé n'a toujours pas eu lieu. Entre-temps, l'Europe et les Etats-Unis sont sévèrement frappés par la pandémie. Avec 315 023 décès enregistrés dans le monde, l'Afrique, qui compte 1,2 milliard d'habitants,  compte moins de trois mille dècès. Alors que la France et ses 66 millions d'habitants a dépassé la barre de vingt-huit mille morts de la Covid-19. 

Mais force est de reconnaître un faible nombre de tests, des statistiques imparfaites et d'un manque de données - ce qui fausse en partie le bilan, le nombre de cas étant sans doute sous-estimé. D'autres facteurs y ont contribué : des mesures de prévention très en amont, telles que l'imposition d'un confinement et des couvre-feux; la faible densité du continent, 43 habitants par km2 contre 181 en Europe de l'Ouest ou 154 en Asie du Sud-Est. Ce qui protège de la propagation du coronavirus. A cela s'ajoute un confinement anticipé des populations concentrées dans les capitales. Le virus circule très peu aussi dans des régions vivant en autarcie. 

Le continent africain est également moins touristique; sa diaspora est aussi la moins importante, contrairement à la Chine et à l'Inde qui ont été obligés de faire  face au retour de leurs étudiants revenant de l'étanger, contrairement à l'Afrique subsaharienne. Environ 60% de la population africaine est âgée de moins de 24 ans. Or, la Covid-19 frappe plus sévèrement les plus de 75 ans - 75% de personnes décédées en France avaient plus de 75 ans. L'Afrique présente aussi une très faible taux d'obésité, un facteur de risque majeur de mortalité à la Covid-19.

Une étude du National Health Service (NHS) et de King's a College montre une corrélation négative entre les pays affectés par la malaria et ceux touchés par la Covid-19, qu'elle explique par un possible effet  protecteur des traitements prophylactiques pour la malaria, comme la chloroquine contre le coronavirus. Or, 93% des cas de malaria sont enregistrés en Afrique, selon l'OMS. D'après une  autre étude, c'est la vaccination systématique du BCG déployée en Afrique qui pourrait expliquer l'immunisation de la population.  Les pays sans politique de vaccination universelle du BCG  comme l'Italie et les Etats-Unis sont à l'inverse les plus touchés par la Covid-19, note les auteurs. Des corrélations qui n'apportent  toutefois aucune preuve de cause à effet.

La Grande inconnue : l'impact de la Covid-19

Ces atouts ne doivent pas occulter que l'Afrique risque de faire les frais de coronavirus.  La fermeture des frontières, des mesures de confinement et la hausse des prix de denrées alimentaires créent des incertitudes sur la stabilité du continent. C'est le cas de l'invasion de criquets en Afrique de l'Est, ainsi que l'arrêt des campagnes de vaccinations contre la polio, la rougeole ou la diphtérie. L'ancien ministre français de la Santé, ancien secrétaire général adjoint de l'ONU et Professeur en médécine, prédit la famine en Afrique. ''Le coronavirus va entraîner non pas une grande épidémie  en Afrique, mais une catastrophe absolue sur la nutrition. Soit une sous-alimentation, soit une malnutrition chronique'', a déclaré Philippe Douste-Blazy.

 "Si nous n'agissons pas maintenant, la crise coûtera encore plus en vies [...] Des ressources supplémentaires sont réquises d'urgence afin de permettre aux opérations humanitaires de prendre de l'ampleur et d'inverser la crise. En 2020, la communauté humanitaire a besoin de 2,8 milliards de dollars pour apporter une assistance à 17 millions de personnes au Sahel. En mai, seuls 18% de fonds ont été reçus", a déclaré la cheffe du bureau régional d'Ocha, pour l'Afrique de l'Ouest et du centre, Julie Belanger. 

 

 

 

 

 

 


Noël Ndong