Les Dépêches de Brazzaville



Covid-19. six infections sur sept ne sont pas détectées en Afrique


En réalité, le nombre cumulé de cas d’infection serait estimé à 59 millions soit un chiffre sept fois plus élevé que les huit millions de cas officiellement notifiés. La raison de cet écart ? La faiblesse des moyens de détection et la grande majorité de cas asymptomatiques qui fait que beaucoup de gens contractent le virus sans le savoir et le transmettent.

Selon les estimations, entre 65 % et 85 % des infections par le coronavirus en Afrique ne génèrent que peu ou pas de symptômes. Par conséquent, la plupart des personnes infectées par la maladie ne cherchent pas à se faire soigner dans les établissements de santé locaux où la plupart des tests de dépistage sont désormais pratiqués. Pourtant, les sujets asymptomatiques jouent un rôle majeur dans la propagation de la pandémie car ils facilitent la transmission du virus aux personnes vulnérables qui peuvent soit être touchées par une forme grave de la maladie, soit en décéder.

Jusqu’à présent, la détection sur le continent a porté essentiellement sur les personnes qui se présentent dans les établissements de santé avec des symptômes, en plus des tests de dépistage réalisés sur les voyageurs internationaux qui arrivent aux points d’entrée ou qui en partent. Or, depuis le début de la pandémie, les pays africains n’ont enregistré qu’environ 70 millions de tests de dépistage, ce qui représente une infime portion des 1,3 milliard d’habitants du continent (les États-Unis, dont la population équivaut à environ un tiers de la population africaine, ont effectué plus de 550 millions de tests de dépistage).

« Avec un nombre limité de tests, nous continuons d’ignorer la situation réelle qui prévaut dans beaucoup trop de communautés en Afrique, vient d’alerter Matshidiso Moeti, directrice régionale de l’OMS pour l’Afrique. En effet, la majorité des tests de dépistage sont effectués sur des personnes qui présentent des symptômes de la Covid-19, mais les sujets asymptomatiques sont à l’origine d’une grande partie de la transmission de la maladie. Ce que nous voyons pourrait donc n’être que la pointe de l’iceberg… Le moment est venu de passer à l’offensive contre la Covid-19 et de travailler avec les communautés locales pour briser les chaînes de transmission et mettre fin aux flambées épidémiques de plus grande ampleur. »

Pour inverser cette tendance et freiner la transmission du virus, une nouvelle initiative visant à améliorer le dépistage communautaire va donc être menée au Burundi, au Congo, en Côte d’Ivoire, Guinée-Bissau, Mozambique, République démocratique du Congo, Sénégal et Zambie.  

Ce programme financé à hauteur de 1,8 million de dollars fournira des tests de diagnostic rapide à plus de sept millions de personnes au cours de l’année à venir. A chaque fois qu’un cas de Covid sera identifié, une recherche des personnes ayant pu être contaminées par le malade sera lancée dans un rayon de 100 mètres en proposant, sur la base du volontariat, affirme l'OMS, un test de diagnostic rapide antigénique. En outre, chaque ménage situé dans ce périmètre recevra des kits d’hygiène comprenant des masques de protection et des flacons de solution hydroalcoolique.

Toute personne testée positive sera dès lors évaluée sur la gravité de son état afin de déterminer si elle doit recevoir des soins à domicile ou être transférée dans des centres de traitement désignés.

Ce programme vise à interrompre la transmission de la maladie par la recherche active de cas. C’est ce que l’OMS appelle une « stratégie d’intervention en anneau » qui a été déployée pour la première fois lors de l’éradication de la variole au siècle dernier afin de vacciner les personnes les plus susceptibles d’être infectées et qui a été reconduite lors des récentes flambées épidémiques de maladie à virus Ebola.

Au final, il s’agit d’accroître de 40 % la capacité de dépistage dans chaque pays participant, en veillant à ce qu’elle atteigne le niveau de référence recommandé par l’OMS, à savoir 10 tests effectués chaque semaine pour 10 000 personnes.

Actuellement, environ 20 pays – soit plus d’un tiers des pays africains – n’atteignent pas ce niveau de référence.


Julia Ndeko