Opinion

  • Brin d’histoire

Clap de fin

Vendredi 28 Décembre 2018 - 12:52

Abonnez-vous

  • Augmenter
  • Normal

Current Size: 100%

Version imprimableEnvoyer par courriel


86 mois, 344 semaines, 320 jours et autant de Brin d’histoire, une page se tourne. C’est le clap de fin. Avec le sentiment du travail bien accompli. En clair, ce Brin d’histoire est le tout dernier d’une série entamée, il y a plus de six ans.

Grand merci à Jean-Paul Pigasse, Lydie Pongault, Emile Gankama, Gerry Gérard Mangondo et à toute l’équipe rédactionnelle des Dépêches de Brazzaville. Au terme de cette féconde collaboration, que dire ? J’ai pris beaucoup de plaisir à rendre ma copie toutes les semaines. Les différents thèmes abordés dans Brin d’histoire m’ont permis de faire le tour de la vie politique, économique, sociale et culturelle du Congo. J’y ai rencontré les laideurs des pratiques en cours dans ce magnifique pays qui en ont contrarié le développement. J’ai pu aussi scruter les heurs et malheurs de la République qui a fêté ses 60 ans dans une atmosphère morbide.

Ce pays, le Congo, riche incontestablement, n’a pas connu l’essor qu’il méritait. La faute à ses hommes politiques qui ont souvent amalgamé les sphères publique et privée. Dire que ces hommes sont minables, c’est presque une lapalissade. Ils ont infantilisé le peuple et désacralisé la valeur travail. Le Congo risque de le payer au prix fort, à moins d’un ultime sursaut du président de la République. Il lui reste encore une chance de sauver les meubles. Sans surenchérir sur l’angoisse, l’inquiétude, les souffrances du peuple, il convient de dire que le temps presse désormais.

Mais dans cette gangue humaine, on trouve de rares pépites qui, hélas, n’ont pas toujours été traitées de la manière qu’il convient. Spectateurs impuissants de la dégradation de la vie nationale - tout le monde n’a pas une âme de martyr, et c’est dommage - ces talents ne sont pas moins coupables de la déchéance nationale et des « problèmes qui nous prennent à la gorge », comme dirait François Mauriac. Mais toute chose étant égale par ailleurs, ils méritaient néanmoins un meilleur traitement, hors des considérations politiques, géopolitiques, politiciennes, « clientélistes » ou idéologiques. Il importe que des changements soient opérés dans le fonctionnement de l’Etat, en déliquescence avancée, dans le choix des hommes et dans la gestion de ses ressources. Ce n’est qu’à cette condition que le Congo retrouvera une meilleure santé économique. Il n’y a pire politique que celle du statu quo. S’arcbouter sur les mauvaises manières n’est pas la meilleure façon de s’en sortir. Il en faut plus, sans doute, le changement. C’est ce qu’attend le peuple du pouvoir.

Les hommes politiques congolais ne sont pas sérieux. C’est un euphémisme, voire un lieu commun. Ils doivent changer d’attitudes et de discours pour modifier le visage de notre destin. Les mentors d’hier ont disparu. On assiste à une paupérisation qualitative de la classe politique qui, de surcroît, manque d’expérience. Surtout, ceux qui s’agitent sporadiquement, au besoin, tiennent lieu d’opposants mais ne disposent pas d’une autorité morale qui transcende les clivages délétères qui fondent la vie politique au Congo. D’une façon générale, les politiciens congolais, spécialistes des retournements de veste, des coups fourrés, sont souvent victimes de leurs lubies. Cette crise d’hommes sérieux, aussi bien au sein du pouvoir qu’en dehors, montre la difficulté d’une alternative crédible. Alors, face à ce vide sidéral, Denis Sassou N’Guesso qui, nolens volens, tient encore la barre, doit faire preuve de caractère et de courage pour donner un coup de pied dans cette fourmilière qui contrarie l’unité, le travail et le progrès du Congo.

Le temps n’est plus à ressasser le passé, mais d’en tirer les leçons ainsi que celles des 60 ans de la République pour remettre le pays dans la voie du développement. C’est le véritable enjeu des prochaines décennies. Tout le reste n’est que fuite en avant. A défaut d’un passé et d’un présent glorieux, quel avenir pour le pays et pour nos petits-enfants ? C’est la grande question. La réponse réside en deux ou trois petites choses, mais qui sont des véritables choix politiques forts. Et, c’est facile à faire : réviser la Constitution pour en extraire les aspects régressifs comme la propriété du sol confiée à des prétendus propriétaires fonciers, en général, sur le principe du premier occupant. L’un des premiers habitants du quartier dit Lycée Sankara a donné son propre nom, Oboli, à la rue éponyme. C’est un ancien de Poto-Poto et ancien joueur du Cara (Club athlétique renaissance Aiglons). Dans le même esprit, constitutionnaliser une nouvelle procédure de nomination des cadres aux hautes fonctions de l’Etat (ministres, directeurs généraux, etc.). D’autres points posent problèmes dans cette Constitution, notamment le nombre pléthorique des institutions qui grèvent notablement les finances publiques. En un mot, il s’agira de créer des institutions fortes, animées par des compétences avérées au service d’une nouvelle et bonne gouvernance et de restaurer l’autorité de l’Etat. Cette restauration devrait permettre la remise en marche de la machine nationale enrayée par le laxisme, le vol, la corruption, les déviations sociales diverses, etc. En un mot, comme je le disais dans un récent Brin d’histoire, citant Michel Foucault : « Surveiller et punir ». C’est ça l’Etat. Son rôle, en ces temps de marasme économique, est aussi d’élaborer une politique multisectorielle transversale : ville, éducation, formation, emploi, santé, culture, etc., et ne pas en faire une simple profession de foi ou une vaine proclamation, comme trop souvent dans ce pays. C’est là qu’on l’attend.

 « To ko mema Congo na mutu éé », dit la chanson de Kevin Mbouandé. Ce qui est un fardeau. Il n’en faut pas tant. Pour ne pas en arriver à cette épuisante et exténuante contorsion, il faut remettre le Congo sur les rails. Ce n’est pas compliqué. Il suffit, comme je viens de le dire, d’une véritable volonté politique et une petite étincelle de génie. En fait, c’est un véritable aggiornamento qui s’impose pour changer de paradigme, comme on dit aujourd’hui. Pour faire une omelette, il faut casser des œufs. C’est simple. Ça aussi, je l’ai dit maintes fois. Pour ne pas être un empêcheur de tourner en rond, j’arrête « Brin d’histoire». Les véritables héros ne sont pas toujours ceux que l’on croit. Avec son « Brin d’histoire », Mfumu en est véritablement un. Fin.

 

 

Mfumu

Edition: 

Édition Quotidienne (DB)

Notification: 

Non

Brin d’histoire : les derniers articles