Lubumbashi : la société civile dénonce l’instrumentalisation de la justice

Samedi 8 Janvier 2022 - 15:15

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L’action dénoncée serait matérialisée par l’introduction de la citation directe par la société Ferme espoir Sarl devant le tribunal de paix Lubumbashi/Kamalondo contre un des dirigeants de Justicia Asbl, Me Timothée Mbuya, après le rapport publié le 30 septembre 2021 intitulé « Spoliation des parcs Upemba et Kundelungu : graves risques de la perte des espèces animales et violations des droits environnementaux ».

Dans un appel du 6 janvier, la société civile congolaise oeuvrant dans la promotion et la protection des droits humains et spécifiquement les droits environnementaux, se dit préoccupée par « l’action visant à pousser l’Etat vers une attitude d’un acharnement judiciaire ».

Ceci serait matérialisé par l’introduction de la citation directe sous RP 10566/CD par la société Ferme espoir Sarl devant le tribunal de paix Lubumbashi/Kamalondo contre un des dirigeants de Justicia Asbl, Me Timothée Mbuya, après que celle-ci a publié, le 30 septembre 2021, le rapport intitulé « Spoliation des parcs Upemba et Kundelungu : graves risques de la perte des espèces animales et violations des droits environnementaux ».

La société civile fait savoir, en effet, qu’en début de l’année dernière, conformément  aux mandats et aux devoirs constitutionnels reconnus aux associations sans but lucratif et dans son apport à l’action gouvernementale, Justicia Asbl s’est lancée dans un monitoring de la situation des parcs nationaux de l’Upemba et des Kundelungu qui se trouvent dans la province du Haut-Katanga.

Ces activités ont relevé des faits démontrant que les étendues de ces aires protégées identifiées seraient spoliées au profit des concessions privées, en l’occurrence la société Ferme espoir Sarl dans le Parc national des Kundelungu, dont le propriétaire est l’ancien président Joseph Kabila, et l’entreprise Kipay Investiment dans le Parc national de l’Upemba, où un barrage est au point d’être construit, en violation des dispositions légales se rapportant à la conservation de la nature et autres engagements internationaux sur la justice climatique.

La société civile indique, par ailleurs, qu’à la suite de ces graves révélations, la société Ferme espoir Sarl aurait distillé ses menaces en demandant à Justicia Asbl de faire un démenti dans un délai de sept jours, sans lequel une action judiciaire allait être amorcée contre Me Timothée Mbuya personnellement pour diffamation et ce, sans toutefois attendre les conclusions des missions de vérifications faites par les services techniques déployés dans la zone pour faire appliquer  la loi n° 14- 003 du 11 février 2014 relative à la conservation de la nature.

Elle dit constater un retard dans la prise de décision par les autorités compétentes pour que ces deux parcs entrent dans leurs droits, et estiment en plus que cette attitude a ouvert une brèche à la société Ferme espoir Sarl pour  poursuivre avec ses menaces, en saisissant trois mois plus tard le tribunal de paix Lubumbashi/Kamalondo, à travers une citation directe contre Me Mbuya, pour diffamation et dont la première audience intervient ce 10 janvier.

Disant garder foi en la justice du pays, la société civile se demande, par ailleurs, les vraies motivations et la gymnastique procédurale qui a fait que Me Mbuya soit cité sur la base des faits non démentis ni désapprouvés par les services habilités, et contenus dans un rapport dont l’auteur est bien connu, identifié et assumant son rapport pour lequel la production n’est pas un acte délictueux.

Ceci voudrait dire que le tribunal sera forcé de poursuivre le cité en violation des textes légaux. « En l’espèce, nul acte infractionnel n’est reprochable à Me Timothée Mbuya et que le tribunal se fait piéger par une citation directe sans incrimination et en laquelle on fait l’apologie d’un rapport qui est le moyen légalement reconnu aux associations sans but lucratif pour s’exprimer et contribuer à l’action gouvernementale », a souligné la société civile. Il s’agit, selon elle, d’une action d’intimidation et de chantage visant à amener la justice vers une procédure anticonstitutionnelle d’acharnement contre un innocent pour décourager le bon travail pour la protection de la nature.

Alerte pour des actions légales des autorités

Tout en saluant le courage et le sens d’engagement de Justicia pour faire ce travail en appui aux efforts fournis par le gouvernement à qui incombe la charge de la protection de l’environnement, la société civile soutient, en plus, les résultats du rapport de monitoring de Justicia Asbl alertant pour une action contre les spoliations décriées dans les parcs nationaux de l’Upemba et des Kundelungu.

Elle recommande au vice-Premier ministre et ministre  de l’Environnement de prendre des mesures conservatoires contre les sociétés Ferme espoir Sarl et Kipay Investiment au regard des révélations faites par Justicia Asbl pour la préservation de l’environnement et y déployer une mission technique pour établir les faits et tirer les conséquences légales.

Et de solliciter des ministres des Droits humains et de la Justice et garde des sceaux, de s’investir dans le traitement de ce dossier pour que les droits reconnus à Me Timothée Mbuya, en tant que défenseur des droits humains environnementaux et citoyens congolais, ne soient pas violés.

Il est demandé, par ailleurs, au gouverneur de la province du Haut-Katanga de garantir la sécurité des acteurs de la société civile et/ou des défenseurs des droits humains ; de s’impliquer dans le dossier pour mettre fin à la spoliation des aires protégées et à la poursuite judiciaire contre les dénonciateurs.

Il est attendu du procureur général près la Cour d’appel du Haut-Katanga de se saisir d’office des révélations faites par Justicia Asbl dans son rapport afin d’ouvrir des enquêtes sérieuses qui vont permettre à l’Etat congolais de rentrer dans ses droits en tant que propriétaire des aires protégées et de permettre à la juridiction compétente de confirmer l’invalidité des droits superposés sur les espaces protégées occupés en violation de la loi.

Aux juges du tribunal de paix Lubumbashi-Kamalondo, il est conseillé de ne pas céder à toute forme de pression lors de l’instruction de cette affaire pour faire valoir la volonté de la loi et les valeurs coulées en engagement prôné par le chef de l’Etat, etc.

Lucien Dianzenza

Légendes et crédits photo : 

Me Thimotée Mbuya

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