Les Dépêches de Brazzaville



Les immortelles chansons d’Afrique : « Marie Jeanne » de Nona Arthur


C’est dans le but de faire profiter des droits d’auteur à Nona que cette aubade fut titrée « Marie Jeanne ». Sur certains disques, la chanson est intitulée « Sammy na Cathy 2 ». Pour la petite histoire, Marie Jeanne, de nationalité gabonaise, fut la copine de Nona Arthur. Ils se sont rencontrés pendant une tournée alors que l’artiste faisait partie de l’orchestre « Jazz Brass ».

Sur la face B du disque 45 tours, la chanson est introduite par une sorte de Jam session d’une durée de 48 secondes où les guitares mi-solo et rytmique, exécutées respectivement par Mermans et Mascott se livrent dans un derby incroyablement fantastique.  La guitare basse de Ntaloulou, les percussions de Saturnin Pandi et la batterie de Ricky Siméon tissent un canevas rythmique aux accents hip-hop. Après vient un break de 4 secondes qui laisse intervenir les cliquetis de la bouteille produits par Nona avant que ce dernier ne fasse son discours dans un français des vieillards du temps colonial : « Ouais, oh vrai de Dieu ! Je vais vous dire un petit histoire, depuis que ma mère m’a né, je n’ai jamais vu des telles choses. J’aime un fille qui s’appelle Marie Jeanne. Depuis Libreville, je la cherche. Quand je la vois pas mon cœur fait ngou ngou ngou ». L’expression oh vrai de Dieu veut dire oh Seigneur ou encore oh mon Dieu.

Il faut dire que le discours qu’effectue Nona est appelé « spoken word ». Paru en 1933, il est l’ancêtre du Rap, lequel vient du l’argot anglais « to rap » qui signifie bavarder, blâmer ou baratiner. Le spoken word tire ses racines en Afrique, notamment avec les griots. Notons que Nona est compté parmi les précurseurs du rap en Afrique. Pour s’en convaincre, il faut bien écouter la partie chant de ce titre où l’artiste utilise déjà le beatboxing, « i a i é samu sama, oye ye ye ye Marie Jeanne, Ma Marie é samu sama». L’expression « samu samu » découle du folklore Téké. Au Cameroun où les Bantous ont accompagné les Diables rouges, pour la huitième Coupe d’Afrique des nations, le morceau est énormément apprécié par le public de même que les artistes Manu Dibango et Francis Bebey, nous raconte son auteur. Quelque temps après, ce sont les présidents Omar Bongo, Bokassa, Mobutu qui ont été enthousiasmés par ce tube. Même la Coupe que le Congo remporta le 5 mars 1972 fut baptisée « Marie Jeanne », Radio Congo adopta ce titre comme générique de l’émission sportive.

Sur le disque 33 tours, référencé SAF 50 022, produit en 1976 par Sonafric, la chanson est attribuée à Samba Mascott et Nona Arthur. Ce dernier est né le 25 avril 1945 à Brazzaville. Sa carrière débute en 1962 dans Jazz Brass. En 1963 (Cercul Jazz), 1966 (les Bantous). Après des temps d’errance dans les orchestres Le peuple, Hydro music… Il regagna Les Bantous jusqu’à ce jour.  

          

 

 

 


Frédéric Mafina

Légendes et crédits photo : 

Le Vinyle de l'album