Grande-Bretagne/ Covid-19 : les anciens Premiers ministres opposés à la ponction de l'aide au développement

Lundi 30 Novembre 2020 - 11:42

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Le Royaume-Uni envisage de revoir ses engagements en matière d'aide au développement à cause de la pandémie de Covid-19 et son budget Défense. Ce qui est une menace « soft power » britannique " une erreur morale, stratégique et politique". La ministre des Dom-Tom et du Développement durable, Elisabeth Sugg, a démissionné. La perspective d'une rébellion contre le gouvernement n'est pas exclue.

De nouveaux arbitrages budgétaires menacent les engagements de la Grande-Bretagne en matière d'aide au développement. Cité comme modèle, le Royaume-Uni est le seul pays du G7 à consacrer 0,7% de son PNB à l'aide au développement. La Grande-Bretagne a annoncé un investissement supplémentaire de 24,1 milliards de livres dans la Défense.

Son Premier ministre, Boris Johnson, entend tailler dans l'aide internationale pour préserver le budget du pays, déjà entamé par des dépenses liées à la pandémie de coronavirus.

Projet de réduction de l'aide au développement de 0,7% à 0,5% du RNB

Ce qui pourrait réduire l'aide à 0,5% du Revenu national brut (RNB). Un projet en contradiction avec les engagements du candidat Boris Johnson,  de ne pas toucher le budget de l'aide au développement de la Grande-Bretagne. Dans une lettre ouverte, des associations et ONG ont rappelé au Premier ministre : "Revenir sur votre engagement à maintenir l'objectif de 0,7% signalerait que nous sommes une nation désireuse d'équilibrer ses comptes sur le dos des personnes les plus marginalisées dans le monde, dont beaucoup doivent faire face à l'impact de la Covid-10 en plus des difficultés existantes".

Souligant : « Prendre du recul par rapport à nos engagements internationaux n'est pas la solution et risque de nuire à la position du Royaume-Uni sur la scène internationale alors que nous définissons notre rôle dans le monde post-Brexit". Les anciens Premiers ministres britanniques David Cameron (2010-2016) et Tony Blair (1997-2007) partagent les mêmes préoccupations. Ils appellent Boris Johnson à préserver ce niveau d'aide.

Réduire l'aide britannique est une menace sur « le soft power »

Ces anciens chefs de gouvernement et plusieurs ONG estiment que la baisse de 0,2 point de l'aide, évoquée pour combler les coûts liés à l'épidémie de Covid-19, mettrait en péril le « soft power » britannique. Pour David Cameroon, "abandonner l'objectif de 0,7% serait une erreur morale, stratégique et politique ». Ajoutant :  "Nous devons tenir nos promesses envers les pays les plus pauvres et non les rompre".

Tony Blair rappelle que cette aide constituait une des plus "grandes réussites du soft power britannique" et qu'elle avait contribué à "réduire le nombre de morts dues à des maladies mortelles" en Afrique. 

Aussi considère-t-il que "ni le défi du climat, ni celui du Covid-19 ne peuvent être relevés sans l'Afrique, ni ceux de l'extrémisme et de l'immigration incontrôlée. Changer (le niveau d'aide, NDLR) est une profonde erreur stratégique". Il s'était engagé en 2005 à atteindre l'objectif des 0,7% fixé par l'ONU. Ce qui l'a été pour la première fois sous David Cameron en 2013.

Démission de la ministre britannique des DOM-TOM et du développement

Alors le gouvernement de Boris Johnson fait face à une rébellion importante, pour avoir rompu son engagement de consacrer 0,7% du RNB brut à l'aide publique, Elisabeth Sugg, qui était ministre des DOM-TOM et du Développement, a déclaré qu'elle ne peut « ni soutenir, ni défendre », la décision de réduire le budget de l'aide à 0,5% du RNB. Dans sa lettre de démission, elle écrit : « Je pense qu'il est fondamentalement faux de renoncer à notre engagement de consacrer 0,7% de notre revenu national brut au développement. Cette promesse doit être tenue aussi bien dans les moments difficiles que dans les bons [...]. Le ralentissement économique a déjà conduit à des coupes importantes cette année. Je ne pense pas que nous devrions réduire davantage notre soutien à un moment de crise mondiale sans précédent ».

Le chancelier Risci Sunak maintient la réduction de l'aide

Le chancelier Risci Sunak a annoncé que le budget de l'aide étrangère serait réduit dans le cadre de son examen des dépenses pour 2021. La valeur du budget avait déjà chuté en raison de la Covid-19. Il s'est engagé à recommencer à dépenser 0,7% en aide « lorsque la situation budgétaire le permettra ».

Outre Sugg, les Premiers ministres, les secrétaires d'Etat et députés conservateurs font partie de ceux qui se sont opposés à la décision du gouvernement britannique, affirmant que c'était une violation des engagements du parti, le maintien de l'objectif de dépenses de 0,7% était un engagement du manifeste conservateur et saperait la position internationale de la Grande-Bretagne.

Opposition tous azimuts à la réduction de l'aide britannique

Pour Andrew Michell, député et ancien secrétaire d'Etat du développement international, les coupes seraient « la cause de 100 mille décès évitables, principalement parmi les enfants ».

Harriett Baldwin, députée et ancienne ministre d'Etat pour l'Afrique et le Développement international a « honte que le seul engagement manifeste que nous rompons aujourd'hui soit notre promesse aux plus pauvres du monde ».

Cette décision a également attiré l'opposition de députés qui avaient fait campagne pour une augmentation du budget de la défense. Tobias Ellwood, président du comité spécial de la Défense, a souligné que la « nouvelle ère du leadership occidental » provoquée par l'élection du nouvel président des Etats-Unis, Joe Biden ,« nous voici sur le point de marquer le début de notre présidence du G7 en réduisant notre budget d'aide à l'étranger ». Il a souligné que «  le déclassement de notre programme de puissance douce laissera des vides dans certaines régions les plus pauvres du monde, ce qui aggravera la pauvreté et l'instabilité et verra probablement la Chine et même la Russie étendre leur influence autoritaire en prenant notre place ».

La députée conservatrice, Pauline Latham, a déclaré qu'elle était « très déçue » de cette décision et qu'il y avait la perspective d'une rébellion contre le gouvernement.

Noël Ndong

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