Les Dépêches de Brazzaville



Dysfonctionnement de la justice : le Conseil supérieur de la justice interpellé


L'aspiration de l’autorité suprême à une meilleure distribution de la justice procède d’un constat malheureux lié au dysfonctionnement de l’appareil judiciaire du pays qui n’émet pas, à l’heure actuelle, des signaux encourageants en termes de rendement et d’efficacité.

Dans sa traditionnelle communication au Conseil, le président Félix Tshisekedi a notamment mis une emphase particulière sur l’impératif de rationnaliser l’action de la justice dans le renforcement de la gouvernance publique et de l’Etat de droit. Ceci d’autant plus que loin de se relever de ses faiblesses pour l’instant, la justice congolaise va très mal jusqu’à s’inviter sur le banc des accusés, à la grande incompréhension et désolation du peuple. Enfonçant le clou, le garant de la nation a dénoncé la manière cavalière dont le droit est dit sur l’ensemble du territoire national sur fond « des actes ou comportements de certains acteurs judiciaires ainsi qu’à des actions ou décisions judiciaires, à la limite du hasard (…) ».

Sans langue de bois, le chef de l’Etat a qualifié cet état de choses de « théâtralisation » de la justice, creusant davantage la méfiance devenue légendaire entre le peuple et ceux qui sont censés dire le droit. De la justice pénale à la justice civile ou administrative, il va sans dire, au regard des dysfonctionnements relevés, que la voie qui mène à la justice est assimilée, à tort ou à raison, à un vrai chemin de la croix.   

Voilà pourquoi le président de la République, usant de ses prérogatives de garant du bon fonctionnement des institutions, a interpellé le Conseil supérieur de la magistrature (CSM) tout en l’invitant à se mobiliser pour relever efficacement le défi de la régulation administrative et disciplinaire de la magistrature. Il entend, pour ce faire, y veiller scrupuleusement dans le cadre de ses prérogatives constitutionnelles. Car, ainsi que l’a relevé le compte rendu ayant sanctionné ce Conseil des ministres, face à une telle situation, c’est lui qui sera comptable ou coupable de cette inaction ou de l’action désarticulée de la justice face à une population en danger et désespérée.

Sur ces entrefaites, la ministre d’État, ministre de la Justice et Garde des Sceaux a été chargée de travailler avec le CSM en activant la passerelle légale du cadre de concertation prévue à l’article 17 du règlement intérieur du CSM afin de proposer une série des pistes de solution rapide. Une recommandation qui n’enfreint nullement l’indépendance constitutionnelle du pouvoir judiciaire considérée, à juste titre, comme une garantie reconnue pour les justiciables d’avoir une justice impartiale.

Dans la foulée, l’Inspection générale des services judiciaires et pénitentiaires a également été enjointe à jouer son rôle de manière efficace en tant qu’instrument d’accompagnement du ministère de la Justice. Une évaluation ainsi qu’une possible revisitation des mécanismes légaux ou même institutionnels sont, entre temps, requises afin de redynamiser le secteur judiciaire visiblement en quête d’une nouvelle âme.  


Alain Diasso