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Financement soutenable du Fonds bleu

Mardi 28 Mars 2017 - 15:27

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Le Fonds bleu est un programme de développement économique durable et innovant, concernant l’exploitation des ressources renouvelables des eaux et forêts du Bassin du Congo. D’un montant de 65 milliards €, fixé par la 22e Conférence des 196 Parties signataires de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques de Marrakech (2016), il est composé de subventions renouvelables des Etats de 100 millions € l’an avec des engagements sur le long terme. Il finance les projets d’Economie Bleue. Celle-ci est définie par la Commission économique des Nations unies (CEA) pour l’Afrique comme une « économie qui concerne toutes les étendues d’eau, y compris les lacs, les cours d’eau et les nappes souterraines, les mers et les côtes. Elle vise à promouvoir la gestion durable des eaux et forêts dans l’ensemble du Bassin du Congo ». Ces projets préservent cette zone des mauvaises pratiques d’exploitation des ressources, en favorisant les activités alternatives dont la gouvernance est au bénéfice des populations locales.

Ce Fonds existe déjà dans plusieurs pays où, il est financé essentiellement par leurs capitaux propres. En 2002, la Communauté Métropolitaine de Montréal (CMM) au Canada signait avec le gouvernement du Québec l’Entente de Communauté sur le Développement Durable prévoyant la constitution d’un Fonds bleu métropolitain, concernant les projets de conservation, de mise en valeur et d’accessibilité aux rives et aux plans d’eau de la région métropolitaine de Montréal. 68 projets pour 41,9 milliards $, dont 6 milliards $ proviennent du gouvernement du Québec, 10,5 milliards $ de la Communauté et plus de 25,5 milliards $ des Municipalités participantes qui en assurent la maîtrise d’œuvre. En Europe, l'Economie bleue représente 5,4 millions d'emplois et une valeur ajoutée brute de près de 500 milliards € par an. Elle est financée par la politique maritime intégrée dans la réalisation des objectifs stratégiques de l’Union Européenne 2020 pour une croissance intelligente, durable et inclusive.

Le projet du Bassin du Congo couvre plus de deux millions de km² de forêt, soit 6% de la superficie des forêts du monde, avec un potentiel économique, faiblement exploité, faute de financements soutenables.

 

I- Du potentiel économique : Le bassin du Congo absorbe plus de 271 gigatonnes de carbone par an et constitue un grand réservoir d’eau potable. Ce deuxième poumon d’oxygène du monde après l’Amazone, compte 13.000 plantes dont 6.000 arbres de valeur commerciale, 1.086 oiseaux, 400 mammifères, 280 reptiles, 216 amphibiens, 686 poissons et 900 papillons. Les activités économiques qui en découlent sont : l’exploitation du bois, la pêche, l’aquaculture, l’éco-tourisme, les transports fluviaux, l’élevage, les mines et l’hydroélectricité.  Plus de 60 millions de personnes en dépendent avec plus de 20% des emplois disponibles dans le secteur forestier, représentant moins de 8% de la richesse nationale des pays de la zone, loin des 15% prévus par le Fonds forestier du Bassin du Congo (2008). Le taux de déforestation annuel brut de 0,13 % entre 1990 et 2000, a doublé entre 2000-2005, et depuis, cette zone perd 4 millions d’hectare de forêt par an.

 

II- Au financement soutenable : Le Mémorandum d’entente pour créer un Fonds bleu pour la gestion des ressources en eau, signé le 8 mars 2017 à Oyo entre l’Angola, le Congo, la RDC, le Gabon, la Centrafrique, le Burundi, le Rwanda, le Tchad et le Maroc, permettra de lever 100 millions € en 2017. D’autres pays qui s’étaient engagés dans ce projet, le signeront plus tard, au risque de compromettre son financement, voire sa réalisation.

Certes, ce fonds est éligible au Fonds vert pour le climat de 100 milliards $ de 2012-2020, destiné à aider les pays en développement à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre, à s'adapter aux changements climatiques et à soutenir leur transition vers les énergies renouvelables. Ce mécanisme d’aide financière des Nations unies, rattaché à la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques, n’a retenu jusqu’ici que 8 projets sur les 37 présentés pour 168 millions $. Il est aussi éligible au très sélectif plan d’investissement de l’Union Européenne pour le développement durable, la lutte contre les causes des migrations irrégulières et la réintégration qui prévoit 3,35 milliards € dès 2017.

Ainsi, le Fonds bleu est une opportunité pour améliorer la diversification de l’économie du Bassin du Congo. Mais, l’opportunisme des parties rend problématique l’optimisation du financement, qui ne sera soutenable que moyennant une contribution conséquente des Etats concernés et un système de gouvernance crédible.

 

 

 

 

 

 

Emmanuel OKAMBA Maître de Conférences HDR en Sciences de Gest

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Édition Quotidienne (DB)

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