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Christophe Moukouéké

Vendredi 2 Mai 2014 - 0:42

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Au moment où l’échiquier politique vibre au rythme du débat sur la Constitution du 20 janvier 2002, il m’est difficile de ne pas penser, en son jour anniversaire, à Christophe Moukouéké, 75 ans cette année. Il en aura 77 en 2016, l’année de la prochaine élection présidentielle. Né le 25 avril 1939 à Mvouti, il est constitutionnellement disqualifié de la course présidentielle, iniquement déclassé par le verrou de l’âge contenu dans la constitution incriminée. Il a pourtant un vrai potentiel à mettre au service du Congo. Son âge sonne, hélas, comme un thrène.

Au début des années 1970, Christophe Moukouéké, enseignant de carrière, fait partie des jeunes loups du Parti congolais du travail. Nos destins se sont croisés alors qu’il était directeur du collège Javouhey à Brazzaville. J’y ai passé trois mois en qualité d’élève et de président de l’Union générale des élèves et étudiants congolais sous son encadrement bienveillant. Tous ceux qui l’ont connu à cette époque gardent de lui le souvenir d’un homme ouvert, disponible et travailleur. Après le travail, le réconfort, dit-on trivialement. Bon vivant, il a ses entrées dans les concerts des Bantous de la capitale où il était une figure familière. Il fut nommé ministre de l’Enseignement primaire et secondaire le 16 décembre 1971. Il y fit la preuve de ses qualités de grand clerc de l’État. Je perdis avec son départ le parapluie qui faisait de moi un personnage important dans ce collège. Je quittais à mon tour Javouhey la même année, après les vacances de Noël.

Après une trêve ministérielle, il retrouve le gouvernement le 9 janvier 1975 en qualité de ministre de l’Information. Étudiant à Bordeaux, je lui demandais une documentation sur son ministère, qu’il me fournit avec diligence. Voilà un homme que la politique n’avait pas changé. Il avait su garder son habituel entregent. Pendant plus de deux décennies, à différents postes de responsabilité, il est au firmament de la politique dans notre pays, jusqu’à un passage à vide qui ne dura pas longtemps, heureusement pour lui.

La Conférence nationale, dont il fut l’un des instigateurs acharnés, lui donna l’occasion de rebondir. En politique, on n’est jamais définitivement perdu. Très vite, dans une démocratie en gestation où chacun cherchait ses marques, il se retrouva en définitive dans l’Upads, le parti du professeur Pascal Lissouba. Il en devint le secrétaire général. Une fois de plus, pour une interview, j’eus besoin de lui. Je me rendis chez lui. Les cerbères postés à l’entrée de son domicile voulurent me barrer la voie. De son observatoire, il leur fit signe de me laisser passer. Toujours ce proverbial entregent.

Politiquement, il ne fut pas exempt de critiques. Et certains de ses propos le classèrent dans le camp des « durs » sous le régime du président Lissouba. Dans le feu de l’action, ceux qui agissent se trompent parfois. Absolution, s’il en est.  Son destin bascula avec la guerre du 5 juin 1997. Il prit avec d’autres compatriotes la route de l’exil. Exil douloureux. Au cours d’une mission en Côte d’Ivoire, il me reçut obligeamment à son domicile abidjanais. L’homme n’avait pas changé. Il transcendait sa mélancolie qui filtrait, néanmoins, dans ses propos.

Il y a un temps pour se battre, il y a un temps pour se réconcilier. Tous ceux qui étaient en exil purent rentrer au Congo. Christophe Moukouéké revint au pays et se fit élire, dans la foulée, député de la circonscription de Mabombo en 2007. Ténor de l’opposition, Christophe Moukouéké a encore une carte à jouer. Candidat à la prochaine présidentielle ? Dans l’hypothèse d’une remise en question des verrous de l’actuelle constitution, ses espérances ruinées trouveront les conditions réunies pour une telle éventualité. À condition qu’il en ait envie. Bon anniversaire, mon vieux !

Mfumu

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Édition Quotidienne (DB)

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