Lire ou relire : « Les cigognes sont immortelles » d’Alain Mabanckou
Michel, jeune collégien, est le héros et le narrateur de la trame de l’histoire du roman. Si ses propos manifestent une naïveté évidente, son récit fictif abreuvé des faits historiques mérite une lecture au second degré, c’est-à-dire le lecteur doit savoir faire un distinguo entre le fait littéraire, fruit de l’imagination, et le fait social, qui relève du vécu réel. Les cigognes sont immortelles est en effet subdivisé en trois parties correspondant à trois jours : Samedi 19, dimanche 20 et lundi 21 mars 1977. C’est l’histoire privée d’un couple, marquée par celle de l’assassinat du président Marien Ngouabi. Pourtant, malgré quelques indices objectifs glanés dans l’Histoire officielle, les anecdotes époustouflantes du narrateur ne seraient que des vérités d’enfant, décrites comme une exhumation du subconscient hors du tamis de la raison. Un peu à l’image d’un rêve. « Le but du roman n’est pas de connaître le monde, mais de le recréer, ni de définir la vie, mais d’en donner l’illusion », affirme le critique littéraire Jean Hytier. Dans la foulée, Alain Mabanckou nous montre un autre Congo en papier, avec des personnages invraisemblables toujours en papier, pour nous faire voyager dans un passé-mensonge qui ne demeure vrai qu’en papier. Ainsi comme dans un rêve cauchemardesque, les cigognes personnifiées dans ce roman en braves soldats russes ou congolais sont immortalisées dans notre mémoire de lecteurs, grâce à la beauté de cette plume mature qui, à la manière de Ferdinand Oyono ou de Sony Labou Tansi, sait peindre même les vilenies avec beaucoup d’humour. Aubin Banzouzi Légendes et crédits photo :Couverture de l'ouvrage |