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La prise de notes

Samedi 24 Décembre 2022 - 15:45

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Dans l’art d’éduquer par le rire que cultive le Parlement éponyme installé à Abidjan, la capitale économique ivoirienne, il est une séquence anodine mais très parlante : la prise de notes. La répartie travaillée, deux vice-présidents bien dans leur élément encadrant une vice-présidente dotée d’une mimique renversante exercent sous l’arbitrage du premier d’entre eux, haut perché sur son beau fauteuil. Mais quel propos le président « à vie » et ses adjoints aux mandats renouvelés de cette institution très en vue sur le petit écran consignent-ils à longueur de séances si animées ? Peut-être pas grand-chose, mais ils le font avec une telle assiduité que l'on se demande si les casiers pour placer les archives, et même le lieu de les emmagasiner ne viendront pas à manquer.

A l’annonce d’une affaire soumise à leur examen sous le regard bienveillant de la joyeuse assistance, les quatre parlementaires du rire notent, notent et toujours notent dans leurs carnets, ne prenant la pause qu’au moment où un de leurs invités anime la partie. Ils retournent aussitôt à leur tâche avec beaucoup de sérieux, comme pour signifier qu’à l’instar d'autres parlements à travers notre vaste monde, le leur n’arrête pas de légiférer pour le bonheur de la population. Celle du fameux Gondwana, leur république présentée comme « très » démocratique, sans doute constituée d’hommes et de femmes qui remplissent l’hémicycle à chaque séance, et probablement aussi de nombreuses diasporas agrippées au programme de diffusion de leur réunion publique.

Et les affaires ne manquent pas : chacun des invités en propose toujours une pour arracher l’adhésion des autres parlementaires sans doute aussi le sourire des téléspectateurs, le temps qu’une standing ovation marque l’intermède, que les stylos se vident de leur encre, les carnets et autres papiers volants ne noircissent. On en apprend sur la vie aux quatre coins de l’Afrique, en comparaison de ce qui se passe hors du continent ; on cahute corrompus et corrupteurs, on range les rancœurs au loin pour guérir et non pas souffrir de rire. Les quatre membres du Parlement de la dérision ont réussi à s’imposer et à imposer leur présence dans la conscience collective. Individuellement ou collectivement, ils reçoivent des invitations pour égayer les retrouvailles en Afrique et ailleurs, leur label prospère tellement que de nombreux pays ont créé des succursales à partir desquelles sont formés de jeunes talents du rire.

Sans prétendre être à l’origine de l’envie de rire qui est une chose naturelle et vieille comme le monde, nos excellents parlementaires du Gondwana, comme bien d’autres artistes de ce métier, se savent utiles à la société car bien sûr, et cela est dit plus haut, rire guérit ! Ne pas oublier cependant de continuer à prendre note. 

Gankama N’Siah

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Édition Quotidienne (DB)

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