Renminbi

De tous les mécanismes qui permettent aux nations d’échanger, de coopérer, voire même de s’affronter, celui de la monnaie est de très loin le plus puissant, le plus sophistiqué. Nous en savons quelque chose, nous Africains francophones qui partageons une monnaie commune, le franc CFA aligné sur l’euro, qui nous aligne de facto sur la puissante économie du Vieux continent.

Dans ce domaine précisément, une révolution se prépare qui aura, à terme plus ou moins rapproché, des conséquences majeures sur les relations entre les peuples et les continents : l’affirmation à l’échelle internationale du yuan, ou plus exactement du renminbi (la « monnaie du peuple »), comme monnaie d’échange et de réserve. Émise et gérée par la Chine, qui sera demain la première puissance économique de la planète, cette monnaie va conférer à ce pays une autorité financière, et donc politique, qu’il n’a pas jusqu’à présent. Elle en fera même, au final, l’égale des États-Unis.

Les dirigeants américains ne s’y sont pas trompés comme le montrent les discussions aussi courtoises que serrées qui se sont déroulées la semaine dernière à Beijing entre les dirigeants chinois, le chef de la diplomatie américaine John Kerry et son homologue du Trésor, Jack Lew. Devançant une évolution irréversible, ces derniers ont plaidé pour que la Chine se soumette, elle aussi, aux exigences de la bonne gouvernance monétaire qui lie le dollar, l’euro, le rouble, le yen et autres monnaies de moindre importance.

Même si la question ne se pose pas encore officiellement, le temps viendra où les pays émergents, en Afrique tout particulièrement, chercheront à diversifier leurs réserves monétaires afin d’en mieux garantir la stabilité, mais aussi d’échapper à une tutelle qui ne dit pas son nom. Et, de ce point de vue, l’établissement du yuan comme monnaie d’échange et de réserve ouvre une avenue qu’ils ne manqueront certainement pas d’explorer. Avec, dans un délai qu’il est impossible de fixer aujourd’hui, une réévaluation du système monétaire sur lequel repose aujourd’hui notre économie.

Sur ce terrain, comme sur beaucoup d’autres, nous sommes vraisemblablement à la veille de transformations que nous serions sages d’explorer dès à présent.