28e sommet France-Afrique : échanges directs entre Emmanuel Macron et la société civile africaine

Samedi 9 Octobre 2021 - 18:30

Abonnez-vous

  • Augmenter
  • Normal

Current Size: 100%

Version imprimable

La rencontre France-Afrique s’est ouverte le 8 octobre à Montpellier, dans le sud de la France. Aucun chef d’Etat africain n’a été invité, le président français voulant seul  mette à l’honneur la société civile africaine, certains talents africains, notamment la diaspora. Un première depuis 1973, date de la mise en place des sommets France-Afrique.

A l’invitation du président français, Emmanuel Macron, des jeunes entrepreneurs, artistes, sportifs, des acteurs de la société civile africaine, notamment ceux de la diaspora, ont participé au 28e « sommet » France-Afrique. Pour la première fois, aucun chef d’État africain n’a été convié. Cette rencontre inédite vise à « refonder » la relation entre la France et l’Afrique. Ce nouveau format est censé  permettre d’« écouter la parole de la jeunesse africaine et de sortir des formules des réseaux obsolètes », selon l’Elysée. Donc de rompre avec « la Françafrique », pour échanger sur des questions politiques, économiques et culturelles. Cette rencontre se tient à un moment où l'influence de la France dans son ancien pré-carré est disputée, notamment par la Russie, et où Paris multiplie des crises, le Mali et l’Algérie.  « J’ai formulé un vœu,  celui que le nouveau sommet soit celui d’un dialogue direct ouvert, celui de la jeunesse, celui des diasporas […]. Vous êtes les acteurs du changement, c’est vers vous que je me tourne pour écrire la nouvelle page de la relation entre l’Afrique et la France, avec exigence et sincérité. Merci pour nos échanges » , a déclaré  Emmanuel Macron. Onze jeunes ont pris la parole pour partager leurs attentes et leurs propositions. Emmanuel Macron a accepté de se livrer à un exercice de « vérité », où il a été appelé à justifier les actions de la France en Afrique depuis l’indépendance.

Par exemple l’appui « présumé » de la France à des régimes « tyranniques », les interventions militaires françaises, la souveraineté, la démocratie, la politique française à géométrie variable, la déstabilisation de la Libye, la situation des migrants, la politique des visas, son « arrogance », le « paternalisme français ». Le président français a défendu la sincérité de leurs propos, niant tout paternalisme et défendant la relation « d’égal à égal », et réitérant ses fondamentaux sur les contentieux soulevés. Certains ont invité Emmanuel Macron à demander pardon aux Africains, pour les crimes de la colonisation et de « cesser de  coopérer et collaborer avec les présidents dictateurs » et de « programmer un retrait progressif et définitif » des bases militaires françaises en Afrique, ou de «  mettre fin à la françafrique », pointant du doigt des pratiques opaques, les contractions de la France, « son enlisement à des questions de racisme ». En réponse à ces accusations, le chef de l’Etat a déclaré : « la France est là militairement à la demande des pays africains. C’est pas moi  qui vais faire l’école, c’est pas moi qui vais faire la police […] Jamais une intervention militaire ne remplace le travail  d’un Etat », lançant des piques : « Ce continent est jeune, est dirigé depuis longtemps par des personnes qui sont vieilles » et saluant « la part d’africanité de la France et la chance d’avoir une diaspora dont les membres sont totalement français ».  

Le bilan du quinquennat d’Emmanuel Macron

Elu président de la République française en mai 2017, Emmanuel Macron effectue sa première visite officielle en Afrique en novembre 2017, au Burkina Faso, où il va s'adresser aux étudiants. Ce qui sera un changement tant dans la forme que dans le fond.  Il va déclarer : « Il n'y a plus de politique africaine de la France ». Puis il se rendra au Sénégal, en Ethiopie, en Algérie, etc. Sans faire allusion au passé colonial de la France, au franc CFA. Face à des tensions de toutes sortes, le président français va décider  de restituer au Bénin et au Sénégal des œuvres d’art, de reconnaître la responsabilité de la France  dans le génocide rwandais de 1994. En 2019, il va être confronté à une pression de certains pays d’Afrique de l’Ouest , qui veulent mettre fin à l’utilisation du Franc « héritage d'un système historique et perçu comme les vestiges d'une Françafrique », avait-il déclaré. Au Sahel où la France lutte aux côtés des pays de la région contre le terrorisme dans l'opération Barkhane, qui finira début 2022, il n’a pas réussi à écarter la menace jihadiste. A l’actif d’Emmanuel Macron, l’annonce de la restitution de vingt-six œuvres d’art pillées au Bénin, l’annonce de la fin du franc CFA en Afrique de l’Ouest, la reconnaissance de la responsabilité de la France dans la déstabilisation de la Libye et dans le génocide rwandais. Grâce à ces annonces, le philosophe guinéen Amadou Sadjo Barry considère que « les lignes ont bougé sur le plan symbolique, il y a eu des gestes importants ».

Le changement du logiciel de la France en Afrique est en marche

Le directeur général de l’Agence française de développement, Rémy Rioux,  a déclaré : « Le changement de notre logiciel avec l’Afrique est en marche », le « New Deal » avec le continent africain, « l’objectif du Sommet Afrique-France  se fera avec le secteur privé et la société civile », a-t-il précisé. En mots simples, les dirigeants français se passeront désormais des dirigeants africains pour faire le business en Afrique, mettant à l’écart ceux qui sont élus pour mettre en place les orientations du continent.  L’axe majeur du changement de logiciel  consiste à  renforcer le « non-souverain », c’est-à-dire le secteur privé, les organisations de la société civile et les collectivités locales. La valorisation de l’entrepreneuriat étant l’un des piliers du sommet France-Afrique et l’une des priorités de la France. A l’issue du sommet, d’autres annonces sont attendues. Comme la création d'un Fonds destiné à soutenir les initiatives de promotion de la démocratie, des programmes permettant une plus grande mobilité étudiante, ou la mise en place d'un forum euro-africain sur les migrations. A noter qu’un tiers (14,9%) de  Français établis hors de France  vivent en Afrique, avec 1,8 milliard d’euros, la France est le troisième investisseur mondial en Afrique.

Noël Ndong

Notification: 

Non