Infrastructures portuaires africaines : Dar es Salam double son volume, Banana dans les oubliettes

Samedi 27 Août 2016 - 14:08

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D’ici à 2020, le trafic annuel du port tanzanien de Dar es Salam passera à vingt huit millions de tonnes, contre quatorze millions en 2013 et 2014. Sa direction générale vient de confirmer un financement de six cent quatre-vingt dix millions de dollars américains pour des travaux d’expansion. Le deuxième port d’Afrique dessert des pays enclavés et semi-enclavés comme le Malawi, la Zambie, le Burundi, le Rwanda, l’Ouganda et même la RDC. Au-delà, la Tanzanie projette de construire bientôt le premier port d’Afrique, en face de l’île de Zanzibar. Voilà ce qui relance le débat interne autour du projet d’érection du port en eaux profondes de Banana, la porte océane de la RDC, pour réduire la dépendance du pays aux ports maritimes régionaux.

Selon le directeur général du port de Dar es Salam, Deusdedit Kakoko, cité par l’Agence Ecofin, le financement sera mobilisé à travers des prêts concessionnels et des subventions négociés auprès de différents partenaires. Au premier rang, il y a la Banque mondiale à travers son agence, la Banque internationale pour la reconstruction et le développement (Bird), qui apportera l’essentiel du financement, soit environ 600 millions $. Le reste de la cagnotte proviendra du gouvernement tanzanien (60 millions $) et du ministère britannique pour le développement international (30 millions $). L’argent à mobiliser servira à financer plusieurs types de travaux. Concrètement, le projet d’expansion du port de Dar es Salam concerne l’approfondissement et l’élargissement des quais ainsi que la construction de plusieurs autres. Au-delà, il est prévu une opération de dragage pour approfondir le canal du port et atteindre un tirant d’eau de 14 m. L’objectif étant d’accueillir des bateaux à plus fort tonnage. Enfin, le projet permettra de faire passer le nombre de portiques de 3 à 5. Néanmoins, il est difficile d’occulter les travaux de modernisation prévus du réseau ferroviaire du port et de l’infrastructure routière permettant d’arriver au site portuaire.

Un rôle régional plus accru

Dans un contexte d’explosion du trafic en Afrique, l’enjeu est énorme pour les ports africains à vocation régionale ou sous-régionale. En effet, les études confirment un plus fort engagement des pays africains dans la modernisation de la logistique pour aller toujours plus vite et contribuer plus activement à une nouvelle configuration des transports dans la région à l’heure de la mondialisation. Les lignes maritimes se consolident, avec des contacts directs plus réguliers avec l’Amérique du Sud et l’Asie. Dès lors, les ports africains sont conscients que leur compétitivité tiendra compte de 3 principaux facteurs : le coût, la sécurité et la durée d’attente. Avec le projet d’expansion, Dar es Salam lorgne désormais sur les 28 millions de tonnes par an à l’horizon 2020, soit plus de 2,6 milliards $ supplémentaires par an pour les pays de la sous-région au cours des quatre prochaines années. Son trafic est constitué à 95 % du commerce international de la Tanzanie. Pour l’heure, Dar es Salam est le deuxième grand port d’Afrique de l’Est après celui de Mombasa (Kenya) qui a géré un volume de près de 27 millions de tonnes en 2015. Toutefois, le projet Bagamoyo, à 70 km de Dar es Salam, propulsera la Tanzanie à la première place. Il s’agit de la construction du plus grand port du continent africain qui coûtera environ 10 milliards $.

RDC : qu'en est-il du premier port en eaux profondes ?

Le projet Banana, avec son chemin de fer pour la prise en charge des marchandises, coûtera environ 5 milliards $. La RDC dispose actuellement de 3 principaux ports : Matadi (le mieux développé, à 150 km de l’océan), Boma (à 90 km de l’océan) et Banana qui donne sur le littoral. Le port en eaux profondes de Banana constitue un projet porteur pour sa capacité à encourager une grande activité économique et à créer des emplois. À ce titre, l’État espère accorder les garanties nécessaires à ce projet pour trouver un bon investisseur et un bon constructeur. Selon les experts, Banana est le troisième grand chantier de la RDC après Inga III et Zongo II. Le pays est vraiment demandeur d’un terminal plus grand capable d‘accueillir des conteneurs de grande capacité à partir de Banana à Muanda, un territoire côtier du Kongo central. Étant un des grands pourvoyeurs du trafic maritime dans certains ports régionaux dont Walvisvay en Namibie, Pointe Noire en République du Congo, Durban en République Sud-africaine, Lobito en Angola et Dakar au Sénégal, le pays classe ce projet comme étant stratégique pour accompagner son développement économique.

Tirant une lecture bien alarmante du développement constant et rapide des infrastructures portuaires de la sous-région, la RDC veut donner un second souffle au projet de Banana, avec une première phase de construction à lancer au courant de cette année. Des pourparlers avec les partenaires étrangers (Corée du Sud, etc.) sont signalés. Cela implique la construction simultanée d’une voie ferrée Kinshasa-Banana. Il faut mettre en place un réseau ferroviaire et fluvial pour la prise en charge des marchandises jusque dans la capitale. Le projet doit intégrer un programme plus vaste de viabilisation du territoire de Muanda qui vise notamment à doter la localité d’eau courante et de courant électrique, sans oublier les infrastructures connexes. Et cela prendra forcément du temps et coûtera beaucoup d’argent.

Laurent Essolomwa

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