Les Dépêches de Brazzaville



France : Hollande choisit Valls


François Hollande n’est pas resté insensible devant la pression qui accapare son pouvoir tiraillé. Il a décidé de redistribuer les cartes, avec une ampleur que l’on mesura à sa juste valeur. Et c’est Manuel Valls, le populaire ministre de l’Intérieur, comme le fut naguère Nicolas Sarkozy sous Jacques Chirac, qui est choisi comme pièce de rechange contre le plutôt rangé Jean-Marc Ayrault.

En 2012, c’est sur le thème « Le changement, c’est maintenant » qu’il avait battu son prédécesseur. Après deux ans de présidence, François Hollande n’est pas parvenu à réaliser ce changement qu’il voulait immédiat, se montrant incapable, par conséquent, d’éclipser le pessimisme ambiant chez ses compatriotes, lesquels doutent depuis bien des années de la capacité des gouvernements successifs à leur redonner espoir. C’est ici qu’il convient, à juste titre, de considérer l’ensemble des résultats de ces scrutins, en mentionnant un fait notable : les Français sont perplexes et ne savent plus à qui confier réellement leur destin. Non seulement ils s’abstiennent en masse de voter, mais lorsqu’ils décident de le faire, ils ne sont plus en mesure d’assumer leur choix sur le long terme.

Cela pour dire que la droite, sortie victorieuse, est, certes, sur un nuage, mais elle devrait tempérer ses célébrations. Elle a reconquis de nombreuses villes, c’est indéniable, mais elle sait qu’elle les avait pour certaines perdues il y a seulement six ans, en 2008 ; elle sait aussi qu’elle a poursuivi sa descente aux enfers quatre ans plus tard lorsque les électeurs accordaient leurs voix, non pas au candidat de l’Union pour un mouvement populaire (UMP), Nicolas Sarkozy, mais à son rival du Parti socialiste (PS), François Hollande.

Sans être un spécialiste de la politique française, on peut tout de même dire qu’au mieux les électeurs français balanceront toujours entre la gauche et la droite, cherchant chaque fois qui des représentants des deux courants sera capable de réaliser ses promesses de campagne ; au pire, l’expression devient d’ailleurs relative, ils accorderont de plus en plus d’attention au discours frontiste qui renvoie dos à dos les deux premiers protagonistes. C’est toujours avec une pointe de provocation que la dirigeante du Front national, Marine Le Pen, parle de ce bipolarisme gauche-droite en France en noyant l’UMP et le PS dans l’UMPS.

À moins, peut-être, de regarder vers le centre, incarné par le presque ressuscité François Bayrou, président du MoDem. Appelé à commenter son élection à la mairie de Pau, dans les Pyrénées-Atlantiques, avec un score honorable de 62,95%, ce trois fois candidat malheureux à l’élection présidentielle française (2002, 2007, 2012), qui avait créé la surprise en 2012 en soutenant François Hollande, a eu ce commentaire dosé sur France Inter : « J’ai voulu montrer qu’on pouvait faire vivre, travailler ensemble, s’apprécier et proposer ensemble des sensibilités différentes, des sensibilités républicaines. »

François Bayrou, en voilà un, parmi la classe politique française qui pense, non sans raison, que les besoins quotidiens des populations de son pays dépassent largement la vision étriquée de ceux qui sont scotchés à vie à la gauche, à la droite ou aux extrémités de ces deux camps. Or lorsqu’on écoute parler certains ténors de la droite et de la gauche française, tout laisse croire que la paille se trouve toujours dans l’œil du voisin.

Si et seulement si ils pouvaient entendre les gémissements de leurs électeurs, ils se montreraient assez humbles pour ne pas se moquer des échecs de leurs adversaires ni même sabler le champagne chaque fois que les suffrages sont en leur faveur. Ils ne devaient pas s’étonner du va-et-vient hallucinant de ces mêmes électeurs qu’ils manipulent à longueur de journée avec le sentiment d’être des femmes ou des hommes providentiels.


Gankama N'Siah