Voir ou revoir : « Barbecue Pejo » de Jean Odoutan

Jean Odoutan s’est fait connaître au public avec son premier film « Barbecue-Pejo », dans lequel il parle de la précarité ambiante et du marché de l’emploi difficile et sans aucune garantie, le tout avec beaucoup de légèreté, ainsi qu’une bonne dose d’humour contagieux.

Ce film, c’est l’aventure d’un cultivateur de maïs béninois vivant dans la pauvreté qui décide de troquer son champ contre une voiture, Peugeot 504, dont il espère un grand rendement. Malheureusement, ce dernier fera long feu. A travers cette réalité, « Barbecue-Pejo » épingle au passage la corruption généralisée, les arnaqueurs de tout acabit qui peuvent être des nationaux ou des étrangers venus revendre des voitures d’occasion en Afrique ; mais également la vanité et l’envie assez futile d’impressionner sa communauté, tel le cas pour ce cultivateur dans quelques séquences du film.

Cependant, la beauté de cette fiction réside dans la manière dont l’acteur principal use de résilience maximale pour s’en sortir de ses échecs à répétition. En effet, lorsque le moteur de sa gimbarde lache, il s’en sert comme moulin à farine. Celui-ci ne tardera pas non plus à rendre l’âme. Alors il utilise le bloc moteur comme barbecue pour vendre du mais grillé sur le trottoir.

Comme une bouée de sauvetage, la fin du film, annoncée donc par le titre, est porteuse d’espoir et dresse la débrouillardise ainsi que l’optimisme acharné comme clés absolues pour s’en sortir malgré tous les écueils de la vie. « Barbecue Pejo » tend donc à donner au spectateur l’envie de se battre et de ne jamais renoncer à ses rêves. A ce propos, on apprécie la joyeuse liberté de ton du personnage principal du film incarné par Jean Odoutan lui-même, épatant trublion débrouillard et plein de ressources, qui semble ne s’être fixé aucune limite.

Les autres acteurs et comédiens de cette œuvre ne déméritent pas non plus, à l’instar de la Franco-Congolaise Laurentine Milebo, qui s’est construite à l’école du théâtre populaire de rue à Pointe Noire et qui incarne l’épouse du mari cultivateur ; ou encore Adama Kouyaté, en vieux sage.

On retrouve également dans ce long-métrage d’environ 1h 26 mn sorti en 1999, le sens du dialogue, de la poésie, de l’inventivité et beaucoup d’humour. Avec une passion pour les répliques bien soignées tel qu’on peut le constater dans plusieurs autres de ses œuvres (Djib, Pim-Pim Tché-Toast de vie…), Jean Odoutan sublime la qualité du film de par son scénario, tout en évitant un réalisme trop plat et monotone.

Réalisateur de nombreux films, Jean Odoutan produit et compose lui-même la musique de tous ses films. Il est à la fois scénariste, réalisateur, producteur et distributeur de tous ses films via sa société de production et de distribution 45rdlc.

Odoutan a créé Quintessence, festival international du film de Ouidah, qui a lieu chaque année depuis 2003 en janvier et présente une sélection de films de tous les continents. Il a également créé, au Bénin, l’Institut cinématographique de Ouidah, une école de cinéma qui fait la part belle aux jeunes cinéastes francophones. Jean Odoutan vit en France depuis 1980.