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Crise climatique et financement

Vendredi 18 Novembre 2022 - 13:05

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Selon le rapport d’évaluation le plus récent du Groupe d’experts intergouvernemental sur le climat, l’Afrique est le continent le plus vulnérable aux conséquences de la crise climatique. Les pays africains ne contribuent pas seulement le moins aux causes du changement climatique, générant moins de 3 % de toutes les émissions de gaz à effet de serre, mais ce sont eux qui seront le plus durement touchés par l’augmentation rapide des chocs climatiques. Le réchauffement moyen mondial de 1,5°C et le doublement des périodes de chaleur extrême attendus au cours de la prochaine décennie seront vécus localement comme un réchauffement de 3°C à travers une grande partie de l’Afrique. En première ligne de l’urgence climatique mondiale, l’adaptation se présente comme une opportunité sans précédent pour la COP27 de faire progresser l’Afrique de manière irrévocable, en tirant parti des puissantes synergies entre l’adaptation et les emplois, les chaînes d’approvisionnement et le développement.

La communauté internationale a besoin de prendre en compte les nombreuses crises économiques, climatiques et sanitaires qui secouent l’Afrique. La reprise de ce continent après les chocs économiques et sanitaires de la pandémie de la covid-19 qui a plongé plus de 25 millions de personnes dans la pauvreté est encore partielle. Le continent, qui importe plus de 80 % de ses denrées alimentaires, subit aujourd’hui de plein fouet les retombées du conflit ukrainien, qui a bouleversé l’approvisionnement alimentaire mondial et secoué les prix. Cette situation suscite l’insécurité alimentaire et provoque des perturbations humanitaires dans toute l’Afrique, puisque les dépenses alimentaires représentent 75 % du revenu des groupes les plus pauvres d’Afrique, alors que plus d’un cinquième de tous les Africains est déjà victime d’insécurité alimentaire. De nombreuses nations africaines ne bénéficient pas de la marge de manœuvre budgétaire nécessaire pour réagir avec efficacité, la part des pays à faible revenu en situation de surendettement ou à haut risque de surendettement s’élevant à 60 %, contre environ 20 % il y a dix ans.

Le développement le plus significatif pour l’adaptation lors de la Conférence des Nations unies sur les changements climatiques à Glasgow (COP26) s’est traduit par un nouvel engagement destiné à mettre le financement international de l’adaptation sur un pied d’égalité avec l’atténuation. La concrétisation de l’accord de la COP26 pour que les nations développées doublent le financement de l’adaptation d’ici à 2025 n’est pas seulement un élément essentiel pour exploiter tout le potentiel des mesures d’adaptation en Afrique et dans le monde. Il s’agit également d’un facteur décisif pour restaurer la confiance envers la coopération internationale afin de lutter contre le dérèglement climatique dans un contexte marqué par un réchauffement et des impacts climatiques de plus en plus rapides et par l’aggravation des injustices mondiales. Un plan de mise en œuvre autonome et transparent témoignant des progrès accomplis vers l’objectif de multiplication par deux en 2025, et démontrant notamment que des fonds sont alloués à des programmes nationaux, en particulier dans le cadre de l’AAAP de l’Afrique, constituerait un résultat puissant pour la COP27 à Sharm-al-Sheikh.

Le Programme d’accélération de l’adaptation en Afrique (AAAP), lancé l’année dernière, a été réaffirmé par les dirigeants africains et la direction de l’Union africaine et de la Banque africaine de développement comme l’effort d’adaptation phare du continent et le véhicule de mise en œuvre de l’Initiative pour l’adaptation en Afrique. L’Afrique a un déficit de financement en matière d’adaptation de 41 milliards de dollars par an et aucun autre programme ne peut se comparer à l’ambition des 25 milliards de dollars de l’AAAP, qui permet déjà d’agir sur le terrain à grande échelle pour catalyser une transformation résiliente en Afrique. Si le volume financier de l’AAAP a déjà été capitalisé à hauteur de la moitié, la COP27 est l’occasion pour la communauté internationale de faire preuve de solidarité avec les efforts d’adaptation audacieux du continent le plus vulnérable du monde en comblant le besoin de ressources non encore satisfait pour les actions climatiques du Fonds africain de développement.

 

 

Boris Kharl Ebaka

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Édition du Samedi (SA)

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