Les Dépêches de Brazzaville



Livre : Giscard Kevin Dessinga publie « La révolution du bon sens, L’Afrique à l’heure de la maturité, du courage et de la responsabilité»


La révolution du bon sens, L’Afrique à l’heure de la maturité, du courage et de la responsabilité, est un essai de cinq chapitres. Il s’agit de : Les retombées d’une rencontre (chapitre 1) ; Lorsqu’un héritage devient un fardeau (chapitre 2) ; Un constat qui fait école et donne à penser (chapitre 3) ; Sur la route de damas (chapitre 4) ; et L’Afrique à l’heure du courage et de la responsabilité (chapitre 5) ; le tout précédé d’une introduction : sortir de la minorité avant la conclusion intitulée: Agir ou périr.  

L'ouvrage est un appel au bon sens, une voie, un chemin. Ce chemin n’est-il pas celui jadis tracé par le Sénégalais Cheik Anta Diop qui se demandait dès 1948 : « Quand pourrait-on parler de l’Afrique ? » Car jusqu’à cette époque, l’Afrique était encore une "terra incognita". Ce chemin n’est-il pas celui du Sénégalais Senghor et du martiniquais Aimé Césaire, qui apporte une réponse aux angoisses existentielles ? Le livre contient des hypothèses majeures, épineuses et existentielles pour l’éveil politique de l’Afrique. Il sonne le glas de la prise de conscience de l’Afrique : l’Afrique doit se prendre elle-même en charge. En effet, le sens profond de cette intuition majeure rejoint le concert des voix réclamant ce que Cheik Anta Diop appelait « la plénitude culturelle ».

Plusieurs interrogations, sont contenues dans ce livre : pourquoi l’Afrique est, et reste encore la risée de tous et la dernière de la classe malgré ses immenses et innombrables richesses du sol et sous-sol ? Comment avoir tout (pétrole, or, diamant, fer, zinc, cuivre, coltan, cours d’eau, espace cultivable, population jeune) et manquer presque de tout ? C’est la théorie des trois C. Autrement, quel est le vrai problème de l’Afrique : pauvreté ou exploitation, injustice ou ignorance, incapacité ou mauvaise gestion et distribution des richesses ? Pourquoi l’Afrique est-elle devenue le carrefour de toutes les pandémies : guerre, faim, soif, Ebola, Sida ? Que manque-t-il réellement à l’Afrique ? L’argent manque-t-il à l’Afrique ? A l’Afrique manquent- t-il des compétences ? Comment sortir l’Afrique de la minorité à un moment historique « zéro polaire » ? Quels sont les défis à relever pour l’avènement de la « révolution du bon sens » ? C’est à toutes ces questions et à bien d’autres que l'auteur tente de répondre.

Mais, par où commencer ? Par l’école, répond-t-il. Il faut enseigner au monde et à l’Afrique qu’à une question sociale il faut une réponse sociale, et à une question d’ordre politique doit correspondre une réponse d’ordre politique, à une question culturelle ou économique il faut une réponse culturelle ou économique.

Pour que l’émergence de l’Afrique devienne une réalité et passe du plan théorique et rhétorique à celui historique et pratique, Giscard Kevin Dessinga propose une voie : La révolution du bon sens. Pour que cela advienne, l’auteur propose une autre théorie, celle des trois P. Plutôt que d’un cri de révolte, il invite son peuple à se réveiller et à se lever, pour éviter un suicide continental. Du coup le mot d’ordre est donné : spiritualité de la lutte, culture de l’indignation, refus de la complicité, éthique de la responsabilité…

Préfaçant l'ouvrage, le professeur Dario Antiseri, a signifié que la conviction profonde du docteur Dessinga est que « l’Afrique n’a pas besoin de renaître mais de se réveiller ». Et ce, dans la prise de conscience qu’il y a une voie à suivre avec un engagement sans cesse renouvelé et toute la ténacité que cela exige, c’est bien celle de l’éducation à la rationalité, où par rationalité il faut entendre « la capacité de comprendre, de faire et de vouloir les choses avec la tête et non seulement avec les pieds, les mains, les oreilles et le cœur ».

En Afrique, insiste le docteur Dessinga, « nous sommes indépendants depuis plus de cinquante ans et nous le célébrons chaque année, avec faste et pompe ». Mais, il se demande et s'interroge : les pays africains, du nord au sud et de l’est à l’ouest, sont-ils vraiment et réellement libres et souverains ? A propos sa réponse est tranchante, sans compromission : « On nous a rendus tellement esclaves au point d’aimer et d’adorer nos chaines, non plus celles de fer, mais celles faites de préjugés, d’ignorance, de superstition, d’égoïsme, de médisance, d’envie ». 

C’est pourquoi, commente le docteur Dessinga, « ce qui signifie indigne aujourd’hui en Afrique est le fait que les gens ne s’indignent pas, ne s’indignent plus… L’Afrique est le seul et unique supermarché au monde et dans l’histoire où le prix des marchandises est fixé par l’acheteur et non par le vendeur… On vit dans une espèce d’acceptation fatale et passive de la réalité. »

Rappelons que le docteur  Giscard Kevin Dessinga est enseignant-chercheur en philosophie à l'université Marien-Ngouabi, romancier et essayiste. Originaire du Congo-Brazzaville, l'auteur est franciscain et actuellement président de la fondation Notre-Dame d’Afrique.


Bruno Okokana

Légendes et crédits photo : 

Photo 1 : la couverture de l’ouvrage Photo 2 : le docteur Giscard Kevin Dessinga