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L’Afrique face aux questions de santé publique liées au climat

Vendredi 3 Février 2023 - 11:57

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Le train de la COP28 a été mis en marche par les Emirats arabes unis qui vont accueillir l’événement cette année.  L’Afrique qui a été l’hôte de la COP27 est sortie de cette grand-messe totalement déçue des conclusions et des décisions prises en Egypte, notamment concernant le manque d’engagement plus important des pays pollueurs.

Pourtant, le constat fait depuis des années par tous les observateurs et analystes des questions climatiques est bien clair : le continent africain qui contribue pour moins de 4% aux émissions mondiales de gaz à effet de serre ne cesse de subir les lourds impacts du changement climatique. On en veut pour preuve, la multiplication des événements de santé publique dus au climat. Le continent qui pollue le moins la planète est celui qui subit de plein fouet les effets des catastrophes naturelles, des fortes chaleurs et de l’insécurité alimentaire.

Le changement climatique menace d’exposer jusqu’à 118 millions d’Africains parmi les plus pauvres à des sécheresses, des inondations et des chaleurs extrêmes d’ici à 2030, prévoit la Commission économique des Nations unies pour l’Afrique. Déjà, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) relève une hausse rapide des urgences sanitaires en Afrique liées au climat. En 2022, les inondations ont frappé plus de trois millions de personnes en Afrique de l’Ouest et centrale. Le changement climatique renforce les maladies hydriques telles que la diarrhée, le choléra et à transmission vectorielle, comme le paludisme et la dengue. Lors des deux dernières décennies, les maladies hydriques ont représenté 40 % des urgences sanitaires liées au climat, les maladies à transmission vectorielle 28 %, prévient l’OMS.

Entre 2012 et 2021, la durée de transmissibilité du paludisme aurait ainsi augmenté de 14,9 % en Afrique et le risque de transmission de la dengue par les moustiques a augmenté de 6 % par rapport à la période 1951-1960, selon le rapport « Lancet Countdown 2022 ».

Au-dessus de 2°C de réchauffement climatique, la distribution et la transmission saisonnière des maladies à transmission vectorielle devraient continuer d’augmenter, prévoit de son côté le 6e rapport du Groupe international d’experts sur le climat (GIEC). Cela exposera des dizaines de millions de personnes supplémentaires à ce risque, principalement en Afrique occidentale, orientale et australe.

Dans une Afrique qui souffre de plus en plus de la chaleur, la production agricole chute également, ce qui alimente la malnutrition et la faim. La productivité agricole a déjà baissé de 34% depuis 1961 à cause du changement climatique. C’est la plus grande baisse mondiale. En 2021, 278 millions de personnes ont fait face à la faim en Afrique selon l’ONU, soit une personne sur cinq. Environ 98 millions de personnes souffraient d’insécurité alimentaire aiguë et avaient besoin d’une aide humanitaire. Afin de réduire au mieux les risques liés au changement climatique, l’ONU et l’OMS recommandent d’arrêter les nouvelles prospections et subventions aux carburants fossiles, de taxer les pays pollueurs et de trouver de nouveaux financements pour l’atténuation et l’adaptation. En particulier, la plupart des maladies diarrhéiques pourraient être évitées grâce au développement des stations d’épuration et de l’eau potable.

Le GIEC soulève aussi l’utilité des systèmes d’alerte précoce qui peuvent protéger contre les effets des phénomènes météorologiques extrêmes et du changement climatique. À l’heure actuelle, seulement 40 % de la population africaine a accès à de tels systèmes.

Enfin, sur plus de 100 centres urbains en Afrique, seuls 17 % sont classés comme modérément verts ou plus. Le rapport « Lancet Countdown » invite à une refonte urbaine qui donne la priorité à la santé. Celle-ci fournirait davantage d’espaces verts afin de réduire la chaleur urbaine, améliorerait la qualité de l’air et serait bénéfique pour la santé physique et mentale.

Mais tout ce chapelet de mesures ne peut être mis en place que si les pays les plus pollueurs passent enfin à la caisse.

 

Boris Kharl Ebaka

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