Interview. Tony Bolamba : « Le pays a beaucoup de priorités dont les réformes électorales »

Mardi 23 Mars 2021 - 15:30

Abonnez-vous

  • Augmenter
  • Normal

Current Size: 100%

Version imprimable

C’est un regard d’analyste que Tony Bolamba, l’initiateur du Mouvement pour le Congo (Moco), porte sur la situation sociopolitique de son pays dans un entretien accordé au Courrier de Kinshasa. Aucun sujet d’actualité n’échappe à l’ex gouverneur de l’Equateur qui livre le fond de sa pensée sur la conduite des affaires de l’Etat tout en assumant ses opinions et ses convictions. 

Le Courrier de Kinshasa : La République démocratique du Congo vient, à la suite de plusieurs Etats du monde, de surseoir l’administration du vaccin AstraZeneca. Pensez-vous que cette décision soit salutaire pour préserver la santé de la population congolaise ?

Tony Bolamba. Tout gouvernement a le droit de protéger la santé de ses concitoyens.

L.C.K. Et quel est votre avis sur l’approche utilisée par les pouvoirs publics dans la lutte contre le coronavirus ?

T.B. J'ai déjà fait des propositions claires. Cette pandémie n'a pas que des conséquences sanitaires, elle impacte négativement aussi sur notre économie. Même les pays économiquement forts sont touchés par une crise économique sans précédent et la croissance mondiale est en berne. Il faut de l'abnégation...

L.C.K. Jusqu’à ce jour, la RDC est toujours sans gouvernement. La gestion des ambitions serait, d’après des indiscrétions, la principale source du blocage. Comment contourner la difficulté ?

T.B. Cela dépend de la vision que chacun a pour servir la République. J'ai toujours dit que l'on pouvait servir la République à tous les niveaux, c'est le sens citoyen. J'ai déjà été élu gouverneur pour servir la République. Si demain la République me demande de la servir ailleurs comme bourgmestre, chef du quartier, ambassadeur, dirigeant d'une entreprise de l'Etat congolais, me rattache au service du président de la République ou d'une autre institution, je servirai la République ! C'est le sens républicain d'une mission d'un citoyen engagé pour servir.

L.C.K. Pensez-vous que le poids politique évoqué par certaines formations politiques à l’instar de l’AFDC-A pour justifier leur présence au gouvernement soit un critère qui compte ?

T.B. J'avais entendu que dans la composition du gouvernement, pour la répartition des ministères, il fallait avoir huit députés pour un ministère. L'AFDC-A en a 41, faites vous-même le calcul !

L.C.K. Le gouvernement Sama Lukonde devrait avoir quelle configuration avec quel type de profil des ministres ? Et quelles devraient être ses priorités ?

TB. Je suggère que ceux qui sont impliqués dans les crimes économiques et de sang n'en fassent pas partie. Avant d'être politique, je suis d'abord un fervent partisan des libertés des droits de l'homme. J'ai un regard particulier sur cette situation et avec notre association, le Mouvement pour le Congo, nous travaillons sur une liste à remettre au Premier ministre concernant certaines situations de l'Equateur. Quant aux priorités de ce gouvernement, je recommanderais vivement qu'il soit un gouvernement d'abnégation, de guerriers pour paraphraser le Président de la République. Un gouvernement avec un train de vie modeste, totalement revu à la baisse pour permettre au pays de faire des économies et financer des projets prioritaires à impact social direct pour nos populations. Il faut baisser les rémunérations des membres du gouvernement et créer un fond de solidarité spécial pour augmenter les primes de nos hommes qui sont au front à l'Est afin de les motiver et renforcer ainsi la sécurité. Rassurer aussi les investisseurs qui sont au pays et ceux qui souhaitent venir chez nous afin de stabiliser les emplois et en créer de nouveaux. Le gouvernement doit également se battre pour la levée de l'embargo sur les armes infligé à notre pays afin de lui permettre de mieux s'équiper et défendre nos populations.

