Opinion

  • Brin d’histoire

Franklin Boukaka

Jeudi 5 Mars 2015 - 11:30

Abonnez-vous

  • Augmenter
  • Normal

Current Size: 100%

Version imprimableEnvoyer par courriel


Le 22 février 1972, le Congo est ébranlé par un séisme politique de grande ampleur. Un groupe de jeunes officiers décide de prendre le pouvoir par un coup de force. Ils échouent. Certains sont arrêtés, d’autres réussissent à s’enfuir tandis que deux infortunés sont assassinés, Élie Théophile Itsihou, ancien ministre et Franklin Boukaka, artiste congolais de renommée internationale.

Franklin Boukaka est né le 10 octobre 1940 à Brazzaville. Après son certificat d’études, il entame ses études secondaires qui finiront en cul de sac. Ses débuts en musique s’effectuent à Bacongo dans l’orchestre Sexy Jazz. Il se retrouve ensuite dans  Sympathic Jazz d’Alphonse Marie Toukas. En 1958, avec son compère de l’orchestre Sympathic Jazz, Michel Boyibanda, il se rend à Léopoldville. Il contribue, avec d’autres musiciens des deux rives,  à la création de l’orchestre Negro Band, le 11 novembre de cette année-là. Par la suite, il passera d’une rive à l’autre, érigeant, dans les pas de ses devanciers, le pont sur le Congo dans le domaine musical. On le sait, depuis ses débuts, la musique congolaise s’est nourrie d’incessants échanges de musiciens entre les deux rives à l’origine de la fécondité qui a imposé la rumba congolaise à l’Afrique entière.

En 1959, il intègre le Jazz Africain de Lutula Edo Clari. Il rejoint Jeannot Bombenga lorsque celui-ci crée le Vox Africa. Il y reste jusqu’au début des années 6o. Il traverse, on pourrait même dire retraverse le fleuve Congo en direction de Brazzaville, pour atterrir dans le Cercul Jazz de Ntounta Mamadou et Nzoungou Paul. Avec son nouvel orchestre, il fait des tournées régulières tant au Congo qu’en Afrique. À l’occasion d’un voyage à Mossaka, Franklin crée la chanson Honolé na Mossaka, dédiée à un riche commerçant de cette localité Honoré Bokilo à la descendance réputée. En 1963-1964, il sort chez Stenco, la chanson Louzolo. Entre 1965-1966, il séjourne pendant près de huit mois au Cameroun avec l’orchestre Cercul Jazz. En 1967, aux Éditions Epanza Makita de Franco, il commet Pont sur le Congo, accompagné par l’orchestre Cercul Jazz. La même année, à l’occasion du salon de la Radio et de la Télévision à Paris, accompagné de son groupe, Les Sanzas, il sort, chez Gilles Sala, un album comportant de nombreux titres, dédié aux musiciens congolais. Il a longtemps servi d’indicatif à l’émission radiophonique à succès, Le Coco (Club des orchestres congolais) parmi lesquels Bayembi ya Congo. Avec ce disque, Franklin Boukaka se lance dans une carrière musicale bohémienne, enregistrant chanson sur chanson au gré de ses pérégrinations. Ainsi enregistre-t-il avec le Kélétigui de Guinée-Conakry. Au cours des dernières années de la décennie 60, le  répertoire de Franklin Boukaka est truffé de chansons très engagées sur les grands thèmes de l’époque : décolonisation, Tiers-monde, injustices sociales, etc. Ce qui ne l’empêche pas, après une formation d’animateur culturel, d’être très actif à la direction générale de la Culture dirigée, alors, par Maxime Ndebeka.

Le grand tournant de sa carrière est, sans conteste, la sortie en 1971 de son 30 cm intitulé, Le Bûcheron, enregistré en France. Cet album a bénéficié des arrangements de Manu Dibango qui garde, me disait-il, une très bonne impression des journées de travail passées en compagnie de ce chanteur émérite, arraché très tôt à la vie. Plus de  quarante ans après sa disparition, ses chansons continuent de briller au firmament de la musique mondiale. Les titres de l’album le Bûcheron procurent, aujourd’hui encore, de substantiels droits d’auteur aux  ayants droit de Franklin Boukaka. Mouanga a été interprété par les orchestres Aragon et Broadway ; Le Bûcheron est l’objet de fréquentes reprises parmi lesquelles, celles de Manu Dibango, d’Aicha Koné et du groupe Bisso na Bisso de Passi.

Franklin Boukaka aurait eu 75 ans le 10 octobre prochain. Quoi qu’il en soit, son talent est intemporel. Plus de quarante ans après sa mort, il continue d’« engranger » de mirifiques droits d’auteur.

Mfumu

Edition: 

Édition Quotidienne (DB)

Brin d’histoire : les derniers articles