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Ces oubliés et ces méconnus de l’histoire congolaise. Congo : Il faut arrêter la chienlit

Jeudi 13 Septembre 2018 - 20:55

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Depuis quelques années, le Congo est sur la sellette de la communauté internationale. Les principaux griefs : élections trafiquées, embastillement des opposants, mauvaise gouvernance. Sur ce dernier point, il n’y a pas de contestation possible puisque le président de la République, au sortir de la guerre, flairant les dérives d’une mauvaise gouvernance, exhortait la presse à critiquer les ministres. La presse se saisissant de cette aubaine n’a pas fait de quartier, le président lui-même n’échappa pas à l’acrimonie et à la critique assassine de la presse congolaise. Depuis, de nouveaux contempteurs ont pris le relais. Au premier plan des inquisiteurs, les médias français. Il est vrai que la France a beaucoup d’intérêts au Congo pour rester indifférente à ce qui s’y passe. Mais de là, à pratiquer l’autodafé, la situation devient insoutenable. En diplomatie, cela s’appelle ingérence dans les affaires d’un pays. Tout ceci fait désordre et alimente la désinformation. La gestion de la politique nationale relève, en effet, de la souveraineté nationale.

Le vrai problème au Congo, et nul n’y échappe aussi bien du côté du pouvoir que de l’opposition, c’est la cupidité et une certaine voracité. Entre ceux qui avaient un jour dit : c’est notre tour de manger et les autres, un point commun : l’absence du patriotisme. Il désigne le dévouement d’un individu envers son pays qu’il reconnaît comme patrie. Le patriotisme est un puissant ressort d’action. Ce ressort qui a longtemps permis au Congo d’accomplir des exploits dans divers domaines est désormais cassé, corrompu par ce qu’il est convenu d’appeler les antivaleurs, néologisme congolais comme les Congolais savent en produire. Du grec, anti signifie qui est situé en face de, qui s’oppose à, qui est l’opposé, etc. Il sied de parler à la place d’antivaleurs, de déviance comme écart à la norme morale ou sociale. Déviance s’oppose donc à valeur qui désigne un principe moral ou esthétique universellement admis : liberté, fraternité, égalité, tolérance, solidarité, honneur, dignité, courage, justice, etc. Et, dans l’échelle des valeurs, le patriotisme est le plus important. Il est miné par les déviances mais aussi par le virus de la tribu, de l’ethnie ou de la région. Même dans ces cas, il faut être du côté du bon axe géographique. Les récriminations des laissés-pour-compte, situés du mauvais côté de l’axe, animent la chronique sociale.

Depuis l’élection par effraction de l’abbé Fulbert Youlou, en 1959, la politique dans notre pays se fait sur fond de revanche sourde.

Le patriotisme permet de défendre la patrie même au prix de son sang. Face à ce sentiment rien ne peut exister. C’est la noblesse de ce sentiment qui incita le général à la transgression de l’autorité et de se dresser contre la barbarie nazie.

À coup de contrats léonins, les Congolais ont vendu leur âme. Ils sont prêts, pour assouvir leur frénésie de richesse indue. Depuis la fin de la guerre, ce qui réunit désormais les Congolais, c’est leur âpreté au gain facile. On en n’a pas fini avec les séquelles de la guerre : pillage des biens publics, malhonnêteté, vol, corruption, concussion, népotisme, etc. Une rupture bien comprise suppose de combattre ces déviances qui sont désormais de vrais fléaux qui plombent l’effort de développement.

Il y a quelques années, à Brazzaville, des fabricants de whisky furent arrêtés. Par leur breuvage infect, ils donnaient la mort aux Congolais. Leur patron se présenta, avec des espèces sonnantes, chez l’autorité congolaise à l’origine de l’arrestation de ces malfrats. C’est à ce moment que le patriotisme économique, comme disposition empathique, joua pleinement chez ladite autorité. Refus net face à la tentative de corruption de son visiteur. Elle saisît la justice pour une procédure en bonne et due forme. Les délinquants furent expulsés et l’argent déposé au Trésor public. Une personne dénuée de patriotisme, comme on en rencontre à tous les coins de rue, aurait sans difficulté signé pour libérer les délinquants incriminés. Quotidiennement, le Congo est victime des corrupteurs et de corrompus qui s’engraissent sur son dos. Même le citoyen lambda vit ces outrages. Le moindre acte administratif est monnayé. Toute honte bue, le personnel administratif se repait des difficultés des usagers. La gangrène est généralisée. Le pays entier en pâtit. Face à la crise qui perdure, du fait de quelques kleptomanes, pointés du doigt par l’opinion publique, nonobstant la présomption d’innocence, les Congolais attendent des comptes. L’heure des constats est terminée. Il faut agir. Le Congo est assommé, groggy. Il y a véritablement péril en la demeure.

Le président de la République, à défaut d’agir, doit réagir pour arrêter la chienlit. Le peuple attend des signaux forts pour dégonfler de petites gloires bouffies érigées sur la toute-puissance des déviances. Le Congo a un besoin urgent de retour  aux valeurs de patriotisme, d’honnêteté et de responsabilité. Ce pays a perdu tous les répères moraux, pourtant précieux garde-fous contre les déviances que nous stigmatisons et qui brident l’élan de construction nationale. Le Congo a tourné le dos à ce qui est sublime, le sens de l’honneur et de la dignité. Les vrais héros ne sont pas toujours ceux que l’on croit.

 

Mfumu

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