Force publique : Colonel Bellarmin Ndongui : « La nouvelle loi redistribue les cartes entre la gendarmerie et la police »

Samedi 17 Mai 2014 - 14:30

Abonnez-vous

  • Augmenter
  • Normal

Current Size: 100%

Version imprimable

Il ya quelques jours, le Parlement congolais venait de voter la loi d’orientation et de programmation de la Force publique. Initiée par le gouvernement, celle-ci annonce la modernisation de la Force publique en même temps qu'elle définit les missions de chaque entité appelée à sécuriser le pays et la population. Le Colonel Bellarmin Ndongui, commandant en second, chef d’état-major de la gendarmerie nationale apporte un éclaraige sur certaines zones d'ombre. Interview

Les Dépêches de Brazzaville (LDB) :  Le Sénat vient de voter la loi de programmation de la force publique qui soulève déjà une sorte de rumeur sur les zones de compétence de la gendarmerie et de la police. De quoi s’agit-il réellement ?

Bellarmin Ndongui (BN). Notre pays a un système de sécurité intérieure dual constituée de la Police nationale et de la Gendarmerie nationale. La Constitution du 20 janvier 2002 établit que les deux entités ont les mêmes missions. Ainsi, il arrive parfois, sinon trop souvent, que la Police et la Gendarmerie se retrouvent sur les mêmes territoires avec les mêmes contraintes infrastructurelles, logistiques, d’effectif… Ce qui fait que l’ensemble du territoire de la République ne soit pas suffisamment couvert par les uns et par les autres. C’est donc par stratégie de repositionnement de ce dispositif que nous avons mis en exergue la notion de répartition de compétences territoriales dans certaines missions.

Cela dit, les unités de la Gendarmerie territoriale implantées dans les agglomérations ayant le statut de chef-lieu de département devraient céder la place aux unités de Police notamment les commissariats. Cependant, les unités spécialisées, la gendarmerie mobile, les structures de commandement qu’elles soient territoriales ou mobiles seront, quant à elles, implantées indépendamment de cette répartition en fonction des opportunités qui se présenteront en termes de casernes ou de cohérence de notre  dispositif sur l’ensemble du territoire.

LDB : C’est finalement cette question de la programmation qui influence de nombreux discours du Commandant de la gendarmerie qui annonce d’importantes réformes structurelles ?

BN. Bien entendu ! Mais il faut aussi souligner que la loi elle-même a été inspirée par la réflexion qui rejaillit dans les discours du Commandant de la gendarmerie puisque c’est nous qui sommes auteurs de cette loi étant donné la vision que nous avons sur ce qui doit caractériser la Gendarmerie de demain à travers notre activité missionnelle, notre efficacité opérationnelle, la refondation de toutes les normes techniques de fonctionnement et de la méthode de management que le Commandement de la gendarmerie va mener à partir de cette année.

LDB. Les programmes pédagogiques de l’école de la gendarmerie nationale sont-elles visées par ce train de réformes ?

BN. Les métiers du gendarme, à la sortie de toute formation, évoluent jour après jour, avec des réalités actuelles de notre société où l’on parle désormais de cybercriminalité avec le développement des technologies de l’information et autres. Pour ne pas être en marge de ces évolutions, nous avons l’obligation de refonder la formation pour qu’elle devienne modulaire et qu’elle réponde à chaque besoin d’emploi à la sortie de l’école pour que le gendarme congolais soit capable d’assumer, par exemple, les fonctions d’enquêteur, de secrétaire, d’agent de l’ordre public et de sécurité.

LDB : Sur la base de la loi de programmation, quel avenir donnez-vous à l’organisation des gendarmeries spécialisées pour lesquelles gendarmes et policiers se partagent les mêmes espaces ?

BN. À propos des gendarmeries spécialisées, il s’agit principalement de la gendarmerie des transports aériens qui assure la sécurité dans les aéroports et de la gendarmerie ferroviaire qui sécurise les emprises du chemin de fer et les voyageurs dans les trains. Demain nous aurons peut-être la gendarmerie maritime et fluviale car nous sommes en train de nous organiser pour appuyer le dispositif de sécurité maritime qui se développe au niveau de l’Afrique centrale. Toutes ces gendarmeries spécialisées œuvrent dans la zone géographique que nous partageons avec la Police nationale. Et là, le principe est simple : il y a une répartition territoriale en zone dite réservée. Celle sur laquelle sont stationnés les trains, les aéronefs, les bateaux… et il y a une zone publique dite internationale dans laquelle on gère les voyageurs avec toutes les formalités d’immigration qui reviennent naturellement aux Services de la police nationale.

En clair, ce type de convergence est, sans nul doute, l’un des plus grands exemples que nous puissions donner de l’interdépendance entre la Gendarmerie et les services de police. La notion de répartition des compétences est donc pour nous non pas une séparation mais plutôt un repositionnement et une redistribution des cartes pour l’intérêt supérieur de la Nation.

Propos recueillis par Rominique Nerplat Makaya

Légendes et crédits photo : 

Photo : le commandant en second de la gendarmerie crédit photo Adiac