L’agriculture italienne s’offre en modèle à l’Afrique

Vendredi 21 Février 2014 - 18:51

Abonnez-vous

  • Augmenter
  • Normal

Current Size: 100%

Version imprimable

Les ministres africains de l’Agriculture se sont retrouvés à Rome pour une rencontre avec les experts de l’agro-alimentaire italien

La capitale italienne a vécu au rythme des débats sur l’agriculture, surtout africaine, tout au long de la semaine passée. L’Italie, qui veut replacer l’Afrique au centre de sa politique de coopération, a en effet accueilli avec bonheur la concomitance de trois événements majeurs, qui, du lundi au vendredi, ont rassemblé ministres et décideurs institutionnels ou privés du secteur agricole.

D’abord, ce fut le quinzième Forum mondial de l’agriculture. Ensuite, toujours à Rome, la tenue du 37e Conseil des gouverneurs du Fonds international pour le développement agricole, le FIDA. Et enfin, une réflexion souhaitée par le ministère des Affaires étrangères, la Farnesina, sur le même sujet mais dans la cadre de l’initiative ItalAfrica : un programme de développement intégré englobant les secteurs essentiel de l’économie et de la politique africaine, lancé en décembre dernier par la ministre Emma Bonino.

À la clôture de ce dernier événement, les participants aussi bien Italiens qu’Africains sont tombés d’accord pour reconnaître à l'Italie l'excellence de son agriculture, portée par de petites et moyennes entreprises ou des producteurs familiaux et répondant parfaitement aux contours de l’Afrique agricole. C’est, de l’avis des organisateurs, l’élément le plus intéressant ayant émergé de la table-ronde.

Ministres de l’agriculture du continent, représentants d’organisations spécialisées de l’ONU (FAO, Fida), ONG (Slow Food) ou encore associations d’entrepreneurs italiens ont été d’accord, ainsi que l’a souligné le sous-secrétaire du ministère des Affaires étrangères, Mario Giro : « Le modèle agricole italien, basé sur l’entreprise familiale, s’adapte bien au modèle agricole africain. Si nous pouvions transmettre l’excellence italienne à l’agriculture africaine, nous pourrions donner lieu à un modèle de référence. »

Pour leurs pays, les ministres africains de l’Agriculture ont quelque tempéré cet enthousiasme en rappelant que l’agriculture africaine était déjà basée sur l’excellence. Et qu’en plus, elle était biologique, familiale et à hauteur des communautés villageoises. Ce point de départ est un atout pour une coopération avec l’agriculture italienne. Mais cela, c’est pour le futur. Le présent, lui, ne se présente toujours pas sous la forme de roses sans épines.

Les ministres de l’Agriculture du Cameroun, de l’Angola, de la République démocratique du Congo, de l’Éthiopie, de l’Ouganda et du Sénégal ont fortement souligné que des problèmes subsistaient pour une coopération optimale en la matière. Le manque d’infrastructures pour l’écoulement des produits agricoles, le peu de personnel formé et le manque criand de technologies d’optimisation de la production ne sont que quelques-uns des problèmes les plus récurrents.

Ces pays ont néanmoins fait part d’une croissance économique dynamique, prenant en compte la production agricole, aussi limitée qu’elle soit pour le moment. Sans parler des atouts d’une agriculture africaine qui a encore devant elle à disposition des millions d’hectares de terres non exploitées et sur lesquelles pourraient se fonder les projets d’avenir. L’introduction de technologies appropriées permettrait à ces terres de devenir la colonne vertébrale de l’économie des pays, ont-ils relevé.

Ne tenant pas à transformer une rencontre de réflexion en une déclinaison de tableaux idylliques, le fondateur de l’association Slow Food, Carlo Petrini, a tenu à apporter son grain de poivre. Il a vigoureusement invité l’Italie à ne pas tenir un discours double :  pour les salons et pour les « pauvres » agriculteurs africains. « Vous devez insister afin que s’achève le honteux "dumping’"en Afrique des produits agricoles subventionnés par l’Union européenne ! »

En effet, il est paradoxal de trouver sur tous les marchés africains au sud du Sahara le poulet local vendu plus cher que le poulet (congelé) importé d’Europe. Avec, en plus, des garanties de sécurité alimentaire qui ne sont pas des plus indiscutables, soulignent des ONG ! Malgré cette situation, l’Italie reste convaincue qu’il « faut que l’Italie brille en Afrique, le continent qui compte sept des dix pays à la plus rapide croissance économique du monde », comme l’a réaffirmé le vice-ministre des Affaires étrangères, Lapo Pistelli, lors de la rencontre.

Lucien Mpama