RDC : la diplomatie française face aux nouvelles guerres africainesLa Conférence internationale sur la crise humanitaire en République démocratique du Congo (RDC), tenue à Paris, a offert à Emmanuel Macron l’occasion de réaffirmer le retour de la France dans une région stratégique délaissée : l’Afrique des Grands Lacs. Mais derrière les annonces d’aide -1,5 milliard d’euros mobilisés pour une population à bout de souffle - se joue un bras de fer diplomatique bien plus vaste, mêlant ressources, sécurité et désinformation. « Nous ne pouvons pas rester spectateurs de la tragédie congolaise », a martelé le président français, évoquant des chiffres « insoutenables » : 28 millions de personnes en insécurité alimentaire, une femme violée toutes les quatre minutes, un enfant toutes les trente minutes. Le plan humanitaire des Nations unies, estimé à 2,5 milliards d’euros, n’était financé qu’à 16 %. La France et le Togo, médiateur mandaté par l’Union africaine, veulent combler ce vide diplomatique laissé par des puissances régionales plus offensives, au premier rang desquelles le Rwanda. L’annonce par Paris de la réouverture prochaine de l’aéroport de Goma et de couloirs humanitaires sécurisés a toutefois suscité l’irritation de Kigali. Le chef de la diplomatie rwandaise, Olivier Nduhungirehe, a sèchement rappelé que « la France ne peut rouvrir un aéroport dans une zone contrôlée par le M23 ». Cette tension illustre la nouvelle grammaire des conflits africains, où se croisent guerres par procuration, économie de prédation et désinformation numérique. « Les routes humanitaires sont parfois contrôlées, les ressources détournées », a souligné le président togolais Faure Gnassingbé, appelant à une meilleure traçabilité des minerais et à une mobilisation africaine « par dignité autant que par efficacité ». Pour Paris, l’enjeu dépasse la seule urgence humanitaire : il s’agit de redéfinir une présence stratégique face aux influences chinoises, américaines et rwandaises. Emmanuel Macron a insisté sur la nécessité de réguler les plate-formes numériques afin de contrer les manipulations étrangères qui accompagnent désormais les opérations militaires et économiques. La crise de l’est congolais agit ainsi comme un révélateur : celui d’une Afrique centrale devenue champ de bataille géo-économique mondial, où chaque aide, chaque couloir et chaque message relèvent d’une guerre d’influence autant que d’une mission humanitaire. Noël Ndong |