Crise égyptienne : les dirigeants arabes soutiennent les autorités intérimaires

Vendredi 16 Août 2013 - 17:03

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Si la communauté internationale a condamné les violences qui se sont soldées par la perte de nombreuses vies humaines et craint la guerre civile dans ce pays, les monarchies et autres pays de cette région sont au contraire déterminés à apporter leur soutien plus ou moins voilé aux autorités intérimaires égyptiennes

Plusieurs observateurs estiment que la plupart des dirigeants du monde arabe ont pris une telle position parce qu’ils voient dans le coup de force ayant permis de déloger les sit-in des Frères musulmans un coup d’arrêt à la menace que représente cette confrérie pour leur pouvoir. « Toutes les monarchies du Golfe, à l’exception du Qatar, ainsi que la Jordanie et d’autres pays arabes craignaient l’exportation de la révolution des Frères musulmans chez eux. C’est pour cela qu’elles ont misé sur un retour au schéma classique d’un pouvoir fort en Égypte, pays pivot du monde arabe », a fait remarquer par exemple Khattar Abou Diab, professeur à Paris-Sud.

D’autres analystes de la situation dans ce pays estiment que les Saoudiens et Émiratis tireront profit de la chute de Morsi. « Ryad et Abou Dhabi ont été ravis du coup d’État militaire qui profite à leurs intérêts régionaux et qui porte un coup à leurs plus dangereux opposants que sont les Frères musulmans », a expliqué l’un d’eux. Et de poursuivre qu’en dépit de la complexité de la situation dans ce pays,  les gagnants seront sans doute l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis, principaux parrains du nouveau pouvoir en Égypte, au détriment du Qatar et des Frères musulmans.

Selon certains experts, l’Arabie saoudite et les Émirats pensent que les Frères musulmans ont « une ambition régionale qui peut être un danger pour les monarchies du Golfe ». « Ces monarchies estiment que leur intérêt est d’avoir plutôt des dictatures que des régimes démocratiques qui sont trop instables et imprévisibles à leurs yeux », a précisé Shadi Hamid, expert du Moyen-Orient auprès du Brookings Doha Center.

Rappelons que l’Arabie saoudite et les Frères musulmans ont entretenu de bonnes relations pendant une trentaine d’années. Celles-ci se sont dégradées lors de la guerre du Golfe quand la confrérie critiqua les Saoudiens pour avoir accepté des bases américaines sur leur territoire, mais aussi et surtout après les attentats du 11 septembre 2011 aux États-Unis.

Le coup de force contre les pro-Morsi a suscité de nombreuses réactions. Le président français a convoqué l’ambassadeur d’Égypte, Mohamed Moustafa Kamal, afin de lui faire passer le message que « tout doit être mis en œuvre pour éviter la guerre civile ». Son homologue américain, Barack Obama, a décidé d’annuler les manœuvres militaires conjointes prévues pour le mois de septembre, soulignant que la « coopération habituelle avec l’Égypte ne pouvait pas continuer comme si de rien n’était… » Il a en outre réclamé la levée de l’état d’urgence et la mise en place d’un processus de réconciliation nationale. L’Union africaine, le secrétaire général de l’ONU, l’Allemagne, l’Italie, pour ne citer que ces exemples, ont appelé à « la retenue » des parties concernées en Égypte.

Le bilan officiel des violences ayant commencé le 14 août fait état de  plus de 600 morts et quelques 3 500 blessés dans tout le pays. Les Frères musulmans, quant à eux, disent que plus de 2 000 personnes sont mortes et 10 000 autres ont été blessées durant ces événements. Ces violences ont eu lieu lorsque les forces de l’ordre ont lancé leur assaut à l’aide de bulldozers sur les places Rabaa al-Adawiya et Nahda, au Caire, où campaient depuis plus d’un mois des milliers d’islamistes venus avec femmes et enfants pour réclamer le retour de Mohamed Morsi, destitué et arrêté par l’armée le 3 juillet.

Depuis la chute de ce président égyptien issu des Frères musulmans, les monarchies du Golfe se sont pressées au chevet de l’Égypte : l’Arabie saoudite, les Émirats arabes, le Koweït ont annoncé une aide de 12 milliards de dollars pour aider l’Égypte à sortir de son état actuel de quasi-faillite mais aussi pour y soutenir la transition.

Nestor N'Gampoula