Échos des communes : Limete dans l’œil du cyclone

Jeudi 8 Décembre 2016 - 16:00

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Ce secteur situé précisément dans le périmètre compris entre le siège de l’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS) et la résidence de son président national Étienne Tshisekedi s’est forgé, bien malgré lui, la réputation d’une zone névralgique.

C’est dans ce rayon d’action que de nombreux incidents ont été déplorés sur fond d’actes subversifs qui, jusque dans un passé récent, ont mis en mal la quiétude des Kinois. Par ces temps qui courent, il ne fait pas bon vivre dans ce quartier, l’un des plus huppés de Kinshasa. La sécurité y est toujours précaire et fragile. Tout peut, en effet, capoter à n’importe quel moment. Le fait pour « Ya Tshisthi » d’y avoir établi sa résidence sur l’avenue Pétunias à la 10e rue serait à l‘origine du calvaire récurrent que vit la population de ce coin de la capitale obligée de faire avec. Les troubles, pillages, arrestations, affrontements entre les militants de son parti et les policiers anti-émeute sont devenus le lot quotidien des résidents de ce quartier d’où partent souvent des manifestations d’envergure de l’opposition.

À l’approche de la date du 19 décembre censée marquer la fin du mandat constitutionnel du chef de l'État, la police qui redoute des troubles, a déjà déployé ses unités sur les lieux afin de parer à toute éventualité. Sur le petit boulevard où est érigé le nouveau siège de l’UDPS sur la 11e rue, des policiers armés montent la garde à quelques encablures, épiant les moindres faits et gestes des militants. Une tente estampillée du sceau de la police faisant front au siège du parti est dressée comme pour bien tenir à l’œil les affidés du « lider maximo ». Ces derniers, regroupés autour de leurs encadreurs, écoutent religieusement les dernières consignes.  Michel Ndolo (23 ans) ne rate plus une seule occasion pour exprimer son ras-le bol face aux violences récurrentes qui gangrènent son quartier et, comme beaucoup d’autres habitants, il pense déjà aller s’installer ailleurs. « Les 19 et 20 septembre derniers, nous avons vécu des troubles qui ont entraîné mort d’homme à la suite  d'une manifestation de l‘opposition. Nous vivons dans une psychose continuelle et permanente. D’ici le 19 décembre, nous serons obligés d’aller trouver refuge ailleurs », a-t-il lâché sur une pointe d’amertume.

Les plus téméraires, eux, n’entendent pas bouger de leur lieu d’habitation. « J’ai pris des dispositions nécessaires. Advienne que pourra ! », a lancé Amédée dont la maison jouxte la permanence de l’UDPS. Dans plusieurs familles, les provisions alimentaires garnissent les réfrigérateurs et autres congélateurs, question de parer à toute éventualité.  Un peu plus loin, Donat Midike (33 ans) taille bavette, à l’ombre des feuillages d’un arbuste, avec une poignée des militants autour des enjeux politiques. Il s’extasie à l‘idée d’être approché par un journaliste. Il vante les mérites des combattants tout en observant une pensée pieuse à l’endroit de tous ceux qui ont payé de leur vie pour défendre une juste cause, celle de la liberté et de la démocratie. Citant au passage un de ses grands amis, Clovis Wemankoy Tambwe plusieurs fois arrêté et dont le nom est souvent associé à plusieurs manifestations subversives à Kinshasa, le jeune Donat loue le sens du risque d’un compère dont il a perdu les traces.

À la question de savoir où se trouverait actuellement Clovis qu’il tient apparemment en estime, il écarquille ses yeux avant de lâcher : « Tout ce que je sais est que l’un de ses proches en la personne d’Ongono Mulasa Patrick a été  arrêté au début du mois d'août 2016 en lieu et place de son frère en cavale ». Dans cet environnement bruyant où l’on parle de tout et de rien, chacun tente de vanter ses prouesses de combattant aguerri à l’instar de celui qu’on appelle affectueusement « Ya Franck », un malabar d’une trentaine d’années au physique impressionnant. Il a participé à toutes les péripéties ayant émaillé le combat du parti pour la liberté. Au départ déterminé, à l’instar de ses amis, à tout mettre sens dessous-dessus le 19 décembre, le jeune homme s’est finalement réduit à l’expectative, en attente des résultats des récentes négociations directes entre le pouvoir et l’opposition engagées sous la férule des évêques catholiques. De la suite de ces pourparlers de la dernière chance dépendra de l’attitude à prendre, s’est-il enquis visiblement prêt à se sacrifier pour l’intérêt général. 

Alain Diasso

Légendes et crédits photo : 

Entrée du Bouleverad Lumumba à la hauteur de la 1re rue/Limete

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