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La fibre ethno-régionale

Samedi 7 Novembre 2015 - 10:45

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Qui veut tirer indéfiniment sur la corde sensible de l’ethnie ou de la tribu pour espérer réunir les suffrages en sa faveur ?, pour espérer assouvir ses atavismes égocentriques et diviser les Congolais ? Qui veut ramener à l’ethnie le débat d’idées sur les bons ou les mauvais choix que chacun propose pour le développement du Congo ? Qui pense que la tribu, le lieu de provenance, la couleur de la peau, la taille du nez, la rondeur de la tête ou sa forme trapézoïdale sont une garantie contre les folies dont les hommes ici-bas se rendent souvent coupables ?

Alors qu’est engagé un débat fort animé au sein de la société congolaise sur les options de son avenir institutionnel, les quartiers, les administrations, les marchés, lieux par excellence d’échanges entre concitoyens, sont traversés par trop de peurs et de suspicions. À la manœuvre, des esprits un peu retournés, qui pensent que le moment est venu d’exploiter les contradictions politiques, à l’évidence profondes entre les acteurs en présence, à des fins de tribalisme et vice-versa.

Depuis les événements du 20 octobre, au cours desquels des vies ont été fauchées, des biens détruits du fait de discours incontrôlés et sans doute d’attentes non étanchées, les Congolais s’épient bassement. « Voilà, il est du Nord ; celui-là est du Sud, celui-là bas vient d’on ne sait où ! ». Et il y a des littératures virulentes pour accompagner ces classifications, dont le but est de créer chez les compatriotes un sentiment de haine à l’égard des autres, d’empêcher les fonctionnaires de remplir leur mission de service public dans tel ou tel quartier de Brazzaville, dans tel ou tel département du Congo, au motif que Pierre n’est pas d’ici, que Paul ne mérite pas de rester là.

Si et seulement si ceux qui manient ces discours déchaînés étaient assez élégants, ils pouvaient s’asseoir un petit moment et dresser la liste des composantes politiques sur lesquelles ils parient à la vie et à la mort sur les tombes de leurs aïeuls. Ils réaliseraient qu’au sein de l’opposition ou des oppositions, comme au sein de la majorité, aujourd’hui, on trouve réunis les Congolais de tous les départements. D’où vient donc que de défendre les positions des uns et des autres, supposément pour l’intérêt général, les Congolais actionnent la fibre du tribalisme pour paralyser les écoles, les hôpitaux, les administrations publiques et les marchés ?

Car si les discours de haine, tels qu’entendus dans certains coins du Congo devaient se développer, les premiers secteurs de la vie qui en subiront le contrecoup seront ceux cités plus haut, dans lesquels les enfants d’un même pays s’assument pour cimenter l’unité, la cohésion et la concorde nationales. En conséquence, à côté de la mobilisation que chaque camp attise en sa faveur, les acteurs politiques congolais seraient mieux inspirés de prendre à témoin leurs compatriotes, en jurant publiquement que leur combat est aux antipodes des appels à la haine tribale ; qu’ils exposeront sans hésiter à la justice, ceux de leurs militants impliqués dans des exactions à caractère tribal.

Dans toutes les Constitutions adoptées par le Congo depuis son indépendance, en 1960, jusqu’à ce jour, le caractère indivisible de la République a toujours figuré au titre premier. Même celle issue de la Conférence nationale souveraine de 1991 fut exemplaire sur ce point malgré l’affolement des déclarations visant nos pauvres ethnies ; la Constitution post-guerre du 5 juin 1997 n’a pas dérogé à cette règle, tout comme celle du 25 octobre 2015.

Au fond, il manque un relai à la consolidation de l’unité nationale. Et l’on peut se demander sur ces entrefaites, que font les partis politiques, que fait la société civile pour relayer ce message fort sur l’exigence de bâtir la Nation congolaise. Il est clair aussi que dans cette quête d’unité et de réconciliation, les pouvoirs publics doivent être aux avant-postes, pour ne pas dire exemplaires !

Gankama N'Siah

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