Société : maman Solo, que dit la loi au Congo ?

Vendredi 17 Mars 2023 - 12:32

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Il est une lutte pour les droits des femmes qui mériterait sans doute une attention des plus bienveillantes : l’état de mère célibataire. Loin d’être une condamnation, il alourdit pourtant de façon pratique le chemin de vie de jeunes femmes qui doivent assumer seules la charge d’une famille monoparentale. Maman Solo, que prévoit la loi au Congo ?

« Ils se marièrent, vécurent heureux et eurent beaucoup d’enfants ». Ce serait tellement beau si le conte de fées de toutes les femmes pouvait porter cette phrase : rencontrer l’homme de leur vie, être honorées par le mariage puis entrer à deux dans la vie de famille.

Bien souvent et malheureusement, la réalité est cabossée, malmenée de bobos relationnels, familiaux ; des choix de vie non-centrés ou non-assumés. Aucune femme ne fait le choix de se retrouver seule à élever un enfant, avec toutes les implications morales, affectives, spirituelles, financières et matérielles que cela implique.

C’est souvent des « accidents de parcours » ou la prise de conscience de certains aspects, certains facteurs, qui semblaient mineurs ou invisibles au début d’une relation d’amour. En effet, les relations, presque comme tout dans la vie, sont dynamiques. Elles sont appelées à changer, à évoluer ou non.

Pour une partie d’entre les femmes et de leurs partenaires, le choix de faire un enfant n’est pas mûrement réfléchi. L’enfant s’inscrit dans leur histoire comme la conséquence d’une vie émotionnelle vive, colorée, mais mal gérée, subie, ou simplement une vie sexuelle risquée, non-protégée.

Plusieurs, poussées par un partenaire qui fait volte-face ou qui disparaît dans la nature, ou simplement parce qu’elles n’assument pas les devoirs et contraintes de la maternité se font avorter une, deux, trois fois voire s’exposent aux risques et conséquences encourus de cet acte souvent réalisé clandestinement : erreurs et négligences chirurgicales, risque de stérilité, maladies infectieuses et dépression mentale….

Un bébé est porté au monde par un acte d’amour commun, ne serait-il que passager ou purement physique, émotionnel. Il devrait être assumé, accueilli avec amour et respect, porté au monde et dans la vie comme les enfants nés dans un cadre légal et protégé.

Au Congo où le concubinage l’emporterait par une écrasante majorité sur le mariage légal et officiel, les droits des femmes mères célibataires devraient être observés avec attention et bienveillance.

Elles sont nombreuses, livrées à la naïveté du jeune âge, à l’immaturité de leurs émotions et se retrouvent seules à devoir élever un enfant. Si pour les hommes il semble facile de s’envoler dans la nature, de refaire leur vie à volonté avec une deuxième, puis une troisième partenaire, de poursuivre sans entrave leur carrière professionnelle, une femme qui assume sa maternité ne devrait pas être stigmatisée pour son choix mais aidée et soutenue de manière pratique dans son quotidien en passe de recevoir la déferlante de la néo-natalité et de la maternité.

Une femme nouvellement mère est foncièrement en situation de vulnérabilité. Les premiers mois de la vie de l’enfant sont un enchaînement de surprises et de découvertes, d’épreuves physiques et sanitaires autant pour l’enfant que pour elle-même. Entre les premières nuits complètes, les premiers pas, les premières dents et la diversification alimentaire, les fièvres et les vomissements qu’on ne comprend pas, l’idéal est la présence d’une mère avisée et d’un partenaire, coéquipier, pour alléger ce voyage au quotidien et permettre à la femme de poursuivre elle aussi sa carrière professionnelle.

Il est donc impensable de laisser une femme être vouée à son propre sort  sans s’inquiéter de son devenir, voire de son avenir. Le père, pour qui cette expérience est tout aussi nouvelle, devrait être aidé par ses aînés, ses parents, à trouver sa place dans tous ces changements et à assumer ses responsabilités.

La loi régit et arbitre la vie de la cité

Le Code de la famille du Congo aide à ce sujet. L’alinéa 6 de son préambule stipule que « les parents ont envers leurs enfants nés hors mariage les mêmes obligations et devoirs qu’ils ont envers leurs enfants nés dans le mariage ». La loi régit et arbitre la vie de la cité mais devrait être appliquée et non pas éternellement violée, à l’image de la dignité de la femme.

Etre une mère célibataire n’est pas une condamnation, c’est une expérience chargée de leçons sur la vie face à ce petit enfant qui devient un vis-à-vis à part entière avec lui aussi un chemin de vie à encadrer.

Malheureusement, les jeunes femmes non-accompagnées par leurs familles et abandonnées par leur partenaire s’enfoncent et trouvent des solutions inadaptées pour s’en sortir. Certaines se retrouvent livrées à la prostitution, étiquetées alors de « pute ». D’autres, sans amour mais par nécessité, se donnent à des hommes mariés capables de les prendre en charge, sacrifiant ainsi leur droit à être elles aussi honorées. Une troisième catégorie se voit contrainte d’abandonner son sang à un membre de la famille ou dans les situations les plus critiques dans la rue ou dans les orphelinats. La dernière catégorie est de celles étiquetées « femmes de fer », celles qui s’imposent le devoir de la réussite professionnelle coûte que coûte pour sauver leur dignité et celle de leur enfant. Elles sont ainsi rendues dures et froides par la vie et, d’après certains hommes, « ne font pas envie ». Pourtant, derrière le bouclier, se trouve simplement une âme blessée.

C’est donc un devoir social et citoyen que de respecter toute femme qui élève seule son enfant. C’est le devoir de l’appareil de l’Etat de veiller à ce que ses droits soient respectés pour une réinsertion sociale et professionnelle à succès. Enfin, il revient à la femme avertie de cette expérience de parentalité de faire preuve de discernement afin d’orienter justement ses choix de vie et aller plus en sûreté vers un cadre marital plus équilibré.

Princilia Pérès

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