Lutte contre le changement climatique: la FAO conseille la production de nourriture sans convertir les forêts en champs agricoles

Jeudi 6 Octobre 2022 - 16:30

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La directrice adjointe de la division des forêts de l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), Tiina Vähänen, et la forestière principale Serena Fortuna, dans un article, font référence à un rapport de cette organisation qui donne des techniques de production abondante de nourriture sans convertir les forêts en champs agricoles.

Selon le rapport, en effet, pour répondre à l’augmentation de la population mondiale, la planète aura besoin, d’ici à 2050, de 50 % de nourriture en plus par rapport à 2012. « Nous sommes confrontés à un énorme défi qui est celui de nourrir la planète tout en protégeant nos forêts de l’expansion agricole, qui est responsable de près de 90% de la déforestation dans le monde », ont fait savoir Tiina Vähänen et Serena Fortuna,indiquant dans le même temps que ce défi représente une énorme opportunité à ne pas rater.

Pour la FAO, il est possible de transformer le système alimentaire mondial de telle sorte que soit favorisé à la fois le développement de l'agriculture et celui des forêts, sans que l’un des deux ne se produise au détriment de l’autre. « L’agriculture et les forêts peuvent, pour ne pas dire doivent, se renforcer mutuellement et non pas s’exclure », a conseillé la FAO dans ce documentt. Elle indique que si ce mode de pensée est adopté et que le monde agisse dans cette optique à l’échelle planétaire, il en découlera un système alimentaire durable, à même de jouer un rôle fondamental dans la lutte contre le changement climatique, la préservation de la biodiversité et la croissance de l’économie mondiale. Dans le cas contraire, prévient-elle, les perspectives sont sombres.

Les conseils de la FAO

Publiant un nouveau document intitulé "Halting deforestation from agricultural value chains: the role of governments" qui évalue les progrès accomplis et expose les actions à entreprendre, la FAO estime que les pouvoirs publics ont des fonctions essentielles à remplir, par exemple créer des conditions propices aux changements qu’il convient d’opérer, cela à une échelle qui permette de faire évoluer les choses. « Les pays consommateurs ont déjà pris des mesures, telles que fixer des normes d’importation pour les produits agricoles, affecter des fonds destinés à soutenir les petits agriculteurs des pays producteurs, et s’engager à financer des chaînes d’approvisionnement agricoles plus durables », conseille la FAO.

L'organisation appelle les pays producteurs à  mettre en place une série de stratégies allant de la planification relative à l’utilisation des terres jusqu’à la rémunération des services écosystémiques, en passant par des pratiques agricoles plus respectueuses des forêts. « Les initiatives mondiales telles que la REDD+ permettent à de nombreux pays producteurs d'obtenir des résultats significatifs en mettant un terme à la déforestation, en favorisant des changements profondément novateurs et en débloquant des financements climatiques au service de futurs réinvestissements. Grâce notamment à un partenariat avec l’ONU-REDD, la FAO soutient les pays en développement dans leur processus REDD+ et dans la concrétisation de leurs engagements sur le terrain », souligne cette source.

Ce rapport relève aussi qu’une coordination bien plus grande est nécessaire entre les pays consommateurs et les pays producteurs, si l’on veut créer des systèmes agroalimentaires véritablement porteurs de transformation qui soient en mesure de produire plus de nourriture, à savoir garantir la sécurité alimentaire et les besoins en matière de nutrition d’une population en expansion, sans pour autant convertir les forêts en champs agricoles. « Les gouvernements du monde entier doivent assurer cette coordination de telle sorte que les différents secteurs et parties prenantes travaillent à la réalisation d’objectifs communs à tous les niveaux, que cela soit au niveau international, national, régional ou local. Il incombe aux pouvoirs publics d’élaborer les cadres législatifs et d’offrir des financements et des conditions de marché qui favorisent des approches fondées sur les synergies entre les forêts et l'agriculture. Les décideurs doivent réaliser des arbitrages en optant pour des solutions qui se renforcent mutuellement », soutient la FAO.

L’engagement du secteur privé

La FAO a, en effet, indiqué que le secteur privé s’est engagé à supprimer la déforestation de ses chaînes d’approvisionnement, notamment par le biais de la Déclaration de New York sur les forêts de 2014. Depuis lors, a-t-elle fait savoir, des normes industrielles et des systèmes de certification ont été mis en place afin de réduire à zéro net « l’empreinte de déforestation » de certains produits de base comme la viande bovine, l’huile de palme, le soja, le cacao, le café, le caoutchouc et d’autres encore. Toutefois, a-t-elle indiqué, de plus amples efforts doivent être déployés pour pouvoir donner suite à ces engagements et accomplir des progrès concrets. Mais, admet-elle, les producteurs, dont la plupart se trouvent dans des pays tropicaux et sous-tropicaux, peinent à satisfaire à ces normes car, elles nécessitent d’apporter des changements énormes sur le terrain. « Le passage à des méthodes agricoles plus durables implique généralement des investissements initiaux dans du matériel nouveau, une période d’études et de formation, ainsi que des changements au niveau des cultures et de l’utilisation des terres. Pendant ce temps, les récoltes habituelles dont dépendent souvent les moyens de subsistance sont manquées. La procédure en soi liée à l’obtention de la certification, dès lors que les nouveaux procédés sont mis en place, peut elle aussi demander énormément de temps et être onéreuse », indique la FAO. Elle a également souligné que les petits exploitants agricoles, qui produisent 35% de la nourriture mondiale et vivent pourtant souvent dans la pauvreté, ont besoin de beaucoup plus de soutien pour surmonter ces obstacles. Alors que les pays producteurs, où a lieu la majorité de la déforestation, rencontrent les plus grandes difficultés pour apporter les changements requis. « Ils doivent quotidiennement trouver un équilibre entre leurs engagements envers les objectifs internationaux en matière de déforestation et de changement climatique, et la nécessité de veiller à la sécurité alimentaire et aux moyens de subsistance de leurs populations », précise l'agence onusienne. 

Lucien Dianzenza

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