Diversification économique : des défis à relever 60 ans après

Vendredi 14 Août 2020 - 13:30

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Six décennies après son indépendance acquise en 1960, la République du Congo peine encore, malgré ses atouts naturels et sa population en majorité jeune, à diversifier son économie jusqu’ici fortement dépendante du pétrole qui représente 60% du PIB, 70% des recettes budgétaires et 90% des exportations.

 « Nous ne devons plus être, à chaque fois comme aujourd’hui et par le passé, victimes des fluctuations des prix d’une ressource, fût-elle stratégique », déclarait le président Denis Sassou N’Guesso le 14 août 2019 dans son message à la nation à l’occasion du 59e anniversaire de l’indépendance. Face à l’instabilité de cette ressource naturelle, il invitait, par la même occasion, le gouvernement à se tourner vers la politique économique axée sur la diversification de l’économie. Une ambition nourrie par plusieurs projets dont certains tardent à se concrétiser.

En effet, plus d’un demi-siècle après, la diversification économique qui a pourtant connu, dans les années 60, un début d’essor cherche toujours à se frayer un chemin à travers un modèle économique soutenu par la promotion du secteur hors pétrole dont l’agriculture qui a permis au pays, à cette époque, de satisfaire, tant soit peu ses besoins de base. A ce jour, le pays réalise qu’il dépend des importations estimées à environ 600 milliards de francs CFA par an.

Bien qu’affichant une volonté de tourner le dos aux seuls hydrocarbures, le Congo est encore à la quête d’une synergie entre le secteur pétrolier et le secteur hors pétrole, qui se heurte au défi des contraintes prioritaires au développement du secteur privé. 

Avec un potentiel agricole que lui confère des atouts physiques (climat, pluviométrie, variations saisonnières, sols, végétation, hydrographie...), le Congo qui dispose plus de 10 millions hectares de terres arables peut développer une grande variété et richesse de cultures équatoriales et tropicales, qu’elles soient pérennes ou saisonnières. Un avantage majeur pour asseoir véritablement la diversification de son économie.

Infrastructures : le pari gagné de l’unification physique du pays

Quoique plusieurs défis se dressent encore sur le chemin du développement et de l’émergence fixée à l’horizon 2025, la République du Congo peut au moins se targuer d’avoir réussi de sortir de l’isolement les populations avec la construction des infrastructures routières reliant la Côte atlantique au nord du pays, de l’est à l’ouest et aussi avec certains pays voisins (Gabon et Cameroun).

Entamée en 1982 avec le plan quinquennal, un programme basé sur la construction des infrastructures routières et des ouvrages de franchissement, l’unification physique du Congo s’est renforcée avec le programme de municipalisations accélérées qui a su rendre effective, à partir de 2006, la libre circulation des personnes et des biens à l’intérieur du pays. Grâce à ce programme, le pays s’est doté des aéroports modernes dont trois de type international et six de type « B », un atout de taille qui a ouvert le Congo au reste du monde tant ses infrastructures aéroportuaires peuvent accueillir des avions de type Boeing 737.

La difficile marche vers l’industrialisation

En 60 ans d’indépendance, l’industrialisation du Congo, en dépit de prémices des années 60 qui vit naître quelques industries, demeure encore le maillon faible au regard des échecs constatés dans certaines initiatives, notamment dans les secteurs des mines et de la forêt où seules les industries du ciment et du bois ont pu émerger ces dernières années.

S’agissant de la métallurgie, hormis la SOREMI à Mfouati (dans le département de la Bouenza) spécialisée dans le traitement des polymétaux, ainsi que le projet du complexe industriel de Maloukou, plusieurs autres projets destinés à booster l’industrialisation du Congo ont été voués à l’échec du fait de la crise économique. On peut citer parmi ceux-ci les projets de la potasse de Pointe-Noire, du fer de Mayoko et de Zanaga, et bien d’autres identifiés à travers le pays.

Certes le secteur industriel reste encore très faible en dehors de l’exploitation pétrolière, il n’en demeure pas que le Congo offre de réelles perspectives de développement industriel aussi bien pour ses besoins internes que pour d’autres pays.

Même si le pays ne dispose pas de grandes réserves minières de taille mondiale excepté le fer, il est du moins capable, avec la volonté affirmée, de s’investir rigoureusement dans l’industrie alimentaire et agroalimentaire, grâce aux potentialités prouvées de son agriculture, de son élevage et de ses ressources halieutiques. A à ce sujet, la relance des filières huilières (palme, palmiste, arachide) constituerait un des axes porteurs, avec des dérivés industriels connus.

Par ailleurs, l’industrie des biens de consommation qu’ils soient directs ou durables (textile, chimie, etc.); l’industrie de pâte à papier, grâce au savoir-faire accumulé en amont dans le développement des plantations des essences à croissance rapide, comme dans le renouvellement et l’extension des massifs forestiers s’avèrent également un secteur auquel le Congo peut compter pour son industrialisation.

L’énergie, le maillon faible

Avec une production énergétique de moins de 1000 mégawatts à ce jour, le Congo n’a pu réaliser en totalité son projet de boulevard énergétique, en témoigne le faible pourcentage de la population ayant accès à l’électricité, soit 47% en zone urbaine et 5% en milieu rural, selon une étude du Pnud sur la vulnérabilité de l’économie congolaise et ses perspectives de diversification.  

En effet, la production et la distribution de l’énergie électrique sont encore faibles dans le pays. Le potentiel de production hydroélectrique évalué à 2500 MW demeure sous exploité pour satisfaire les besoins nationaux en énergie. 

Au-delà des atouts en ressources énergétiques dont principalement le gaz qui a permis au pays de renforcer, à travers la Centrale électrique du Congo, sa capacité de production électrique, le Congo accuse encore un deficit en énergie, ce qui suppose la construction de mégastructures, à l’image du barrage de Sounda, pour une production à grande échelle de l’électricité même à des fins d’exportation.

Guy-Gervais Kitina

Légendes et crédits photo : 

1° La route N°1 reliant la Côte atlantique au nord Congo; 2° L'aéroport de Maya-Maya, une fenêtre qui ouvre le Congo à l'international; 3° L'industrie du ciment, un modèle réussi de l''industrialisation /Adiac -Guy-Gervais Kitina

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