Interview. Gina Efonge : « Millésimes est une surprise agréable pour les mélomanes »

Lundi 25 Octobre 2021 - 15:45

Abonnez-vous

  • Augmenter
  • Normal

Current Size: 100%

Version imprimable

De son vrai nom Jean-Pierre Corneille Efonge, le poète Efonge Gina wa Gina, plus connu sous le pseudonyme de Gina Efonge, est un auteur compositeur- chanteur- interprète. Grand nom de la musique africaine et particulièrement une référence pour la République démocratique du Congo (RDC), cet ancien sociétaire de Zaïko Langa Langa s’apprête à mettre sur le marché du disque un opus intitulé « Millésimes ». Dans une interview exclusive accordée aux Dépêches de Brazzaville, Gina Efonge revient sur sa carrière musicale, témoigne de sa cohabitation avec son collègue, grand frère et ami Jules Shungu Wembadio dit Papa Wemba.  Entretien. 

Les Dépêches de Brazzaville (L.D.B.) : Les amoureux de la bonne musique ont connu Gina Efonge courant la décennie 1970. Pourriez-vous nous parler de vous et nous retracer votre parcours musical ?

Gina Efonge (G.E.) : Je suis Efonge Gina wa Gina, auteur compositeur- chanteur- interprète- icône de la musique africaine. Né le 13 mai 1953, c’est tout jeune que j’ai commencé ma carrière musicale dans l’éloignement de la délinquance juvénile sur les bancs de l’école, ce, dans la joie et le respect. Mon premier groupe musical des jeunes étudiants fut le Maps Iyambole dirigé par (feus) Toussaint Bobabo Engombe et Hugues Lutula à la commune de la Gombe. C’est en 1970 que Zaïko Langa Langa a fait appel à moi. J’ai d’abord hésité pour des raisons qui m’étaient propres. En effet, vivant dans un quartier huppé de Kinshasa (Kalina actuel Gombe), mes parents, très stricts qu’ils étaient, n’acceptaient pas que je fasse de la musique qu’ils considéraient à l’époque comme l’affaire des voyous, surtout pour moi qui partait à l’école. Finalement, c’est après que j’ai accepté d’intégrer Zaïko. Je tiens à vous informer aussi que je suis le gendre de Grand Kalle “Djef”.

L.D.B. : Que gardez-vous de Zaïko Langa Langa ?

G.E. : Je garde des merveilles. Au sein de Zaïko, j’ai apporté un autre style de chant, les nuances, puis les textes poétiques. L’une de mes premières chansons titrée "Consolation", parue à l’époque aux éditions Poulidor Philips, a créé une autre image du groupe. Et du coup, mes collègues ont été influencés et inspirés par mon écriture. Cette chanson honorifique se trouve actuellement dans le musée royal de l’Afrique centrale à Tervurenen, en Belgique. Pépé Fely Manuaku (artiste-guitariste), Manda Tshebwa (chroniqueur culturel) et Michel Kabeya (homme politique de la République démocratique du Congo) en sont les témoins. Mon autobiographie met en exergue mon écriture, ma composition, ma voix, ma musique, à travers mes chansons "Yo nalinga" ; "BP ya munu" ; "Mandanda" ; "Débat" (un succès du groupe TG Libanko) ; et tant d’autres. Mon interaction durable avec le public, la scène, la radio, la télévision, jusqu’à ce jour a toutes les exigences qui lui sont propres. Je parle là du charisme, la manière dont un artiste doit se positionner devant le public, à la télévision, ... Ça vient de moi et tous les mélomanes le savent.

L.D.B. : A quel moment aviez-vous monté le groupe TG Libanko ?

G.E. : Je l’ai formé en 1978 tout en étant dans Zaïko Langa Langa avec mes collègues du groupe avant de recruter les jeunes par la suite. C’est ce qu’on appelle actuellement par le “nzonzing”. Au sein de TG Libanko, nous étions avec Grand-père Bozi Boziana, Mbuta Matima, Djo Mali, Meridjo, Chimita, Monza 1er, Djo El, … Malheureusement, quand le groupe a commencé à connaître un succès fou, mes collègues ont désisté. C’est après leur désistement que je me suis rendu en Europe pour poursuivre mes études grâce à l’appui de mon ami Jean Paul Niwa Mobutu et son cousin Thomas Tonzombo, tous décédés, paix à leurs âmes.

