Les Dépêches de Brazzaville



Covid-19 : seuls cinq pays devraient atteindre l'objectif de vaccination d’ici à la fin de l'année


Moins de 10% des cinquante-quatre nations africaines atteindront l’objectif de fin d’année consistant à vacciner complètement 40% de leur population contre la covid-19. Les Seychelles, Maurice et le Maroc ont déjà atteint  l'objectif, la Tunisie et le Cap-Vert devraient suivre dans les deux prochains mois. Mais dans l'ensemble, seulement 77 millions de personnes, soit moins de 6 % de la population africaine, sont entièrement vaccinées.

Il s’agit d’un nouvel échec. Car la majorité des pays africains n'aura pas réussi à atteindre l’objectif fixé. L'Assemblée mondiale de la santé avait appelé à vacciner 10 % de la population dans chaque pays à la fin septembre, mais environ 70 % des pays africains n’ont pas atteint cet objectif. « Si les 6,8 milliards de doses de vaccin administrées dans le monde jusqu'à présent avaient été réparties équitablement, nous aurions atteint notre objectif de 40 % dans tous les pays à ce jour », a déclaré le  directeur général de l'OMS, Tedros Adhanom Ghebreyesus.

L’accès limité à des produits essentiels tels que les seringues pourrait encore ralentir le déploiement des vaccins en Afrique. Le Fonds des Nations unies pour l'enfance a relevé une pénurie imminente de 2,2 milliards de seringues jetables pour la vaccination anti covid-19 et la vaccination de routine en 2022. Cela inclut les seringues jetables de 0,3ml pour la vaccination covid-19 de Pfizer-BioNTech.

Certains pays africains, comme le Kenya, le Rwanda et l’Afrique du Sud, ont déjà enregistré des retards dans la réception des seringues.  « Des mesures drastiques doivent être prises pour stimuler la production de seringues, et ce rapidement. D’innombrables vies africaines en dépendent », a insisté le Dr Matshidiso Moeti, la directrice régionale de l'OMS pour l'Afrique. L’autre défi pour les pays africains consiste à mieux se préparer au déploiement du vaccin.

Selon l’OMS, plus de 40% des pays de la région africaine n’ont pas encore achevé les plans de leurs campagnes au niveau des districts. Or pour l’OMS, la planification doit devenir beaucoup plus granulaire sur le continent. Plus de 244,3 millions de cas confirmés de covid-19 ont été répertoriés dans le monde, dont près de cinq millions de morts. En Afrique, l’OMS recense près de 8,5 millions de cas et plus de 217 000 décès. Dix pays africains sont toujours en résurgence, dont quatre avec une tendance à la hausse ou un plateau élevé : le Gabon, le Congo, le Cameroun et l’Égypte. De plus, la variante Delta (indienne) a été trouvée dans quarante et un pays, alors que la variante Alpha (britannique) est signalée dans quarante-sept nations et la Beta (sud-africaine) dans quarante-trois. À l'échelle mondiale, quatre-vingt-deux pays risquent de manquer l'objectif de 40 % uniquement en raison d'un manque d'approvisionnement. Quelque 550 millions de doses de vaccin supplémentaires sont nécessaires pour atteindre l'objectif. 

Les fabricants devraient donc fournir trois milliards de doses supplémentaires d'ici à la fin de l'année. Dans un nouveau rapport, Amnesty International conclut que Pfizer, qui a récemment déclaré s’attendre à engranger trente et un milliards d’euros grâce à ses ventes de vaccins pour 2021 seulement, déforme la réalité afin de redorer l’image de l’entreprise. « Pfizer assure accorder la priorité à une distribution équitable de ses vaccins et prétend s’engager à partager son savoir-faire et ses connaissances scientifiques - mais la vérité est toute autre », écrit Amnesty International, qui l’accuse de ne pas respecter son « engagement en matière d’équite vaccinale, alors qu’il continue d’expédier la majeure partie de ses doses susceptibles de sauver des vies contre le virus de la covid-19 dans les pays riches ».

Pfizer clame que d’ici à la fin de cette année, la multinationale aura fourni au moins un milliard de doses aux " nations à revenu faible et intermédiaire".  Au cours des cinquante derniers jours, seuls 100 000 des 52 millions de doses fournies sont arrivées dans des pays à faible revenu.  « Il ne reste plus que cinquante jours avant la fin de l’année, et il n’est pas trop tard pour que ces géants pharmaceutiques changent de cap, fassent ce qui est juste et s’acquittent de leurs responsabilités en termes de droits humains. Aussi doivent-ils intensifier la distribution équitable et veiller à ce que la moitié des doses qu’ils vont produire d’ici la fin de l’année 2021 soient allouées à ces pays », a déclaré Patrick Wilcken, responsable du programme Entreprises, sécurité et droits humains d’Amnesty International.


Noël Ndong