Les Dépêches de Brazzaville



Mali : la médiation togolaise auprès de la communauté internationale s’annonce délicate


Si le chef de la junte malienne a de prime abord transmis un message au président mauritanien, Mohamed Ould Cheikh El Ghazouani, lui demandant « ses conseils et son implication » personnelle ainsi que celle de son gouvernement auprès des frères maliens pour qu’ils puissent « trouver une solution » aux difficultés rencontrées dans leur pays, la donne semble avoir totalement changé ces dernières semaines.  Bamako a finalement pris attache avec les autorités togolaises dans l’espoir que son image sera soignée sur la scène internationale.

« Nous avons, au nom du président de la transition, sollicité le président Faure Gnassingbé (...) pour faciliter le dialogue avec les acteurs régionaux et plus largement le dialogue avec l’ensemble de la communauté internationale pour trouver un compromis pouvant nous permettre de sortir de la crise », a indiqué le ministre malien des Affaires étrangères, Abdoulaye Diop, qui est rentré d’une visite à Lomé.

Depuis le début de l’année, Bamako est la cible de mesures économiques et diplomatiques des Etats ouest-africains qui l’ont sanctionné pour l’intention de la junte de se maintenir au pouvoir encore plusieurs années, après deux putschs en août 2020 puis en mai 2021. Hors de l’espace communautaire, les relations avec les Etats occidentaux se détériorent à mesure que le Mali se tourne vers la Russie. La France et ses alliés accusent la junte de s’être assurée les services de la société de sécurité privée russe Wagner, aux agissements controversés, ce que conteste Bamako.

Loin de tirer les leçons du refroidissement de leurs relations avec d’autres Etats, les autorités maliennes, toujours à couteaux tirés avec la France et plus largement avec les pays européens, ont annoncé quitter le G5 Sahel - réduit à quatre pays : la Mauritanie, le Tchad, le Burkina et le Niger - et sa force antidjihadiste, accusant l’organisation d’être « instrumentalisée » par « l’extérieur ».

Bamako davantage isolé après avoir quitté le G5 Sahel

Ce départ isole encore plus le Mali de ses voisins de l’organisation régionale sahélienne créée en 2014 et dont la force est composée d’environ 5 000 militaires depuis 2017. Il survient après l’annonce début mai par la junte de la fin du traité de coopération de 2014 avec la France, ainsi que des accords de 2013 et 2020 fixant le cadre juridique de la présence de la force antidjihadiste Barkhane et du regroupement de forces spéciales européennes Takuba, initié par la France.

Pour Lomé, la proposition de médiation faite par des dirigeants maliens a été effectivement acceptée. Malgré cette volonté affichée, les observateurs s’accordent à dire que les autorités togolaises pourraient avoir du pain sur la planche dans leur mission d’autant que le récent départ du Mali du G5 Sahel traduit de plus en plus son isolement sur le plan diplomatique. Une analyse partagée par la diplomatie française, selon laquelle cette décision des autorités maliennes compromettait les efforts régionaux de lutte contre le terrorisme. « Tout comme l’Union européenne, la France regrette cette décision qui remet en cause les efforts régionaux de coopération pour lutter contre le terrorisme et promouvoir le développement, et traduit une nouvelle fois un isolement des autorités maliennes de transition », a souligné la porte-parole du Quai d’Orsay dans un point de presse électronique.

C’est dans ce contexte que l’Union européenne a annoncé qu’elle va retirer une partie des effectifs engagés dans la mission de formation militaire au Mali après l’arrêt de ses activités. « La mission reste au Mali, mais elle va être redimensionnée, car elle n’a pas besoin d’un millier de personnes si elle n’entraîne plus les militaires maliens », a fait savoir le chef de la diplomatie européenne, l’Espagnol Josep Borrell, à l’issue d’une réunion des ministres de la Défense de l’Union européenne à Bruxelles.

 


Nestor N'Gampoula