L.D.B. : Comment gériez-vous l’adversité au sein de Zaïko Langa Langa avec des artistes talentueux comme Evoloko Jocker, Papa Wemba et autres ?

G.E. : Entre nous, l’adversité n’existait pas, le respect était réciproque. A cette époque, c’est le public et la presse qui désignaient les leaders, ça ne venait pas de nous-mêmes. Il y avait une bonne équipe. Papa Wemba, par exemple, m’appelait papa na “Coco” et moi je l’appelais papa na “Cady”.

L.D.B. : Aviez-vous arrêté avec la musique ou vous l’exercez toujours ?

G.E. : De temps en temps, je me produis avec mes anciens collègues de Zaïko Langa Langa. Nous (Papa Wemba, Evoloko, Bozi Boziana, Pepe Fely Manuaku et moi-même) avions même formé un groupe appelé Le Quatro de Langa Langa sous la direction de Sec Bidens. Je me produis aussi avec mes artistes musiciens en Europe (Bruxelles, Paris, Londres). En 2008, le pays a fait appel à moi, j’ai été nommé conseiller culturel et chargé d’études au cabinet du ministre des Arts et Culture de la RDC de cette époque, feu ministre Malenso. Actuellement, je suis presque à la fin de mon album solo intitulé « Millésimes ». J’ai pris tout mon temps à composer cet opus qui est attendu pour bientôt. « Millésimes » est une surprise agréable pour les mélomanes. Ils vont bien le savourer.

L.D.B. : Le 24 avril 2016, le monde musical est frappé par la mort de Papa Wemba sur scène à Abidjan (Côte d’Ivoire). Dans quel état vous vous trouvez lorsque vous aviez appris cette triste nouvelle ?

G.E. : La mauvaise nouvelle du 24 avril 2016, je l’ai sue par un autre frère musicien, le grand-père Bozi Boziana. C’est lui qui m’a réveillé très tôt le matin de ce jour là pour m’annoncer la mort de Papa Wemba. Seul dans mon lit, j’ai déversé les larmes comme vous ne pouvez pas comprendre. Une grande partie de mon histoire venait de partir, un parent, un grand-frère, un compagnon de la chanson. On n’y peut rien, le bon Dieu a décidé ainsi. C’est lui qui donne et c’est lui qui reprend. Paix à son âme.

L.D.B. : Depuis un certain temps, la toile ne cesse d’être alimentée par une éventuelle mort de Gina Efonge alors que vous êtes bien vivant. Qui est à l’origine de ces balivernes et pourquoi ?

G.E. :  Je dirai seulement une chose, à celles et ceux qui m’enterrent vivant, sachez bien que mon heure n’est pas encore arrivée. Vous êtes en train de creuser vos propres trous. Dieu le Père est au contrôle et écoute ma chanson "Mandanda".

L.D.B. : Quelle est votre appréciation de la musique d’aujourd’hui et quel votre apport dans la musique congolaise ?

G.E. : La différence de la musique d’aujourd’hui et la nôtre, c’est le manque de fond sur les textes, mais en général les jeunes font tous pareil. Il y a trop de plagiat dans la musique actuelle. Nos mœurs sont bafouées, la musique est devenue pornographique. C’est le moment de recadrer ces jeunes pourtant talentueux. Quant à mon apport, je dirai que j’ai formé dans l’authenticité une école de chant d’où sont sortis des grands chanteurs congolais à l’instar de King Kester Emeneya, Grand père Bozi Boziana, Koffi Olomide, Monza 1er, Joly Mubiala, Luciana de Mingongo, Marie Paul, etc… Je me suis distingué par ma création dans le domaine artistique, j’ai francisé mes textes dans la chanson congolaise.

L.D.B. : Un message aux lecteurs des Dépêches de Brazzaville

G.E. : Je dis aux lecteurs des Dépêches de Brazzaville que je serai toujours là tant que le besoin y sera pour vous informer de mon actualité. Je vous informe de nouveau que l’album « Millésimes » arrive pour les fêtes de fin d’année.

Bruno Okokana

Légendes et crédits photo : 

1 et 2 : Le poète Efonge Gina wa Gina /DR

Notification: 

Non