Interview: Professeur Elira Dokékias: « Le centre national de drépanocytose nécessite une attention particulière »

Lundi 14 Août 2017 - 22:11

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Lors de la sixième conférence de l’Alliance des ligues Francophones Africaines et méditerranéennes contre le cancer (ALIAM) tenue à Brazzaville, l’épouse du chef de l’Etat s’est interrogée sur le fonctionnement actuel du centre national de drépanocytose Antoinette Sassou N’Guesso. Abordé par Les Dépêches de Brazzaville, le directeur général de ce centre, le professeur Elira Dokékias, spécialiste de la drépanocytose et des maladies du sang a évoqué quelques difficultés

 

Les Dépêches de Brazzaville (LDB): professeur, quelles sont les difficultés auxquelles le Centre national de référence de la drépanocytose et des maladies rares est confronté depuis son inauguration ?

Elira Dokékias (ED): l’Etat, en collaboration avec ses partenaires avaient fourni quelques équipements de bureaux dans les salles de soins et de consultation pour faire fonctionner cet établissement public à vocation sous-régionale. Des appareils de radiologie ont été installés certes, mais ne peuvent démarrer parce que le courant fourni est insuffisant. Par ailleurs, des machines nécessaires pour effectuer la biologie moléculaire, les examens d’hématologie et le dépistage de la drépanocytose n’ont pas encore été fournies.

L’acquisition d’un transformateur capable de supporter des charges électriques s’avère indispensable. Même pour être connecté à l’eau, nous étions obligés de prendre des alternatives. Avec des prévisions budgétaires, on pouvait réaliser quelques projets, mais la situation financière actuelle n’a pas permis à l’Etat d’honorer certains engagements. Pour que ce centre tourne à 100%, il faut une mobilisation.

L.D.B : Comment fonctionne ce centre ?

E.D : En tant que techniciens, nous avons été sollicités pour coordonner le démarrage de ce centre, raison pour laquelle nous nous sommes battus pour essayer de regrouper quelques lits d’hospitalisation, et de démarrer le deuxième volet de la formation. Le centre abrite, depuis le mois de Janvier la formation des spécialistes en hématologie composés pour l’heure des candidats du Cameroun et du Congo.

Sur le volet soin, depuis l’ouverture du Centre, 7800 nouveaux malades drépanocytaires ont été enregistrés. Tous les mardis et jeudi, nous consultons et administrons les soins d’hospitalisation régulièrement à plus d’une cinquantaine de malades par jour. Ces malades viennent la journée et repartent chez eux le soir, une façon d’alléger les charges du CHU dont le service d’hématologie d’hospitalisation ne compte que 24 lits.

Pour garantir les soins de qualité, nous nous efforçons à faire en sorte que le ravitaillement en médicament se déroule sur place. La consultation est payante avec des coûts exorbitants, mais les enfants drépanocytaires la font gratuitement. Malgré les difficultés constatées, nous essayons de tourner en permanence.

LDB : Sur le volet de la recherche, où en êtes-vous ?

E.D : Le centre national de prise en charge de la drépanocytose est le résultat de l’aboutissement du travail de sensibilisation abattu par la Fondation Congo assistance pendant plusieurs années, en direction des autorités congolaises ainsi que de la communauté internationale. Cette Fondation a signé récemment aux Etats-Unis un partenariat avec Howard University spécialisée dans le domaine de la recherche sur cette anémie. À la fin de cette année, les membres de cette université effectueront une visite de travail à Brazzaville pour concrétiser les volets de cette coopération.

En même temps, nous avons fait un plaidoyer auprès de la Fondation Necker. Les responsables de cet hôpital viendront à Brazzaville pour faire l’état des lieux. Nous collaborons aussi avec d’autres fondations qui sont prêtes à nous aider pour équiper le centre. À l’occasion de cette visite, une journée scientifique sur la drépanocytose sera organisée en septembre prochain. Elle regroupera les spécialistes de la drépanocytose du Congo, de la RDC, du Gabon et du Cameroun, en coordination avec la FCA.

Nous travaillons aussi en partenariat avec la Fédération mondiale de l’hémophilie. Lorsque nous avons tenu nos premières journées de l’hémophilie au Congo, les échos ont traversé les frontières. Aussitôt, ils se sont mobilisés pour une prochaine action au Congo prévue en octobre prochain. A cet effet, plusieurs spécialistes du monde Francophone sont attendus à Brazzaville pour faire en même temps un état des lieux et prendre en compte l’aspect formation sur l’hémophilie. L’association mondiale de l’hémophilie et l’association française de l’hémophilie seront à Brazzaville d’ici peu en vue de développer cette coopération.

LDB : Que doit-on faire pour que ce centre fonctionne à 100% ?

Malgré l’absence d’un budget de financement réel, nous nous sommes battus pour faire fonctionner ce centre. Avec tout ce qui va être fait, nous espérons que l’Etat, malgré les difficultés financières actuelles fera de telle sorte qu’un transformateur soit installé. Les investissements prioritaires doivent être faits pour stimuler les chercheurs d’autres pays à venir au Congo, afin de rendre à ce centre sa vocation purement sous-régionale.

 

 

Propos recueillis par Yvette Reine Nzaba

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