Les Dépêches de Brazzaville



Lutte contre les violences faites aux femmes : « Silence », une performance en lien avec cette cause


C’est en pleine rue que débute le spectacle, sous le regard ébahi des artistes et quelques populations habitant à proximité du siège des ateliers Sahm, situé à Bacongo, dans le deuxième arrondissement de Brazzaville. Le décor laisse voir six femmes en robe rouge, les chaînes aux pieds raccordées à des cocotes artisanales et le visage couvert avec des sacs de marché noir. Que signifie cela ? s’interrogent les inaccoutumés de la performance artistique et ça a l’air douloureux ! stipulent d’autres spectateurs.

Au prix de la sueur et d’un grand effort physique, ces jeunes femmes ont dû parcourir des dizaines de mètres avant d’arriver jusqu'à la scène finale du spectacle où elles ont eu droit à un rituel de sanctification. Durant le trajet, elles marchent, s’arrêtent un moment, puis reprennent la route. Elles crient, suffoquent et se tiennent la main en signe de solidarité. En bref, elles souffrent en silence ; endurent la honte, le mépris et le regard accablant de la société sans recevoir une quelconque aide majeure.

Intitulée « Silence », la nouvelle création d’Ange Kayifa, en collaboration avec Sam BB, Alégra Nicka, Sardoine Mia, Rose Neves et Sarah Paul, toutes artistes, abordent à nouveau les questions inhérentes à la condition difficile infligée injustement aux femmes dans nos sociétés : le rôle de la femme se limite-t-il à tenir un foyer en toute soumission ? Doit-on au nom du statut de femme être un objet sexuel et de violence ? Autant de questions que soulève cette performance de l’artiste camerounaise en confinement et résidente au Congo depuis mars.

Remarquablement ovationné à son terme, « Silence » c’est également le symbole d’une société où tout le monde porte un masque, pour ne laisser rien transparaitre de sa vraie vie. Une société où on peut être surpris demain du décès d’une femme pour violence conjugale, alors qu’elle avait constamment l’air heureuse dans son foyer. « Merci au public qui ne cesse de nous soutenir dans l’accomplissement de notre métier. Et, bravo à toutes ces femmes qui au lieu de se faire victimes ont choisi de se positionner comme survivantes afin d’éradiquer le fléau. Le chemin est encore long mais ensemble nous y arriverons », a souligné l’artiste.  

Après la performance artistique d’Ange Kayifa, le public restreint a été invité à visiter l’exposition-photo de l’artiste, toujours en lien avec le thème « Silence ». Par ailleurs, le groupe de danse krump « Armée street » a déployé une chorégraphie qui condamne plusieurs types de violences faites aux femmes : viol, excision, harcèlement, coups et blessures, violence verbale, etc.

Notons que dans le cadre de la Journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes, célébrée le 25 novembre de chaque année, les ateliers Sahm vibreront jusqu’au 28 novembre, au rythme d’autres activités culturelles : lecture de texte, performance, projection cinématographique, scène slam et débat d’idées. Les rencontres sont réservées aux artistes, à cause des restrictions imposées pour lutter contre la pandémie de Covid-19 au Congo.


Merveille Atipo

Légendes et crédits photo : 

1- Six jeunes femmes en pleine performance artistique/Adiac; 2- Le groupe de danse, Armée street, en pleine prestation/Adiac.