Économie : pour Carlos Lopes, l'Afrique doit « mettre l'accent sur l'industrie et les services, plus que le secteur agricole »

Lundi 7 Octobre 2013 - 11:57

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Le secrétaire exécutif de la Commission économique pour l’Afrique (CEA), Carlos Lopes, qui a la charge de promouvoir le développement économique et social du continent et de favoriser l’intégration régionale, a commenté le rapport économique sur l’Afrique 2013 dans un entretien avec le magazine Afrique Renouveau

Carlos Lopes pense que depuis 2012, « ce sont les mentalités et les priorités, peut-être plus que l'économie, qui changent profondément. » Dans ses travaux sur les cinquante prochaines années avec la Banque africaine de développement et la Commission de l’Union africaine (UA) sur le programme Vision 2063, la CEA a « convaincu les ministres africains des Finances d’approuver le projet de transformation des économies africaines et de mettre l’accent sur l’industrie et les services plus que le secteur agricole ».

Selon lui, il faut engager le processus sans attendre pour trois raisons : d’abord, parce que les grandes transformations se font en période de croissance et lorsque la population urbaine s’accroît, ce qui est le cas en Afrique ; enfin, ces transformations peuvent actuellement bénéficier d’un bon environnement macroéconomique. « Nos réserves atteignent 500 milliards de dollars, leur plus haut niveau historique. L'inflation est de 7 % en moyenne. Nous avons désormais un système de réglementation, en particulier dans le secteur financier, et les déficits sont maîtrisés. L'industrialisation sera la clé de cette transformation », explique-t-il.

L’Afrique, qui a l’avantage d’être en position de monopole sur certains marchés, peut obtenir des termes favorables pour l’achat de matières premières comme le cacao, car « l’Europe ne lâchera rien » sur ces questions. Son avenir dépend donc de l’industrialisation et non des matières premières agricoles qu’il est essentiel de produire, mais pour l’Afrique, résume Carlos Lopes. Si l’industrialisation est une nécessité pour l’Afrique, elle doit s’appuyer sur les matières premières, dont quelques-unes sont agricoles, comme le cacao, le coton et le sucre, mais, souligne-t-il, « nous devons surtout créer un marché pour la consommation des produits agricoles du continent. »

Sur l’intégration, Carlos Lopes pense que l’avenir de la zone africaine de libre-échange appartient aux blocs régionaux constitués par les communautés économiques régionales. Mais les différences liées aux investissements, en termes de rythme de développement et de performances, y sont importantes. C’est le cas entre la Communauté d’Afrique de l’Est et l’Union du Maghreb arabe. Le commerce intra-africain, relève-t-il, se fait par des transactions informelles et la zone de libre-échange continentale est surtout l'expression d'une ambition.

Aujourd’hui, la Chine est le plus grand partenaire commercial de l’Afrique. La totalité des investissements en Afrique représente 5% du total des investissements chinois à travers le monde, et de nombreuses voix s’élèvent pour dire que « les Chinois prennent plus à l’Afrique qu’ils n’y investissent ». L’UA a donc pris la décision de mettre un frein aux nouveaux partenariats et a demandé un réexamen de ceux existants.

Carlos Lopes plaide pour une spécialisation de la CEA sur le savoir lié aux activités économiques du continent, en mettant l’accent sur les statistiques, seul moyen de planifier efficacement.

Enfin, il se dit certain que d'ici à 2040, la plupart des pays africains seront des pays à revenu intermédiaire. « Nous aurons à notre actif une main-d'œuvre importante, la plus importante et la plus jeune du monde, tous continents confondus », assure-t-il.

Noël Ndong