Parcs Upemba et Kundelungu : des pressions sur les deux aires protégées dénoncées

Lundi 25 Octobre 2021 - 12:47

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 L’envahissement des concessions des deux parcs par les communautés riveraines, l’inaccessibilité dans certaines zones, la spoliation de leurs espaces par des opérateurs économiques ainsi que le mauvais traitement des écogardes ont comme conséquence des graves risques de perte des espèces animales et violations des droits environnementaux, selon l'ONG Justicia.

L’ONG de défense des droits de l’homme Justicia a effectué, de févier à juillet 2021, un monitoring dans les parcs Upemba et Kundelungu, situés dans les provinces du Haut-Katanga, du Haut-Lomami et de Lualaba. Elle a relevé, parmi les grandes menaces à ces deux aires protégées, des spoliations pouvant entraîner l’extinction de la diversité biologique. Ce travail, dont l’objectif principal a été d’identifier les pressions humaines exercées sur les deux parcs, les spoliations des terres dont ils font l’objet et les activités qui menacent dangereusement de disparition les espèces protégées et d’affecter les moyens de subsistance des communautés qui dépendent de l’usage rationnel de leurs ressources et services écosystémiques pour leur survie, a été rendu public au cours d’une conférence de presse tenue le 23 octobre au Cepas, à Kinshasa, par le président de Justicia, Me Timothée Mbuya.

Ce juriste et défenseur des droits de l’homme a noté que les défis auxquels sont confrontés les parcs Upemba et Kundelungu ont comme conséquences des graves risques de perte des espèces animales et violations des droits environnementaux. Parmi ces défis, il y a l’envahissement de la concession par les communautés riveraines, l’inaccessibilité dans certaines zones de ces deux parcs, la spoliation de leurs espaces par des opérateurs économiques ainsi que le mauvais traitement des écogardes par l’Etat congolais et certaines partenaires internationaux intervenant dans le secteur de l’environnement.

La ferme Espoir et le barrage hydroélectrique de Somban deux grands spoliateurs

Parlant expressément du parc national de Kundelungu, Justicia a indiqué que cette aire protégée est entourée par plusieurs villages, qui sont en conflit direct et prétendent ne pas maîtriser les limites du parc. « Ce qui leur donne le droit de pratiquer l’agriculture sur les vastes étendues des terres, voire le braconnage, malheureusement, au préjudice de l’Institut congolais de conservation de la nature (ICCN) qui, pourtant, fournit tant d’efforts pour que l’écosystème ne soit pas touché », a souligné cette association. Alors que sur l’aspect spoliation des terres, Justicia a relevé l’action de la ferme Espoir (Ranch Kundelungu), qui a érigé une clôture au-delà de ses limites originales en privant ce parc de la faune et de la flore de la grande étendue ainsi spoliée, en violation de la loi n° 14/003 du 11 février 2014 relative à la conservation de la nature.

Au parc de l’Upemba, Justicia a dénoncé la création des villages dans l’aire protégée dont certains ont la réputation d’appartenir à des miliciens Maï-Maï. C’est le cas, a précisé cette ONG, du village Mbwe dont les habitants, qualifiés de Maï-Maï, pratiquent la braconnage et créent, le long du lac Upemba, des camps de pêche qui se transforment en villages qui sont à la base des conflits entre les hommes et les éléphants. Cette association relève également la construction, sur la rivière Lufira, dans les limites du parc Upemba, du barrage hydroélectrique de Sombwe, par la société Kipay. Ce, avec risque de priver plusieurs habitants des territoires de Malemba-Nkulu et Bukama de leur activité principale qui est la pêche ainsi que la perte estimée d’environ 60 Km² de terres forestières dans le Haut-Katanga suite aux changements de l’hydrologie et la charge sédimentaire en aval de la rivière. « Le barrage est un obstacle physique aux migrations longitudinales de poissons », a souligné Justicia.

Pour elle, les deux grandes spoliations que sont le Ranch Kundelungu et le barrage de Sombwe constituent un grand préjudice pour le pays, qui ne démontre pas sa capacité à conserver les aires protégées en raison des espèces animales et végétales rares qui s’y trouvent, alors que cette zone est classée comme aire protégée de la catégorie II des parcs nationaux.

Des actions urgentes pour sauver les deux aires protégées

Pour sauver des deux aires protégées, Justicia recommande au chef de l’Etat d’ordonner notamment la cessation de toutes les activités en rapport avec l’érection de cette centrale hydroélectrique, la mise en place de l’Agence congolaise de transition écologique et du développement durable, qui renforcerait l’ICCN. Le chef de l’Etat est également exhorté à la mise en place d’une commission mixte composée des responsables des acteurs de la société civile et responsables de l’ICCN et des experts nationaux, d’une part, la résolution des conflits entre les communautés et les parcs, de l’autre, pour que les parcs retrouvent leur patrimoine original, à veiller à ce que la ferme Espoir, située dans la zone annexe du parc de Kundelungu, soit contenue dans ses limites traditionnellement occupées par la ferme SGA, et de mettre à la disposition de la justice le directeur général de l’ICCN sortant et autres agents qui se sont compromis dans la gestion de toutes les aires protégées du pays.

A l’Assemblée nationale, cette ONG a recommandé de renforcer les engagements juridiques, politiques, sociaux et culturels du pays pour contribuer à la protection  intégrale des aires protégées face à la perte d’habitat et la destruction des forêts. Le gouvernement congolais, lui, a été appelé à procéder à la suspension de la barrière érigée au sein du parc de Kundelungu par la ferme Espoir, car constituant un empiètement au préjudice de l’Etat congolais, de développer une économie durable fondée sur le tourisme et les autres alternatives économiques existantes qui proviennent des services écosystémiques conservés dans les aires protégées, etc.

Affirmant que le monitoring présenté était un travail préliminaire, qui pourrait être suivi par un travail plus approfondi, Justica a adressé certaines autres recommandations à l’Agence congolaise de lutte contre la corruption, aux procureurs généraux du Haut-Katanga, Haut-Lomami et Lualaba, aux responsables de l’ICCN, à la société civile ainsi qu’aux partenaires internationaux.

Lucien Dianzenza

Légendes et crédits photo : 

Me Timothée Mbuya lors de la conférence de presse/Adiac

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