L.C.K. Une certaine opinion pense que la session parlementaire de mars devrait plus se focaliser sur les réformes électorales. Est-ce aussi votre avis ?

T.B . Le pays a beaucoup des priorités dont les réformes électorales !

L.C.K : Il est fait état notamment d’une possible suppression du seuil électoral et de l’abandon de la proportionnelle au profit d’un scrutin majoritaire simple. Votre avis à ce sujet ?

T.B. L'organisation des dernières élections a démontré ses limites. Je suis contre l'élection du président de la République au suffrage indirect car nous devons donner une légitimité juste au chef de l'Etat qui sera élu. Je suggère d'ailleurs que toutes les élections soient couplées les mêmes jours afin de savoir qui sera élu président de la République, gouverneur, sénateur, député national et provincial ainsi que conseiller communal, bourgmestre et maire. Par ailleurs, aucun candidat ne devrait avoir pour suppléant un membre de sa famille biologique directe afin d'éviter le spectacle désolant auquel nous avons assisté aux élections passées où le père est député national ou sénateur, son fils, sa fille suppléante ou son épouse suppléante. Un népotisme à outrance et honteux pour la République.

L.C.K. Que pensez-vous du recensement, ou mieux, de l’identification de la population que certains présentent comme des préalables majeurs à l’organisation des élections en 2023 ?

TB. Il est important que nous puissions faire un recensement ou une identification des populations afin de connaître le nombre réel des populations et permettre l’établissement de cartes d'identité. A ce jour, notre pays reste le seul au monde sans carte d'identité. Avec les outils modernes, recenser les populations en RDC prendra approximativement douze mois si nous mettons en place un mécanisme pour chaque province, territoire et secteur !

L.C.K. Dans un autre registre, que vous inspire le nouveau statut de Félix-Antoine Tshisekedi en tant que Président en exercice de l’Union africaine ? Que lui conseilleriez-vous pour mener à bien sa mandature ?

T.B. C'est une bonne chose pour l'Afrique car n'oublions pas que le Président de la République vient d'une association politique qui a combattu pendant près de 35 ans pour la démocratie. Je n'ai pas de conseil particulier à lui prodiguer car je pense que le chef de l'Etat est démocrate dans l'âme, donc très bien outillé pour mener à bon port sa mission.

L.C.K. A présent que les Etats-Unis viennent d’identifier officiellement l’ADF comme une structure de Daech opérant en RDC, qu’est-ce qui peut fondamentalement changer ?

T.B. Nous devons renforcer la situation des unités antiterroristes de notre armée. Au temps du Zaïre, nous en avions et je pense que nous avons encore quelques instructeurs antiterroristes formés en Israël, en Egypte et ailleurs qui peuvent apporter leur expertise pour que nous menions à bien cette lutte. Vu la sensibilité du sujet, en mes grades et qualités, je ferais des proposions concrètes à qui de droit !

L.C.K. Comment se porte votre association, le MOCO, et politiquement, où vous situez-vous par rapport à la nouvelle configuration politique ?

T.B : Notre association Moco se porte bien et continue de garder un œil citoyen sur toute la situation de la République et du monde comme elle a toujours su le faire ! Bientôt, nous reprendrons nos rencontres républicaines et citoyennes avec les "Peuples citoyens" sur toute l'étendue de la République. Quant à moi, politiquement, je reste membre actif et cadre de l'AFDC où je suis actuellement Secrétaire National chargé de la bonne gouvernance après avoir été en charge des stratégies politiques durant notre traversée du désert et batailles politiques aux côtés du professeur Modeste Bahati, l'actuel président du Sénat que j'avais accepté en mon âme et conscience de soutenir avec loyauté suite à l'injustice dont l'AFDC fut victime à travers sa personne ! Comme vous le savez, je suis allergique à l'injustice...

Alain Diasso

Légendes et crédits photo : 

Tony Cassius Bolamba

Notification: 

Non