Les Dépêches de Brazzaville



ONU : l’expérience des missions de paix en RD Congo doit servir à tous


Les nouvelles modalités d’exécution des missions de paix dans le monde ont fait l’objet, mercredi à New York, de la session que le Conseil de sécurité de l’ONU a dédiée à cette question. Les débats ont surtout tourné autour de l’utilisation, comme à l’est de la République démocratique du Congo, des drones. Ces avions sans pilotes sont commandés à distance et opèrent depuis décembre en RDC. En opérations offensives comme le privilégient les forces américaines au Pakistan ou au Yémen, ou en mission de discrète observation comme c’est le cas au Congo, ces aéronefs présentent plus d’avantages que les inconvénients signalés surtout par les humanitaires.

Des inconvénients que le Vatican, qui a récemment pris fermement sur la question, voit dans le fait d’infliger la mort à distance, vers des cibles déterminées de loin et qui ne peuvent pas être « moralement » discernées par des machines changeait la vision de la guerre. Trop souvent, relevait l’observateur permanent du Saint-Siège à l’ONU, les drones ont été rendus coupables d’infliger la mort à des civils et de causer trop de « dégâts collatéraux ». Tel présumé terroriste est visé dans sa voiture sans tenir compte du fait qu’il s’y trouve avec femmes et enfants, la cible du drone sans état d’âme n’étant que la voiture en mouvement.

Ces risques sont bien réels, reconnaît l’ONU, mais ils seraient encore plus grands en cas d’attaque frontale des forces belligérantes sur les théâtres d’opération. Et dans le cas de la République démocratique du Congo, a relevé mercredi M. Ban ki-Moon, secrétaire général de l’ONU, les drones de la Monusco ne se sont rendus coupables d’aucune violation des droits de l’Homme sur le terrain. « Nous devons avoir recours à toute sorte de technologie pour mettre nos casques bleus en condition d’opérer dans de meilleures conditions de sécurité ».

Même si le secrétaire général  s’est cru obligé d’ajouter que l’organisation mondiale évaluait aussi l’option de la « qualité-prix », dans une affaire où il est question de vies humaines, aucun détail ne peut être négligé. Il s’agit d’éviter le moins de pertes possibles dans les missions de paix, mais aussi de prévenir autant que possible les attaques belligérantes contre des forces qui, par définition, se déploient sur le terrain pour sauver des vies humaines, quelles qu’elles soient, et y ramener la paix qu’elles ne sont pas responsables d’avoir troublée.

Dans ce sens, a dit le secrétaire général, l’est congolais a représenté un terrain de grands enseignements pour parvenir à des missions toujours efficientes et moins périlleuses. « La rapidité est essentielle », a-t-il soutenu; « quand des vies civiles sont en jeu, chaque minute compte ». Il a exhorté les Nations unies à améliorer les mécanismes de mobilisation des casques bleus, par exemple en créant une force de réservistes à déployer rapidement dans un minimum de temps.

Le Britannique Mark Lyall-Grant a fait noter au cours des travaux que les images transmises par les avions sans pilotes peuvent être utilisées pour mobiliser en temps réel une force onusienne d’intervention rapide là où cela est nécessaire. Le tout avec, bien entendu, le moins de risques pour les casques bleus sur le terrain. Car la hantise de toute mission de paix est de la voir compter les morts dans ses rangs ainsi qu’on le voit trop souvent ces temps-ci au Mali et, en Afrique centrale, en République Centrafricaine où des missions de paix sont déployées.

Les travaux du Conseil de sécurité ont reçu un large écho à Rome où l’on n’a pas manqué de souligner que l’Italie était, parmi les nations occidentales, le premier contributeur en absolu aux missions de paix de l’ONU dans le monde. C’est pourquoi le pays peut se permettre d’insister sur plus de recours aux nouvelles technologies dans les opérations que l’ONU aux quatre coins du monde. « Les missions de paix sont un impératif moral qui doit entrer dans le 21e siècle », a affirmé Sebastiano Cardi, représentant permanent de l’Italie à l’ONU.

L’Italie a d’autant plus de raisons de faire entendre sa voix dans ce chapitre que c’est bien de technologies « made in Italie » dont l’ONU se sert à l’est de la République démocratique du Congo. Les drones employés par la Monusco sont, en effet, produits par la société Selex Es, fleuron de l’industrie italienne. En plus, a ajouté M. Cardi, la Coopération italienne a récemment débloqué la somme de 200.000 euros en faveur de l’Ocha, le bureau de coordination des questions humanitaires de l’ONU, pour aider l’organisation à mieux documenter par satellite les violations des résolutions onusiennes par le régime syrien par exemple.


Lucien Mpama