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Ils avancent masqués

Samedi 2 Octobre 2021 - 17:25

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Dix jours de concertation avec les forces vives de la nation puis la junte guinéenne a circonscrit dans une « charte de la transition », dévoilée le 27 septembre, le périmètre des prérogatives qu’elle s’est attribuées au lendemain du putsch qu’elle a mené le 5 septembre. Sur chaque page de cette « loi fondamentale » qui en compte treize pour cinq titres, huit chapitres et quatre-vingt-quatre articles, exceptées la page de garde et celle de fin revêtant le sceau de la présidence de la République de Guinée et la signature de son nouveau prestataire, on découvre, portées au stylo, les initiales « MD », allusion à Mamady Doumbouya, qui officie désormais en qualité de chef de l’Etat.

Quatre organes vont gérer la transition qui s’installe au pays de Sékou Touré. Le Comité national du rassemblement pour le développement, CNRD en sigle, le président de la transition, le gouvernement de la transition, le Conseil national de la transition (CNT). Pour voir que l’horizon n’est pas encore totalement dégagé pour la principale instance détentrice du pouvoir politique mentionnée plus haut, aucune date ne borne la durée de la transition. Le temps, peut-être, pour les quatre entités de se constituer physiquement et de trouver les termes appropriés pour annoncer à quel moment sera mis fin au régime d’exception en place.

En attendant cette échéance de l’organisation matérielle de la transition à travers la désignation de ses animateurs, la Charte est assez claire sur les pouvoirs dévolus au colonel Doumbouya. Au terme de l’article 38 de celle-ci, le président de la transition est chef de l’Etat, chef suprême des armées, chef de l’Administration, détermine la politique de la nation, assure le bon fonctionnement des pouvoirs publics et la continuité de l’Etat. Cela coule aussi de source, il veille au respect de la charte qu’il a promulguée.

Délit de présence, si on peut dire, les Guinéens ayant exercé une fonction de direction sous le pouvoir déchu sont frappés de plusieurs interdictions. Ils ne feront pas partie de l’organe législatif transitoire qui comprendra quatre-vingt-un membres. Par contre le CNT recrutera le plus largement possible au sein de la société guinéenne. Des partis politiques à la société civile en passant par les forces de défense et de sécurité, les associations des droits de l’homme et la diaspora, cette assemblée pourrait revêtir le cachet d’une volonté de rassemblement.

Dans la mesure où au menu des privilèges conférés par la Charte de la transition à son président en exercice figurent « l’accréditation des ambassadeurs et les envoyés extraordinaires auprès des puissances étrangères », l’une des batailles qui l’attendent après sa prestation de serment, vendredi 1er octobre, sera de gagner la légitimité extérieure. Au sein de la sous-région d’Afrique de l’ouest à laquelle la Guinée est membre, mais suspendue pour les développements politiques susmentionnés, l’horloge du dialogue semble pour le moment à l’arrêt.

Le 17 septembre, les militaires guinéens avaient accueilli à Conakry les présidents du Ghana et de Côte d’Ivoire au nom de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest, sans s’aligner sur les positions de l’organisation sous-régionale qui leur faisait obligation de fixer la durée de la transition à six mois et de laisser libre l’ancien président Alpha Condé. Les semaines et les mois à venir diront où mènera ce bras de fer engagé par la Guinée contre ses voisins de la sous-région et la communauté internationale. Pour l’intérêt de tous, les jeux gagneraient à être clarifiés.

Gankama N'Siah

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Édition Quotidienne (DB)

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