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Addis, la maison commune

Dimanche 7 Novembre 2021 - 12:09

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La ville-siège de l’Union africaine-UA- est en proie au doute. Le 3 novembre, quasiment une année après l’éclatement de la guerre qui l’oppose à la région du Tigré, le gouvernement du Premier ministre éthiopien, Abiy Ahmed, a décrété l’état d’urgence sur l’ensemble du territoire national. Il a appelé à la mobilisation générale contre l’avancée des troupes du Front de libération du peuple tigréen qui menacent de marcher sur la capitale du pays et prendre le pouvoir.

A l’étape actuelle des événements, la communauté internationale tente de s’interposer par des appels à la retenue et se heurte à l’intransigeance des parties au conflit. Addis-Abeba, la capitale fédérale et Mekele, la principale ville régionale du Tigré, refusent d’entendre raison laissant craindre un embrasement général. Cette crise interne survient pour le moins dans un contexte sous-régional tendu.

En effet, les dissensions avec les voisins soudanais et égyptien, consécutives à la construction par l’Ethiopie de l’imposant barrage dit de la renaissance sur le Nil, ne sont pas apaisées. Addis-Abeba, Khartoum et le Caire ne sont pas encore parvenus à parler d’une même voix sur les conséquences environnementales possibles qui découleraient de la mise en service complète de cette infrastructure à laquelle l’Ethiopie tient pour son développement.

Après plus d’une décennie d’accalmie, l’Ethiopie qui, à l’instar de beaucoup d’autres pays africains, a connu des longues périodes d’instabilité, a renoué malheureusement pour son peuple avec la guerre civile. Dans une certaine mesure, le prix Nobel de la paix décerné au Premier ministre éthiopien en 2019, en compensation de son initiative de sceller la réconciliation avec l’Érythrée (pays contre lequel l’Ethiopie était en guerre pendant des années), prend ombrage des effets du conflit en cours duquel les civils payent un lourd tribut.

Que faire pour ne pas que la belle Addis-Abeba et ses quelque cinq millions d’habitants qui accueillent les institutions panafricaines ne sombrent dans des violences de grande ampleur ? L’Ethiopie a ceci de commun avec l’Afrique qu’elle est le sol sur lequel l’organisation continentale a vu le jour, il y a de cela cinquante-huit-ans jour pour jour. Ce statut prestigieux souffrirait dans son essence si la capitale des Pères-fondateurs du rêve africain de l’émancipation faisait les frais d’une terrible guerre civile.

Au fond, peut-être que l’Ethiopie peine à se reformer en dehors de la préférence qu’il a eue, il y a quelques années, de se fédérer autour d’Etats régionaux à forte dose ethnique. Peut-être donc que les équilibres observés depuis, voire les déséquilibres résultant des préoccupations de pacification à l’issue de longs conflits fratricides seraient à l’origine des retournements présents. On se trouverait ainsi devant des situations complexes qui appellent les dirigeants de tous côtés à un grand sursaut national. Mais à les entendre parler, il semble improbable pour l’instant d’envisager une issue pacifique à cette guerre civile qui risque de s’éterniser.

Devant le péril certain, à défaut de disposer d’une force d’interposition capable de stopper les deux ennemis dans leur progression les uns vers les autres en vue certainement de la bataille finale, l’UA va-t-elle devoir faire ses valises et évacuer Addis-Abeba ou, au contraire, prendre toutes les initiatives susceptibles d’amener les parties à dialoguer ? La seconde option serait la meilleure, mais l’organisation panafricaine en a-t-elle vraiment les moyens ? On peut en douter mais on ne sait jamais. Un miracle de dernière heure peut bien se produire si l’UA se montre audacieuse.

Gankama N'Siah

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