Interview. Tony Cassius Bolamba : « À chaque changement brusque en Afrique, la démocratie régresse »

Mardi 1 Septembre 2015 - 17:15

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Sorti de sa réserve, le président du Mouvement pour le Congo (Moco) commente l’actualité politique de la RDC tout en réagissant sur la non-validation par la Cour constitutionnelle burkinaise des candidatures de plusieurs anciens dirigeants et cadres du parti de Blaise Campaoré pour les prochaines législatives.  

Les Dépêches de Brazzaville : Comment réagissez-vous aux dernières décisions du Conseil constitutionnel du Burkina Faso sur la non-éligibilité de certains proches de Blaise Campaoré aux élections législatives du 11 octobre 2015 ?

Tony Cassius Bolamba : Quand j’insiste que nous puissions aller aux élections apaisées, c’est justement pour éviter de tomber dans ces genres de travers. Au Burkina, le président Blaise Campaoré a démissionné de ses fonctions présidentielles. Conformément à la Constitution burkinaise, c’est le président de l‘Assemblée nationale qui devait diriger le pays eu égard à la vacance observée à la présidence. En lieu et place, on a rafistolé une transition avec un président. Ce qui est anticonstitutionnel. Quand il y a des changements brusques en Afrique, nous tombons souvent dans l’anticonstitutionalité. C’est avec regrets que j’ai appris que les anciens dignitaires du régime Campaoré et les anciens parlementaires ayant soutenu le changement constitutionnel ne seront pas autorisés à participer aux élections. C’est une décadence de la démocratie.

LDB : Vous soutenez donc l’illégalité de la décision du Conseil constitutionnel du Burkina ?

TCB : Chaque pays est libre de soutenir chaque action politique ou chaque loi qui rentre dans la légalité. J’ai lu et relu la Constitution du Burkina Faso, je n’ai pas vu d’article où on interdisait aux parlementaires ou aux citoyens burkinabé de prendre position. Nous voulons la démocratie mais nous devons nous en tenir au strict respect des lois démocratiques. Je pense que le Conseil constitutionnel du Burkina est dans l’erreur. Il doit rectifier le tir parce qu’à chaque fois que certains sont écartés du jeu politique, cela crée des frustrations surtout lorsqu’ils estiment que leur marginalisation est illégale. Cela nous crée toujours des problèmes en Afrique.

LDB : Quel crédit peut-on finalement accorder aux cours constitutionnelles souvent présentées comme inféodées aux pouvoirs en place ?    

TCB : Je ne dirai pas qu’elles sont inféodées aux régimes en place. Cela dépend de la manière dont elles tranchent certaines décisions. Gare aux jugements subjectifs et sans fondements. C’est sur la base des décisions qu’elle apprend que nous pouvons porter un jugement sur sa politisation ou pas. Nous ne pouvons pas  émettre des jugements tant que nous ne sommes pas encore devant les faits. C’est manquer de bon sens.  Je crois à la hauteur et à l‘indépendance d’esprit incarnées par les éminentes personnalités qui composent la Cour constitutionnelle de la RDC.

LDB : Que vous inspire la perspective de nomination des futurs gouverneurs  de nouvelles provinces en lieu et place de leur élection ?     

TCB : Ce n’est pas prévu dans la Constitution. Je crois que nous irons aux élections. Présentement, nous ne sommes pas encore dans ce cas de figure. Au cas où cela aurait lieu, nous tirerons les conséquences. Certes, je ne suis pas d’accord avec la manière dont le pays est gouverné depuis dix-huit ans maintenant mais je reste républicain. Raison pour laquelle je crois beaucoup aux élections.

LDB : L’impasse persiste par rapport à l’élection de nouveaux gouverneurs.  

TCB : Les députés provinciaux sont effectivement hors mandat. Nous aurons des élections provinciales pour bientôt. Cela fait depuis longtemps qu’ils sont hors délai constitutionnel et qu’ils votent les gouverneurs, pourquoi va-t-on en faire un problème maintenant alors que çà toujours fonctionné ainsi ? Nonobstant le fait que les assemblées provinciales actuelles sont hors mandat depuis un temps, il est souhaitable qu’elles élisent les nouveaux gouverneurs même provisoirement au lieu qu’ils soient nommés de sorte que nous restions dans l’esprit du cadre constitutionnel.

LDB : Êtes-vous partie prenante au dialogue national en vue ?  

TCB : Dans une République, nous devons toujours dialoguer, quels que soient les circonstances, les événements et les moments. Nous traversons une période très complexe de l’histoire de notre pays avec la présidentielle prévue pour  2016. Nous sommes au dernier mandat constitutionnel du président de la République et le dialogue est important pour que nous puissions parler de l’apaisement des esprits. Ce dialogue est très important pour que nous puissions atterrir en douceur devant les évènements et les péripéties qui surviendront au pays. Ceux qui refusent le dialogue, j’estime qu’ils ont un esprit non républicain. Le pouvoir en place, c’est notre tout premier partenaire au dialogue. Nous ne devons jamais rompre le dialogue avec lui pour le bien de la République. Me référant aux anciennes luttes qu’a connues l’Afrique à l‘image de celle de l’ANC en Afrique du Sud, premier partenaire du pouvoir apartheid en Afrique du Sud, elle a abouti à une solution négociée. Aujourd’hui le pays de Nelson Mandela compte parmi les États les plus stables du continent.

LDB : Le tout pour déboucher sur une nouvelle transition

TCB : J’en appelle à l’esprit du dialogue mais sans transition parce que nous avons des institutions qui fonctionnent, nous avons une majorité bien définie et il ne nous reste plus qu’une année ou presque pour les élections. Parler d’une transition dans ce cas, c’est dénigrer et rabaisser la démocratie.

LDB : Candidat gouverneur à l‘Équateur, comment vous vous préparez ?

TCB : Je suis le plus jeune de tous les candidats. Je n’insulterai pas l’âge des aînés. Mais je crois que l’Équateur a beaucoup des défis à relever. Donc, il faut du sang neuf pour rebooster cette province, la plus pauvre du pays avec approximativement 94% des miséreux et plus ou moins 70% d’analphabètes. Toutefois, les potentialités ne manquent pas. Rien qu’en comptant sur notre jeunesse (65% ont moins de 20 ans), je suis convaincu qu’en remettant les jeunes au travail, nous palperons les résultats au bout de six à neuf mois. J‘ai l’expérience et l’expertise au regard des fonctions que j‘ai occupées à l’étranger. Je vais mettre en place mon réseau tant à l’extérieur qu’à l’intérieur du pays au service du développement de la RDC et de l’Équateur. Mon plan d’action comporte quatre grandes lignes. La première action que je vais initier une fois élu consistera à remettre la province en marche par des mécanismes déjà montés au sein de mon équipe de campagne et de mon cabinet de réflexion.

Alain Diasso

Légendes et crédits photo : 

Tony Cassius Bolamba

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