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Quel équilibre mondial demain ?

Dimanche 20 Septembre 2015 - 11:44

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Il est évident, pour qui ose regarder la vérité en face, que l’équilibre mondial (d’aucuns diraient plus justement le déséquilibre planétaire) dans lequel nous vivons depuis la fin de la deuxième guerre mondiale subit une mutation rapide depuis le début de ce nouveau millénaire. Avec, d’un côté, les grandes puissances qui s’affrontent, quoi qu’elles prétendent, à fleurets mouchetés et, de l’autre, les nations dites « émergentes » qui n’ont pas encore les moyens d’influer sur le cours des évènements, mais qui commencent à percevoir qu’en coordonnant mieux leurs actions au plan international, elles finiront par changer les rapports de force et ainsi peser sur l’Histoire à venir.

Ce n’est évidemment pas en quelques lignes que l’on peut résumer le changement stratégique qui se dessine sous nos yeux. Mais il n’est pas inutile d’essayer de réduire celui-ci aux trois données suivantes qui permettent de mieux cerner l’enjeu de la mutation fondamentale à laquelle nous assistons.

1. Dans un avenir proche, les grandes puissances seront contraintes de s’occuper de ce qui se passe dans  leur environnement immédiat et, de ce fait, cesseront d’intervenir de façon anarchique dans des régions éloignées de leur territoire. De la même façon que la Russie a du se concentrer sur ses propres problèmes dans les deux dernières décennies au risque de perdre son influence dans le Tiers-monde, l’Europe et les États-Unis seront amenés, demain, à concentrer leurs efforts pour franchir les obstacles qui s’accumulent sur leur route. Il en résultera, du moins faut-il l’espérer, une approche plus réaliste, moins artificielle des rapports entre les nations et, surtout, une réforme en profondeur de la gouvernance mondiale qui garantira mieux le maintien de la paix partout où celle-ci se trouve menacée.

2. Simultanément le monde émergent, c’est-à-dire les peuples du Sud – Afrique, Amérique latine, Asie –, va devoir s’organiser en communautés suffisamment structurées pour peser à son tour sur le sort de l’humanité. Il n’y parviendra ni par les armes, ni par l’argent comme l’ont fait les « Grands », mais par la puissance que lui confèrent le poids humain de ses populations, l’étendue des espaces que ceux-ci occupent à la surface du globe, l’abondance des ressources naturelles dont ils prennent peu à peu le contrôle, la vitalité et le dynamisme de ses nouvelles générations. Face à un monde vieillissant qui se découvre incapable de dicter plus longtemps sa loi au reste de l’humanité et accumule les erreurs aussi graves que la dégradation de l’environnement ou la dérive climatique, les nations jeunes de l’hémisphère sud ont aujourd’hui toutes les cartes dans les mains pour influer sur le cours de l’Histoire.

3. Il va de soi que ce double changement, résumé ici de façon caricaturale, ne peut qu’entraîner à brève échéance une modification profonde des rapports entre les puissances qui tenaient jusqu’à présent le haut du pavé et les nations pauvres qui étaient, sinon tenues en esclavage, du moins soumises à la loi du plus fort. Mais personne ne peut dire aujourd’hui quelle forme prendra une telle mutation. Alors que les nouvelles technologies bouleversent les relations entre les hommes en effaçant l’espace et le temps, toutes les options sont possibles pour la mise en commun, par les nations dites « jeunes », des moyens qui leur permettront dans le proche avenir de se faire mieux entendre au sein de la communauté internationale. C’est donc à elles, et à elles seules, de répondre à une question dont dépendra, au final, le sort de notre espèce.

Quitte à paraître une nouvelle fois utopique et décalé par rapport au réel, disons que les peuples du Sud devraient se préoccuper mieux qu’ils ne le font aujourd’hui de la place qu’ils occuperont à l’avenir dans la communauté des nations et du rôle qu’ils joueront demain sur la scène mondiale. L’Afrique, pour ne citer qu’elle, a tous les moyens intellectuels et matériels nécessaires pour conduire une telle réflexion. Encore faut-il qu’elle ait une perception claire des atouts qu’elle détient face aux « Grands » !

 

Jean-Paul Pigasse

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Édition Quotidienne (DB)

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