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Femmes afghanes

Samedi 4 Septembre 2021 - 17:31

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Le sentiment que le quotidien des femmes d’Afghanistan se compliquera avec l’arrivée au pouvoir des Talibans, le 15 août dernier, est manifeste. Il ne s’agit pas d’exagérer les faits, dans la mesure où la Charia que vont appliquer les nouveaux maîtres de Kaboul sur la société afghane aura nécessairement des conséquences sur les acquis enregistrés dans le pays les vingt dernières années.

Les femmes allant à l’école, travaillant dans l’administration publique, exerçant dans les entreprises, militant pour les droits de l’homme, avaient dans une certaine mesure façonné le nouvel Afghanistan sans briser la culture millénaire des peuples de ce pays. Il n’est pas certain que les Talibans autorisent aux femmes de leur pays les mêmes libertés que celles qu’elles ont obtenues sous les gouvernements successifs ayant exercé le pouvoir politique après leur départ sous les bombes des forces coalisées de l’Occident en 2001.

Même s’ils jurent ne pas avoir l’intention de pratiquer la chasse aux sorcières, les Talibans ne s’empêcheront pas de prendre la revanche sur leur propre parcours. C’est pour cela qu’ils font craindre un retour en arrière préjudiciable en matière de droits et libertés publics. Là où elles s’habillaient sobrement avec un foulard noué sur la tête pour cacher leurs cheveux comme l’exige la coutume, les femmes afghanes pourraient désormais être sommées de se couvrir de la tête aux pieds en application des versions plus strictes de la loi islamique.

Pour juger les nouvelles autorités afghanes sur pièce, on devra néanmoins observer la manière dont elles structureront leur pouvoir. Quelle place les femmes vont-elles occuper dans la charpente de celui-ci ? Quel droit à la parole auront–elles ? Quelles conditions devront-elles remplir désormais pour aller à l’école, pratiquer le sport, fréquenter la plage, les spectacles, éduquer leurs enfants ?

A ce jour, surprise par la tournure des événements, la communauté internationale est restée circonspecte à l’égard du nouveau pouvoir de Kaboul. Pour avoir évacué l’Afghanistan comme ils l’ont fait, il est assez normal que les pays occidentaux qui constituèrent naguère la coalition anti-Talibans gardent leur distance vis-à-vis de leurs ennemis d’hier. Mais le fait que ces mêmes pays ont acheminé sur leur sol autant de réfugiés afghans établit une relation quasiment familiale entre eux et Kaboul.

Des familles afghanes transportées vers les Etat-Unis, la France, l’Allemagne, l’Italie et le Canada ont témoigné de ce que leurs proches sont restés nombreux au pays. La rupture a été brutale et les plaies qu’elle laisse sont profondes. Dans ce qui va devenir pour chacun d’eux et chacune d’elles leur nouvelle patrie, ces réfugiés « obligés » ne cesseront jamais de penser à retourner chez eux. Pour faire en sorte que le nouvel Afghanistan qui a vu le jour les vingt dernières années prospère à côté de celui qui va naître du « nouveau » pouvoir des Talibans, la balle se trouve encore une fois de plus du côté des « grands » de ce monde.

Ces « grands » se retrouvent dans deux camps. Le premier fédère les nations de la coalition qui s’est disloquée le 15 août, constituée par les pays cités un peu plus haut. Le second camp est celui composé par la Russie, la Chine, la Turquie, l’Iran. Leur distance dans l’exercice du pouvoir à Kaboul les deux dernières décennies les a mises à l’abri des scènes de « fin » du monde vues dernièrement à l’aéroport de Kaboul. Mais ce camp ne devrait pas se frotter les mains. Il a le devoir de faire pression sur les nouveaux maîtres du pays afin qu’ils épargnent les plus vulnérables.

Pour sa part, l’Organisation des Nations unies devrait-elle aussi rester vigilante pour que la femme afghane vive librement sous le régime Taliban. Si tel n’est pas le cas, la diplomatie ayant toujours un mot à dire, alors il faudrait penser à une pression noble. Instituer une journée internationale de la femme afghane comme témoignage de la solidarité du monde à l’égard de toutes celles qui n’auront pas droit à une vie décente dans ce beau pays. Disons néanmoins que les Talibans sont tenus de respecter les engagements qu’ils ont pris de travailler au bonheur du peuple afghan.

Gankama N'Siah

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Édition Quotidienne (DB)

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