Les Dépêches de Brazzaville



Les souvenirs de la musique congolaise : implosion de l’orchestre Bantous de la capitale (1)


Les Bantous de la capitale sont nés en août 1959 à la faveur du retour au bercail de Célio, Edo, Essous, de La Lune et Pandi évoluant à Léopoldville. Cet orchestre vient grossir les rangs à Brazzaville où l’on trouve, entre autres, Negro Band, Cercul Jazz… Au fil des ans, les Bantous de la capitale s'imposent rapidement comme un grand orchestre dont les œuvres le propulsent au firmament de la musique congolaise. Des titres tels que "Masuwa", "Samy na Katy", "Makiri", "Farce", "Miléna" et bien d’autres emballent les mélomanes du Pool Malebo. La tournée en Afrique de l’Ouest en 1961 (Togo, Dahomey, Ghana), la participation au Festival mondial des arts nègres à Dakar au Sénégal en 1965 et au Festival panafricain d’Alger en 1969 sont les différentes étapes de son épopée.

Il sied de noter qu’au début de l’année 1971, Essous Jean Serge rentre à Brazzaville et réintègre les Bantous après avoir séjourné aux Antilles, il en est de même pour José Missamou, virtuose de la salsa, découvert par Pandi lors d’un concert des Rebelles Massano à la place rouge du rond-point Poto Poto, comme on l’appelait au temps du monopartisme. Le tandem Essous-José Missamou apporte une autre couleur dans le répertoire des Bantous.

En 1972, au faîte de sa gloire, l’orchestre est le seul maître à bord du bateau battant pavillon musique congolaise du côté de la rive droite du fleuve Congo, au regard de ses œuvres et prestations dans les différents bars dancing de Brazzaville qui attirent les ambianceurs. La fastidieuse épopée des Bantous connaîtra sa fin le 6 novembre 1972. En effet, ce jour a lieu à la cabane Bantous, siège de l’orchestre, une réunion patronnée par Nino Malapet, le chef. La tension est vive au regard des points inscrits à l’ordre du jour, entre autres, la maison « Presse musique » destinée à la vente des disques produits par l’orchestre qui fut érigée dans le domicile de Nino Malapet et transformée en librairie; les fonds générés par la production des œuvres promotionnelles de certaines entreprises d’Etat telles que Ofnacom, Lina Congo, ATC et autres par les Bantous, fonds dont l’opacité de la gestion fut entretenue par Nino Malapet, selon certaines bouches.

A l’issue des débats houleux, le chef Nino décide de suspendre pour indiscipline et ceci pour une durée indéterminée Kosmos, Pamelo, Célio, Edo, Mpassi Mermans et Theo Bitsikou (attaque chant de l’orchestre). Frustrés et indignés, ces derniers vont claquer la porte de la maison Bantous de la capitale et créent à leur tour les orchestres les Nzois d’Edo Ganga, Mpassi Mermans et Théo Bitsikou (attaque chant de l’orchestre) et Mpassi Mermans (guitariste) qui seront rejoints plus tard par Ange Linaud (un ancien de l’orchestre Super Boboto). Pamelo Mounka, Kosmos et Célestin Kouka conclurent une entente à trois et créent l’orchestre Le peuple du trio Cépakos. Par contre, une frange des musiciens, notamment les instrumentistes, resta solidaire à Nino et Essous. Ainsi, l’orchestre Bantous de la capitale se disloqua après une glorieuse décennie de stabilité, laissant les fans et sympathisants dans la tristesse et la consternation. ( A suivre)


Auguste Ken-Nkenkela