Les Dépêches de Brazzaville



Libye : l’exportation de pétrole par les autorités parallèles serait illégale


Fustigeant la décision de l’homme fort de l’est libyen de remettre les principaux terminaux pétroliers du pays aux autorités parallèles, Mustafa Sanallah, le patron de la compagnie nationale libyenne du gouvernement d’union nationale (GNA), reconnue par la communauté internationale, a déclaré : « Les exportations par des institutions parallèles sont illégales et échoueront comme elles ont échoué par le passé ». Dans un communiqué, il a ajouté : « Les résolutions du Conseil de sécurité de l’ONU sont très claires : les installations pétrolières, la production et les exportations doivent demeurer sous le contrôle exclusif de la NOC (de Tripoli) et sous la seule supervision du gouvernement d’union nationale ».

Le patron de la société nationale a, par ailleurs, mis la communauté internationale et les acteurs du marché pétrolier devant leurs responsabilités. La « NOC met en garde les entreprises contre la conclusion de contrats d’achat de pétrole auprès d’institutions parallèles. Ils ne seront pas honorés et la NOC intentera une action en justice contre eux », a-t-il insisté. « Nous sommes confiants que le GNA et nos partenaires internationaux prendront les mesures nécessaires pour bloquer toutes les exportations en violation du droit international », a poursuivi Mustafa  Sanallah.

Le maréchal Khalifa Haftar a annoncé, le 25 juin, que les installations pétrolières sous contrôle de ses forces en Libye seraient désormais gérées par les autorités parallèles, basées dans l’est du pays et hostiles au GNA. « Toutes les installations pétrolières sécurisées par l’ANL (Armées nationales libyennes) sont remises à la Compagnie nationale de pétrole issue du gouvernement provisoire (de l’est) et présidée par Faraj al-Hassi », a déclaré le général Ahmed al-Mesmari qui lisait une décision du maréchal Haftar.

Le porte-parole de l’ANL a souligné qu’ « aucun pétrolier ne sera autorisé à accoster dans les ports de l’est sans la permission de la NOC » basée à Benghazi, mais il n’a pas précisé si les autorités de l’est avaient trouvé des acheteurs potentiels.

Le maréchal Khalifa Haftar a pris cette décision de confier la gestion du pétrole à sa « société nationale » parce que ses forces contrôlaient déjà les quatre terminaux pétroliers du Croissant pétrolier (nord-est), en plus du port de Hariga à Tobrouk, près de la frontière égyptienne, par lesquels l’essentiel du pétrole libyen est acheminé vers l’étranger.

Réagissant à la décision des autorités de l’est, Jalel Harchaoui, spécialiste de la Libye, a dit que « les ventes seront très difficiles » pour la société pétrolière de Khalifa Haftar. « Tout était possible » si des pays qui le soutiennent comme les Emirats arabes unis se tiennent à ses côtés, a-t-il ajouté, notant que la décision de Khalifa Haftar « est une surprise ». « Il y a quelques jours seulement, Haftar tentait de parler comme une figure nationale, soucieuse de respecter son engagement auprès de l’Elysée (à Paris fin mai) en vue d’organiser des élections paisibles d’ici au 10 décembre 2018 », a-t-il fait remarquer.

Le spécialiste de la Libye a, par ailleurs, rappelé qu’en avril 2016, la Cyrénaïque (région est) avait tenté en vain de court-circuiter Tripoli et vendre trois cent mille barils indépendamment. Le représentant libyen à l’ONU et le Conseil de sécurité avaient fait stopper le cargo. En 2016, le maréchal Khalifa Haftar avait remis la gestion de installations pétrolières qu’il contrôlait à la NOC basée à Tripoli, après des efforts pour l’unification des deux compagnies. Et jusqu’ici, ces sites étaient gérés par la NOC basée à Tripoli, dépendante du GNA et présidée par Mustafa Sanallah qui a représenté la Libye, la semaine dernière, à la réunion de l’Organisation des pays producteurs et exportateurs de pétrole.

Notons que la Libye est dirigée par deux autorités rivales : le GNA basé à Tripoli et un cabinet parallèle installé dans l’est et soutenu par l’ANL, force paramilitaire dirigée par le maréchal Haftar, homme fort de l’est du pays. Chacun dispose de sa banque centrale, sa « compagnie nationale » de pétrole et de son agence de presse officielle. Ce qui fait que le pays soit toujours déchiré par des luttes de pouvoir et minée par une insécurité chronique.

 

 

 

 

 

 

 


Nestor N'Gampoula