Les Dépêches de Brazzaville



France- Afrique : accompagner les nouvelles dynamiques


L’avenir économique de l’Afrique suscite bien des débats. Son potentiel est immense, ses défis multiples. Le continent, que les médias occidentaux cantonnent encore trop souvent à des crises géopolitiques ou à des seules questions énergétiques, présente pourtant plus que jamais des opportunités à qui saura bâtir des partenariats conçus pour apporter un développement assis sur des bases solides, respectueuses des écosystèmes locaux et de l’environnement. « Pas d’échanges possibles sans écoute et pas de contrat possible sans intérêts réciproques » auront été les messages forts véhiculés tout au long de cette journée tant par les entreprises que par les représentants des gouvernements qui ont systématiquement rappelé la nécessité de mettre les communautés et les populations au sens large au cœur de la postérité.

Des relations économiques en progression

A l’ouverture des débats, le ministre français en charge du Commerce extérieur, Franck Riester, intervenant en visio depuis Osaka au Japon s’est félicité de la dynamique de la coopération : « La présence économique française en Afrique est solide », a-t-il assuré, appuyé un peu plus tard par l’ancien patron du Medef (le patronat français), Geoffroy Roux de Bézieux, qui s’est montré confiant. « Oui il existe des tensions politiques avec certains pays et pourtant les relations économiques continuent à prospérer ». Et de passer le message : « Les obstacles ne sont pas insurmontables. Il faut être infatigable ! »

Bien entendu, dans les arguments majeurs énoncés tout au long de cette journée en faveur de cette relation, la langue française est un atout de taille « qui fait gagner du temps et simplifie les échanges ». Mais pas seulement. Il aura beaucoup été question de jeunesse, d’adaptabilité, de résilience.

Le ministre Jean-Jacques Bouya dans son propos n’a pas manqué pour sa part de souligner les atouts du Congo et plus largement du continent rappelant qu’à « l’Afrique noire, le président de la République du Congo oppose l’Afrique verte ». Un film court et magnifique sur le Congo, véritable carte postale mouvante, a d’ailleurs été projeté en appui de son intervention tandis que le ministre a présenté le pays, « jardin d’accueil et terre de tourisme en devenir » tout en étant très convainquant sur ses atouts naturels, sa biodiversité et ses aires protégées, sa faune sauvage ou encore son capital humain. « Un milieu agréable pour s'aérer le corps et l'esprit », a-t-il confié.

Croissance et mutations

Des atouts, le continent n’en manque pas. Mais l’Afrique est diverse. La croissance (4% cette année) varie considérablement d’une région, d’un pays à un autre, tout en observant que les zones économiques intégrées ont connu des niveaux de croissance plus élevés. Alors oui, et c’est un atout pour beaucoup, la Zlecaf est en marche, l’intégration régionale progresse même si, a tenu à tempérer Anthony Nkinzo Kamole, directeur de l’Agence nationale pour la promotion des investissements en RDC, l’ouverture de corridors portés par des infrastructures comme le pont route-rail sur le fleuve Congo reliant Brazzaville à Kinshasa « doit respecter le principe d’un échange gagnant/gagnant ».

La mutation en cours vient probablement de la nature de la croissance même qui doit être portée par davantage de transformation sur place et par un renforcement du secteur tertiaire. Les avis des intervenants ont tous convergé sur ce point. Le principe de transformation des produits du sous-sol ou du sol sur place est maintenant acté par les Etats africains et par leurs partenaires.

Produits agricoles et ligneux, ressources naturelles du sous-sol, sont pensés dans un principe de création de chaîne de valeur pour que les retombées profitent aux populations africaines et que se résolve l’insuffisance alimentaire à travers le développement de filières. Avec la nécessité de raisonner urbain, décarbonation, interconnections...

Le représentant de la SNPC, Jean Alexis Moussounda, en a clairement illustré ces grands principes en présentant la stratégie de l’entreprise qui joue la carte de la productivité, du capital humain avec un accent particulier mis sur la formation, le principe de contribution à la nation, le cadre légal, la prospection... La production de gaz naturel liquéfié est désormais également au cœur de la stratégie de la SNPC.

Miser sur les investissements durables

A l’adresse des investisseurs français et des représentants des gouvernements - les ministres Jean-Jacques Bouya et Ingrid Ebouka-Babackas pour la République du Congo -, la secrétaire d’Etat française en charge du développement et des partenariats internationaux, Chryzoula Zacharopoulou, l’a réaffirmé avec conviction : « La relation avec le continent a changé et porte sur des relations partenariales dans un principe de respect mutuel ». Un principe qui passe par des investissements durables et pas seulement financiers. « En Afrique on innove avec très peu, » a-t-elle observé.

Mais on a aussi entendu avec insistance des opérateurs économiques la nécessité d’un dialogue entre l’Etat et les entreprises privées, l’importance des partenariats public-privé et du principe du guichet unique, à la fois pour comprendre les spécificités des pays mais aussi en connaître les contraintes normatives, règlementaires ou de financement, tout autant que pour simplifier les démarches administratives.

Former et donner accès aux financements

Il reste maintenant à penser en termes de capital humain. Notamment accompagner la jeunesse dans toute sa diversité, former les techniciens, les ingénieurs, les managers de demain en s’appuyant sur l’intelligence artificielle et les nouvelles technologies.

Les gouvernements l’ont intégré et les campus universitaires se déploient désormais à travers le continent tandis que les régions accèdent progressivement aux nouvelles technologies. Une réalité illustrée dans son intervention par le directeur de la Banque postale, Calixte Tabangoli : « la digitalisation est une question de survie pour les banques, qui permet d’apporter un service aux agglomérations les plus reculées. A condition que les infrastructures et l’électricité suivent. Pour y parvenir, la Banque postale travaille avec des partenaires. Si on veut désenclaver les régions, sans l’outil Internet ce sera extrêmement difficile. »

Une préoccupation tout aussi cruciale que le déficit de financement. Le message pendant cette journée aura été unanime quant à la nécessité de faciliter l’accès à un financement responsable, de créer les banques de développement qui accompagnent les projets privés, ce qui n’est possible que dans un climat des affaires sain et réglementé… Au Congo, le Fonds d’impulsion, de garantie et d’accompagnement s’emploie à répondre à ces problématiques en essayant de faciliter l’accès des jeunes aux financements.


Bénédicte de Capèle et Marie-Alfred Ngoma

Légendes et crédits photo : 

Jean-Jacques Bouya, l’Aménagement du territoire, des infrastructures et de l’entretien routier, à la tribune du Forum "Investir en Afrique" (Thomas Padilla/Forum CIAN L'Opinion) Guili Tsoumou Gavouka, conseillère en communication et relations publiques, Louis Andzouono, chef de département Database et Bi Dia Ayo Ibata, cheffe de division associations et relations tutelle (DR)